Le géant chinois de la téléphonie Huawei a lancé jeudi 19 septembre 2019, à Munich (Allemagne) son nouveau smartphone haut de gamme, le premier à être affecté par les sanctions américaines et qui est donc privé des populaires applications de Google. Pour le Mate 30 et le Mate 30 pro, pas de moteur de recherche Google intégré, ni de YouTube, mais « Huawei Browse » et « Huawei Music video », ce qui en fait le premier téléphone haut de gamme « désaméricanisé » de la marque. Huawei, pris directement pour cible par les Etats-Unis sur fond de bras de fer commercial avec la Chine, a été inscrit en mai par Washington sur une liste noire. Les sociétés américaines de services et de composants ont désormais interdiction de commercer avec la firme chinoise, accusée par le président américain Donald Trump de velléités d'espionnage. « A cause de l'interdiction américaine sur certains téléphones, GMS (Google Mobile Services, une série d'applications développées par Google) ne peut pas être pré-installée et nous proposons HMS » (Huawei Mobile Service), une série d'applications développées par Huawei, a reconnu lors du lancement international de l'appareil Richard Yu, le patron de Huawei Consummer, la branche grand public du géant chinois. Le feuilleton techno-diplomatique prend un nouveau tour, alors que la firme de Shenzen (sud-est de la Chine) passe du statut de client de Google à celui de rival. Yu a ainsi annoncé un investissement de « plus d'un milliard de dollars » pour « aider les développeurs d'applications » mobiles et ainsi parer à la dépendance du grand public vis-à-vis des services du géant américain. Car sans la certification Google et surtout le précieux « Play Store » de la firme américaine, et l'impossibilité pour l'utilisateur de télécharger ses applications favorites comme il le ferait sur un Samsung, le smartphone chinois pourrait s'avérer quasi inutilisable. Les distributeurs, notamment en France, hésiteraient donc à le proposer à leurs clients, de peur de se le voir retourner après quelques heures, rapporte la presse spécialisée. En attendant, Huawei propose sur le Mate 30 une version de son propre magasin « Huawei App Gallery » doté de « 45.000 applications ». Si la guerre commerciale devait s'enliser, Huawei compte développer un écosystème technologique lui assurant une totale souveraineté en ce qui concerne ses logiciels d'exploitations (OS), y compris les magasins d'applications, sur lesquels règnent sans partage Google et Apple. La firme de Shenzen a présenté en début de mois HarmonyOS, son propre système d'exploitation susceptible de remplacer Android sur ses appareils, mais qui n'équipera pas encore le Mate 30. Faute d'un système 100% chinois rapidement au point et capable de séduire rapidement des utilisateurs en dehors du continent asiatique, le président du directoire tournant de Huawei, Eric Xu, pousse aussi pour une alternative européenne à l'Android de Google et l'iOS d'Apple. « Si l'Europe avait son propre écosystème pour les terminaux intelligents, Huawei l'utiliserait… Cela résoudrait le problème de la dépendance numérique européenne », a affirmé le dirigeant dans un entretien au quotidien allemand Handelsblatt, se disant prêt à investir pour de tels projets sino-européens. Côté technique, le nouvel appareil de Huawei offre une autonomie de 9,2 heures en usage continu sous 5G, un quadruple module photo, et sera proposé en six coloris, dont un cuir vegan et waterproof. La série Mate sera disponible en magasin le mois prochain.