Le 1er indice sur l'impact d'internet vient de tomber. Il place le Maroc en 50e position sur 61 pays. Un constat confirmé par le cabinet McKinsey qui nous précise que la contribution d'internet au PIB national est de 0,9 % alors que sur les 5 dernières années, la contribution moyenne d'internet à la croissance du PIB au sein des pays émergents a été de 2,3 %. Mauvaise nouvelle pour le Maroc. Alors qu'on ne cesse de se féliciter du développement d'internet dans notre pays, voici que le premier Web Index de la World Wide Web Foundation, présidée par John Berners-Lee, fondateur du Web, tombe comme un couperet pour le royaume. L'indice web a classé le Maroc 50ème sur 61 pays étudiés. L'index qui mesure la croissance du web dans le monde, son utilité et surtout son impact sur l'économie et la société du pays analysé, a mis le Maroc dans une sale posture en comparaison à certains pays comparables. Au niveau continental, c'est la Tunisie qui remporte la palme d'or en se classant 1ère en Afrique, devançant ainsi de très loin le Maroc qui se classe 10ème en Afrique. La Tunisie est classée, quant à elle 30ème sur l'index global avec un score de 50,68 sur 100. Le score du Maroc est de 19,39. Il est devancé par l'Ouganda qui est classé 49ème ou encore le Khazakhstan (28e). Le Maroc réussit à devancer la Tanzanie d'un seul point et le Cameroun de 2 points. Au niveau mondial, la Suède arrive en tête avec un indice de 100 sur 100, derrière les Etats-Unis (97,31) et le Royaume-Uni (93,83). La dernière place revient au Yémen avec un score de 0. Une utilisation d'internet limitée au Maroc « La Tunisie a perdu des points ces 5 dernières années par rapport à l'infrastructure et les technologies utilisées pour internet. Cependant, elle a gagné des points en termes d'accès et de contenu internet. En 2007, les utilisateurs d'internet avoisinaient les 17 % de la population tunisienne. Aujourd'hui, ce taux a augmenté à 39 %. Par ailleurs, le Kenya se place premier dans le continent pour l'impact économique d'internet alors que le Maroc occupe la 2e position pour l'utilisation d'internet », lit-on dans le rapport sur la partie réservée à l'Afrique. Toutefois, même si le Maroc occupe cette 2e position pour l'utilisation d'internet, il se place loin, très loin de ses principaux pays voisins pour ce qui est de l'impact d'internet sur la société et l'économie du pays. Car l'utilisation d'internet au Maroc est très limitée. Selon une enquête réalisée par l'ANRT (Agence nationale de réglementation des télécommunications) en 2011, les internautes ont un usage accru des réseaux sociaux (83 % des interviewés) et de la messagerie instantanée (81 %). « Mis à part les sites de recherches, de streaming ou de réseaux sociaux, les Marocains n'utilisent pas internet d'une façon intelligente ou optimale. La preuve est le classement dernier de Facebook qui a placé le Maroc, le premier dans la région en termes de membres très actifs sur le réseau social. De plus, en 2011, par exemple, seulement 4 % des internautes ont acheté en ligne. C'est très bas et très en deçà de ce qui se passe ailleurs », se désole un consultant en IT. Un rapport accablant D'ailleurs, un récent rapport du cabinet Mckinsey sur l'impact économique de l'internet au Maroc a relevé plusieurs avancées notables sur ce point mais a mis le doigt sur certains retards notamment ceux relatifs au e-commerce. Joint par le Soir échos, la branche marocaine du cabinet nous a déclaré, « Bien que le commerce électronique est à ses balbutiements au Maroc, le commerce de détail en ligne se développe au fur et à mesure des progrès accomplis dans les systèmes de paiement. Alors qu'il ne pouvait se prévaloir que de rares transactions en ligne en 2008, le Maroc a aujourd'hui ses propres versions de sites d'enchères en ligne et d'achats groupés. Certaines entreprises traditionnelles, comme Royal Air Maroc, commencent également à développer des circuits de vente en ligne », toutefois, le cabinet rajoute, « Le score du Maroc sur l'indice du e-commerce développé par McKinsey est faible comparé à celui des économies les plus matures mais il est élevé comparativement aux pays du continent africain ». Internet contribue de 0,9 % au PIB national Par rapport aux données chiffrées de cette contribution d'internet à l'économie du pays, le cabinet nous explique, « Le taux de contribution d'Internet au PIB marocain est évalué à 0,9 %. Près des deux tiers de cet impact économique proviennent de la consommation privée tirée par la croissance rapide des recettes issues de l'Internet mobile et des voyages en ligne. Au total, cela représente près de 500 millions de dollars en 2010. Cet impact pourrait être considérable si le Maroc atteint les degrés d'accès et d'utilisation des pays matures ou des pays émergents plus avancés. C'est ainsi qu'Internet contribue à hauteur de 1,9 % du PIB dans les pays émergents étudiés, soit 2 fois les niveaux observés au Maroc ». Comme confirmé par notre consultant, le cabinet Mc Kinsey juge que l'utilisation fait encore défaut au Maroc. Quand le contenu fait défaut En parallèle de cette faible utilisation, le contenu web est également mal exploité au Maroc, que ce soit par le secteur privé ou par le secteur public. « Le contenu web est très en deçà des ambitions gouvernementales du pays. Même si le programme e-gov a réalisé plusieurs avancées, il existe encore plusieurs défaillances notamment par rapport au déphasage entre les services proposés sur internet et leur application sur le terrain. Certains sites de ministères et d'administrations publiques affichent encore des informations qui datent d'une décennie. Ils ne sont même pas actualisés. », regrette le consultant interrogé par le Soir échos. Les indicateurs pris en compte par le Web Index Ce dernier nous rappelle que si le Maroc s'est placé en 50ème position, c'est aussi à cause des indicateurs et des critères pris en compte dans le cadre de l'indice. « Pour l'impact économique, l'index prend en considération la législation du pays, la confiance numérique, le e-business ou également l'utilisation du web par les agriculteurs (les prix des matières premières et leurs cours à l'international, les conditions climatiques, les fertilisants et pesticides proposées et les normes en vigueur). Par ailleurs, pour l'impact social, l'utilisation d'internet dans le secteur de la santé, l'enseignement, l'éducation, la formation des professeurs sur internet sont également pris en considération ainsi que l'impact des programmes e-gov sur le bien-être de la population ». Ces critères s'ajoutent au niveau d'investissement dans les infrastructures de télécommunications, le taux d'électrification, le taux d'équipement des ménages et entreprises en ordinateurs et internet haut débit, le nombre de cartes à puce actives pour les mobiles, la censure politique, la formation des ingénieurs spécialisés dans le web, la liberté de la presse, le monopole de l'Etat ou de certains opérateurs de quelques services sur le web… Autant d'indicateurs qui devraient favoriser ou non le développement d'internet et son impact sur la société du pays étudié. Or, le Maroc peut avoir un taux de pénétration du mobile de 115% et une population de plus en plus connectée, mais si le contenu et l'usage ne vont pas de pair, à quoi bon va servir cette avancée chiffrée qu'on ne cesse de brandir et crier sur tous les toits. La question à se poser est si internet au Maroc a un réel impact sur la société marocaine et la compétitivité de ses entreprises. Au jour d'aujourd'hui, cet objectif n'est pas encore atteint…. L'avis de Mckinsey Comment booster l'activité e-commerce ? C'est à cette question que le cabinet McKinsey nous a répondus. En voici ses principales propositions. « Il existe des solutions concrètes pour lever les freins au e-commerce. La première d'entre elles réside incontestablement dans le fait d'améliorer l'écosystème de paiement en ligne du pays, en encourageant les consommateurs à détenir leurs propres cartes de paiement (ex. cartes de débit ou de crédit) et en sécurisant les transactions en ligne. En effet, le taux de détention de cartes de débit et de crédit au Maroc, bien qu'il ait augmenté de 25% par an de 2005 à 2010, demeure relativement faible. Au-delà du taux de pénétration des cartes de paiement, des initiatives telles que l'introduction d'une plate-forme de paiement en ligne sécurisée par le Centre Monétique Interbancaire (CMI) aident à généraliser les paiements en ligne, et à renforcer la confiance des internautes dans les systèmes de paiement en ligne ». * Tweet * *