D'après les résultats d'une étude réalisée par la plateforme ReKrute et ses partenaires, rares sont les cadres qui témoignent fidélité à l'employeur. Un constat qui met en question la nécessité pour les entreprises de développer leurs marques employeur pour réussir le processus de rétention comme moteur de développement de chaque structure. Dans un contexte post-épidémiologique volatile et chargé de multiples défis liés notamment au besoin de réaliser une relance économique durable à plusieurs niveaux, le marché de l'emploi connait une mutation profonde des rapports entre salariés et entreprises. Les premiers peinent à trouver un emploi qui corresponde à leurs attentes et les seconds se trouvent, à chaque fois, dans le besoin de recruter et de maintenir les meilleurs collaborateurs qualifiés. Cependant, cette équation ne semble pas encore résolue sur le marché de l'emploi au Maroc parce qu'aujourd'hui sept sur 10 cadres actifs recherchent activement un nouvel emploi. Un constat qui questionne bien évidemment les propositions de valeur employeur, les processus de recrutement et de gestion des talents, le modèle managérial et la culture même des entreprises. C'est, d'ailleurs, le résultat frappant d'une étude intitulée « What Job SeekersWishEmployersKnew », publiée par Boston Consulting Group (BCG) et ReKrute.com, basée sur une enquête menée auprès de 90.000 talents dans 160 pays dont près de 400 au Maroc via The Network, le réseau international de portails emploi leaders dans le monde.
Compétences marocaines : Comment se comportent-elles dans le contexte actuel ? Malgré les incertitudes qui marquent le contexte actuel à l'échelle mondiale, 70% des salariés marocains recherchent activement un autre emploi, soit un taux plus élevé par rapport à la tendance mondiale (42%), souligne l'étude, selon laquelle, les talents marocains sont soit en quête de missions plus intéressantes avec un niveau de séniorité plus élevé, d'un nouveau métier ou d'un salaire plus élevé et un poste stable avec un bon équilibre vie personnelle-travail. D'ailleurs, les opportunités ne manquent pas au niveau du marché de l'emploi. Preuve à l'appui, 82% des salariés sont approchés plusieurs fois par an par les recruteurs, ce qui augmente leur estime de soi face à de nouvelles opportunités ; 65% d'entre eux jugent leur pouvoir de négociation de fort à très fort. Un autre constat frappant relevé par l'étude : même les salariés qui ne cherchent pas un nouvel emploi restent, pratiquement, ouverts à de nouvelles opportunités, soit 19% des salariés interrogés dans le cadre de cette étude. Ils sont susceptibles de s'engager dans le processus de recrutement devant des offres qui leur présenteraient une meilleure évolution de carrière (satisfaire leur ambition), un salaire plus élevé et/ou un meilleur équilibre travail - vie personnelle. Dans la même veine, l'étude fait ressortir que les actifs au Maroc (7%) sont moins intéressés par la mobilité interne que les actifs mondiaux, d'autant plus que leurs entreprises actuelles peinent à satisfaire leur curiosité, à les challenger sur des missions intéressantes et à concrétiser leurs ambitions en termes de salaire et de perspectives d'évolution. Du côté des entreprises, la mobilité interne est généralement perçue plutôt comme un risque que comme une opportunité. « C'est très rare quand la mobilité interne s'accompagne d'une augmentation de salaire surtout dans les petites structures, chose qui n'est pas très favorable aux perspectives d'évolution de chaque collaborateur. Par contre, la mobilité externe veut nécessairement dire une augmentation de salaire », nous a expliqué Philippe Montant, directeur général de ReKrute.com, qui met en avant l'intérêt pour les entreprises de développer leur stratégie de fidélisation, de modéliser leur culture d'entreprise, d'élaborer des plans d'évolution de carrière, de développer leur marque-employeur et de changer de posture managériale : détecter les envies en interne, attribuer des projets intéressants et accorder des bonus pour leurs collaborateurs.
Que faut-il faire pour attirer les meilleurs collaborateurs ?
Tout comme le candidat en recherche d'emploi est appelé à bien communiquer autour de ses compétences, les employeurs sont désormais, eux aussi, dans l'obligation de soigner leur communication RH pour attirer les meilleurs candidats surtout avec la montée en force de nouvelles exigences sur le marché de l'emploi. Dans ce sens, la présente étude a montré que les actifs au Maroc veulent travailler pour vivre, et non vivre pour travailler, 66% rêvent d'une carrière stable chez un employeur d'une bonne image de marque-employeur et qui accompagne ses salariés dans leur plan d'évolution de carrière, en leur permettant de travailler sur des technologies et des projets intéressants, le tout avec un mode de travail plein temps 5jours/7 en présentiel. Le challenge semble, donc, important pour les entreprises. Ces dernières sont appelées, d'après l'étude, à soigner leur offre d'emploi pour qu'elle soit transparente, précise et concise, tout en contenant les détails nécessaires du poste. Quant au processus de recrutement, les entreprises devront développer leur présence sur les plateformes de recrutement en ligne pour faciliter la communication avec les candidats à un poste donné, tout en optant pour une approche directe basée sur le contact humain avec les futurs collaborateurs dans la phase d'évaluation de leurs compétences. En gros, ce qui changerait la donne et mettrait les candidats plus à l'aise, d'après l'étude menée par ReKrute et ses partenaires, se résume en trois mots : transparence, souplesse et accueil. Cela englobe des visites des lieux, un contact avec les managers, moins de pression pour accélérer la prise de décision et plus de flexibilité lors des négociations en vue d'adapter l'offre aux besoins des candidats.
M.E.K. 3 questions à Philippe Montant, Directeur général de ReKrute.com Philippe Montant, DG de la plateforme de recrutement ReKrute.com a répondu à nos questions sur les résultats de l'étude : « What job seekerswishemployersknew ». « La mobilité interne est perçue plutôt comme un risque qu'une opportunité »
Le Critère de sécurité de l'emploi figurait en 2018 en troisième place parmi les facteurs de motivation au travail. En 2022, elle a redescendu à la 10èmeplace. Comment expliquez-vous cela ? Comme on ne peut pas à la fois avoir la sécurité de l'emploi et des salaires élevés, les candidats privilégient, aujourd'hui et depuis la fin de 2022, le fait d'avoir un très bon salaire. D'ailleurs, ce critère ne figurait pas parmi le classement de 2018, chose que nous avons perçue comme un signe de maturité du marché notamment des candidats, mais il nous a fallu passer par la période de la crise de Covid-19 pour que le salaire devient une priorité. 70% des salariés sont, d'après votre étude, à la recherche d'un nouvel emploi. Combien de temps investissent-ils pour ce faire ? Nous n'avons pas posé cette question à notre échantillon. Globalement, 89% des salariés se sont dit ouverts à de nouvelles opportunités mais par contre le temps qu'ils y passent n'est pas défini. Les salariés en recherche d'un emploi affichent moins d'intérêt à la mobilité interne qu'externe. Quelles sont, d'après vous, les raisons derrière ce choix ? Je pense que la majorité des entreprises, surtout les petites structures, ne fournissent pas assez d'efforts dans le développement de nouvelles opportunités en mesure de favoriser la mobilité interne de leurs employés. Même si la mobilité en interne reste un moyen, pour les entreprises, afin de capitaliser sur les ressources humaines à moindre coût, elle s'accompagne rarement d'une évolution de salaire. Un critère qui, rappelons-le, figure parmi les priorités de chaque employé. Certes, ça peut arriver qu'un collaborateur change de poste en interne sans une augmentation de salaire, mais il ne lui faut que peu de temps pour changer de poste en externe avec un salaire important.