Un «Mouvement pour une gauche unifiée». Loin d'être une chimère, l'idée prend forme. Lentement, mais sûrement. La gauche non gouvernementale, initiatrice de ce mouvement, semble avoir trouvé sa voie. Elle snobe les maroquins et se mobilise pour le respect des droits économiques et sociaux. Tout un programme. Début avril, une série d'espaces de débat seront de nouveau ouverts à travers le pays. «Nous sommes en face d'un mouvement lent, mais porteur d'un nouvel espoir et d'une nouvelle culture du gauche», fait noter Kamal Lahbib, dirigeant du PSU et l'un des initiateurs, il y a deux années, de l'Appel de Bouznika pour la recomposition et l'unification de la gauche. C'était en 2008, en marge de l'Université de la gauche organisée par le courant «initiative démocratique» du PSU. Deux ans plus tard et en marge d'une rencontre, également à Bouznika, du Forum social maghrébin, l'appel a été réitéré de nouveaux le 6 mars. Entre les deux appels, il y'eut beaucoup de réunions, de rencontres et de débats à travers plusieurs villes, Agadir, Tétouan, Fès ou encore Rabat et Marrakech. De ces rencontres, les militants de bases «des gens qui ne votent pas, qui ne font pas partie des instances dirigeantes ni d'aucun parti politique, mais qui sont au cœur de l'action politique», pour reprendre les termes de Lahbib Kamal, sont sortis avec une conclusion : La nécessite de maintenir cette dynamique et d'élargir le débat. L'objectif étant, d'abord, de défendre les droits économiques et sociaux des citoyens. Il sera question ensuite de tenter une recomposition de la gauche et enfin faire le bilan de la transition et de l'alternance consensuelle initiée il y a 12 ans. «Il s'agit de faire le bilan de toutes les étapes de cette expérience, en toute transparence», explique notre interlocuteur. Quid des grands partis qui ont participé à cette expérience ? «L'USFP et le PPS se contentent de nous observer pour le moment», Kamal Lahbib. Il dit, toutefois, espérer que ces formations ne voient pas en ce mouvement un rival mais un élément pouvant contribuer à la redynamisation du socialisme marocain. «Dans l'état actuel des choses, les deux partis ne feraient que nous tirer vers le bas. Ce sont des formations qui croulent sous le poids de la mode de gestion et d'organisation dépassé. Elle n'ont pas su faire de la politique autrement», observe notre interlocuteur. «De toutes les manières, assure-t-il, la course au pouvoir ou au leadership ne nous intéresse pas». C'est d'ailleurs pour cette même raison que les initiateurs du mouvement ont préféré s'adresser d'abord aux militants de base des partis. Sans aller plus loin. «Les parlementaires ne nous sont d'aucune utilité de par la nature des dernière élections et le faible taux de participation», explique notre source. Ce qui n'est pas le cas des élus locaux. Ces derniers ont d'ailleurs été approchés pour contribuer à ce débat et proposer des initiatives communes. Mais ce sont surtout les fameuses coordinations locales (les Tansikiate) que ce mouvement compte rallier à sa cause. «L'idéal serait de faire converger l'ensemble de ces mouvements de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale dans un même forum national», affirme notre interlocuteur. L'une des recommandations de l'appel du 6 mars a, justement, pour objet de créer un Forum national pour le débat et l'action de la gauche. Un espace où animateurs des Tansikiate, militants des partis de la gauche et gauchistes de tout bord trouverait un terrain d'entente et de concertation. Les initiateurs de l'appel entendent ainsi tirer profit de l'expérience, jusque-là réussie, des Forums sociaux. Mouvements parmi lesquels ils comptent également recruter ses adeptes. Tansikiate : Un mouvement toujours convoité Il en existe près d'une centaine. Chaque ville, chaque localité dispose de sa propre coordination contre la vie chère. Au fil du temps, ces Tansikiate sont devenues un véritable fer de lance des mouvements de protestation sociale. Association des droits de l'Homme, syndicats et, dans une moindre mesure, certains partis politiques, les convoient et tentent des les faire rallier à leur causes. Ces coordinations formées autour des militants des partis de la gauche radicale et certains syndicats, sont sollicitées à chaque sit-in et appelées à faire partie de chaque grève qu'à vue le pays ces dernières années. Sauf que selon le dernier rapport de l'Organisation Social Watch, la dynamique particulière, par le passé, de ces coordinations commence à s'essouffler. «Ces mouvements commencent à manifester de l'épuisement et des désaccords internes. Ils poursuivent peu d'actions de proximité face aux populations vulnérables et ils manquent de perspectives politiques». La réaction souvent violente des forces de l'ordre y est certainement pour beaucoup.