la suite de l'attaque de l'Ukraine par les troupes russes, ce jeudi 24 février, l'Europe vit sa plus grande crise, depuis la fin de la 2ème guerre mondiale. Le reste du monde regarde avec anxiété l'évolution du conflit, et l'escalade dans l'autre guerre, la guerre de la « désinformation ». Toutes les populations européennes commencent à prendre conscience qu'elles vont subir de plein fouet les effets collatéraux de cette crise. Restrictions au niveau de leurs déplacements à l'intérieur, et surtout une baisse sensible de leur pouvoir d'achat. Cette question qui semblait échapper totalement aux candidats aux élections présidentielles françaises, obsédés jusqu'alors par la hantise de « l'islamisme » et surtout la question de l'immigration, la crise Russo-Ukrainienne prend toute son ampleur dans les débats politiques et dans les déclarations des candidats à cette échéance majeure, même si les résultats sont courus d'avance ! Apres la pandémie du Covid 19, qui a révélé l'absence totale d'une politique sanitaire commune, la crise Russo-Ukrainienne a sonné le glas et mis fin à l'illusion d'une Europe puissante et crédible face à l'ours russe, ce voisin encombrant et imprévisible. D'aucuns se posent la question du devenir de cette crise dans les relations internationales. Les Occidentaux en utilisant l'Ukraine comme bouclier pour défier la Russie, ne réalisent pas encore que le monde entier va connaître une nouvelle ère, tant au niveau des relations financières, qu'économique ou diplomatiques. 1-D'abord sur le plan des relations financières internationales, le dollar américain va perdre très prochainement son rôle de référence pour les transactions et les règlements internationaux. La Chine, avec ses alliés, se prépare déjà à proposer un autre système de règlements internationaux avec le yuan, au lieu du dollar américain. Ce qui signifierait la fin de l'hégémonie de Wall Street et de la City de Londres, sur le monde de la finance. De plus, à force d'agiter régulièrement le spectre du gel des avoirs des pays hostiles à leur politique, les Etats-Unis perdent leur crédibilité quant au respect des lois et accords internationaux en vigueur. 2- Sur le plan économique, cette crise va accélérer les fusions et absorptions des grandes firmes multinationales, en particulier dans le domaine médical et pharmaceutique, l'agroalimentaire, et l'industrie automobile. La Russie étant le 1er fournisseur de l'Europe en gaz et pétrole, va certainement maintenir à la hausse ces matieres énergétiques vitales pour les économies occidentales, 3- En fait c'est dans les domaines politique et diplomatique que les grands chamboulements vont se faire. Le monde, contrairement à ce qui a été écrit, ne sera pas multipolaire, mais bien bipolaire, avec une configuation inédite, à savoir d'un côté le monde occidental, comprenant les Etats- Unis, le Canada, l'Australie et toute l'Europ. En face nous aurons la coalition Russo-Indo- Chinoise, en plus de quelques pays alliés à la Chine, en particulier quelques pays d'Asie (Vietnam, Corée,) et certains pays africains. Toutes ces alliances vont se renforcer et seront nécessaires aux pays qui seront confrontés à une situation similaire à celle d'aujourd'hui, où deux voisins s'affrontent pour assurer leur sécurité. La Chine, la Corée, le Soudan, la Turquie, la Syrie et la Jordanie, et bien d'autres regions risquent d'embraser le monde et empoisonner les relations internationales, à cause des tensions palpables à leurs frontières. 4- A qui profite le crime... de guerre ? Cette crise Russo-Ukrainienne, à l'instar des autres foyers de tension ou d'affrontements, est une grande aubaine pour les fabricants d'armement, et comme par hasard, ce sont les Etats- Unis et... l'Union Européenne ! En 2006, la Russie était le principal exportateur mondial d'armement, selon le rapport du Stockholm International Peace Research Institute (Sipri). Mais en 2016, les Etats-Unis sont devenus les 1ers exportateurs d'armes avec 22,36 milliards d'euros, la Russie avec 6 milliards d'euros et la France avec 4,3 milliards d'euro. Cumulées, les exportations des Etats membres de l'Union Européene (UE) vers les Etats non-membres font de l'organisation européenne le troisième exportateur d'armes du monde avec 27% de part de marché. Sur les 100 premières sociétés d'armement, 50 sont américaines, dont cinq occupent les 5 premiers rangs, totalisant un chiffre d'affaires de 192 milliards $, 7 sont chinoises, dont quatre figurent parmi les 10 premières sociétés d'armement ! L'Algérie, quant à elle, est en 2017 le premier pays importateur d'armement du continent africain. Entre 2001 et 2008, l'Algérie a importé pour 4,9 milliards de $ d'armement, essentiellement de Russie et de Chine. Le 13 avril 2021, l'administration du président américain Joe Biden a signé un contrat de vente d'armes de plus de 23 milliards de dollars aux Emirats arabes unis, ne comprenant pas la vente de Jets de combat F-35 aux Emirats. Désormais, il est à craindre que cette tendance au surarmement ne s'intensifie dans l'avenir. L'Allemagne et le Japon, conscients de leur retard dans le domaine de défense ont décidé d'augmenter de façon substantielle leurs budgets militaires. A la suite de cette crise, l'Allemagne a décidé d'allouer 100 milliards $ à son armement ! Et le Maroc dans tout cela ? Le Maroc observe de façon très attentive ce qui se trame au delà de la Méditerranée. Face à cette crise majeure, le Maroc fait preuve de sagesse, de réalisme, en raison de sa politique de neutralité à l'égard des grandes puissances, mais également en raison de nos étroites relations économiques avec ces deux pays, comme cela est rappelé dans les tableaux ci-après et ci-contre.
Le Maroc, se doit d'abord de consolider ses relations avec les Etats-Unis, qui soutiennent sans ambiguïté la marocanité de notre Sahara. Avec la Chine, le Maroc doit renforcer sa coopération économique, afin de réaliser son autonomie, en particulier dans le domaine sanitaire et alimentaire, et en même temps dans le cadre des projets en commun dans l'Afrique. Dr Mohammed LANSARI Consultant international