Cinq des neufs comportements de leadership sont plus observés chez les femmes. Or, il existe un fort lien entre leadership et performance organisationnelle. Pour tirer leur épingle de jeu, les entreprises sont désormais condamnées à diversifier les profils de leurs leaders. Une révélation de taille. Selon la dernière étude «Women Matter 2» du cabinet McKinsey, dans les prochaines années le leadership dans les organisations changerait de visage et serait essentiellement féminin. Fin 2008 déjà, la première version de l'étude Women Matter faisait cette annonce surprenante : «les entreprises ayant un comité de direction mixte, auraient mieux géré et résisté à la crise économique que celles qui n'ont pas de mixité dans leur top management». En fait, selon McKinsey, ces entreprises dirigées de façon mixte, réalisent tout simplement un score moyen de performance organisationnelle meilleur par rapport aux autres. Mais l'écart de performance devient sensible à partir d'une masse critique d'au moins trois femmes sur une moyenne de dix hommes dans les instances de décision. S'agissant de la future montée en puissance des femmes dans le leadership, le cabinet américain souligne qu'elle serait favorisée par deux éléments clés. Primo : Une majorité des dirigeants sondés dans le monde (au total 1.000) pensent que les grandes tendances mondiales (sociales, économiques ou environnementales) auront un impact sensible sur le développement de leurs entreprises dans les cinq prochaines années. Secundo : parmi les différents moyens dont les entreprises disposent pour appréhender efficacement ces évolutions, le leadership et la capacité des leaders à anticiper les opportunités mondiales constituent les leviers essentiels. Or, selon les conclusions de McKinsey face aux nouveaux enjeux mondiaux, les comportements de leadership plus souvent observés chez les femmes, améliorent plus la performance organisationnelle dans les entreprises sur plusieurs dimensions. Femmes et leadership En répartissant les neufs comportements de leadership qui renforcent la performance organisationnelle, le cabinet américain a abouti à la conclusion selon laquelle, cinq d'entre eux sont le plus fréquemment pratiqués par les femmes. Les neufs comportements de leadership sont : la prise de décision participative, l'exemplarité, l'inspiration, les attentes et la reconnaissance, le développement des autres, la communication efficace, la prise de décision individuelle, le contrôle et les actions correctives et la stimulation intellectuelle. De toutes ces qualités qui font le leadership, celles que les hommes pratiquent le plus souvent mieux que les femmes sont : la prise de décision individuelle, le contrôle et les actions correctives. Sur la liste, il y a cependant deux comportements où il n'y a pas de différence notoire de pratique entre les femmes et les hommes. Il s'agit de la stimulation intellectuelle et de la communication efficace. Contribution des comportements à la performance organisationnelle S'agissant de la performance organisationnelle, selon les analystes, les entreprises performantes ont plusieurs caractéristiques communes. La première est celle d'avoir une vision claire, elles définissent un cap à suivre, déterminant la façon de l'atteindre et de rassembler les équipes autour de cette vision. Elles se distinguent aussi par leur capacité à définir les relations de reporting (responsabilité) et à évaluer la performance individuelle afin de responsabiliser leurs équipes sur les résultats (coordinations et contrôle), mais aussi par leur capacité à être en relation constante avec les clients, les fournisseurs et les autres partenaires (ouverture sur l'extérieur). Toujours en matière de caractéristiques communes, on retrouve chez les dirigeants des entreprises performantes, une propension plus élevée à rechercher des talents nécessaires pour soutenir leur stratégie (compétences), à inciter leurs équipes à être performantes et à le rester (motivation), à promouvoir la qualité des interactions et une vision commune du projet d'entreprise (valeurs-management d'équipe) et à créer un flux d'idées et de changements pour que l'entreprise s'adapte (innovation). En se basant sur ces éléments, les analystes ont pu déceler l'existence d'une corrélation forte entre les comportements de leadership et les leviers sur lesquels repose la performance organisationnelle. Ainsi, en pratiquant plus que les hommes les comportements leadership «développement des autres», « attentes et reconnaissance» et « exemplarité», les femmes contribuent plus souvent au renforcement de la dimension «Valeurs-management d'équipe» et «Responsabilité» de la performance organisationnelle. Les hommes quant à eux démontrant plus fréquemment que les femmes les comportements de «contrôle et actions correctives» et «prise de décision individuelle», vont favoriser les dimensions «coordinations et contrôle» et «ouverture sur l'extérieur». Toutefois de ces nouvelles tendances, le plus grand enseignement à tirer, selon McKinsey est que : inévitablement, la performance organisationnelle se nourrit désormais de la diversité des comportements. De ce fait, au delà de la mixité dans les fonctions de direction, les entreprises ont donc intérêt à élargir la palette de comportements de leurs leaders pour renforcer l'ensemble des dimensions de la performance organisationnelle. A saisir Interview avec Malgorzata Saadani, Coach international certifié ICC, ANC Communications : "Les femmes représentent bien souvent le visage humain du management" Les Echos quotidien : Un récent rapport de McKinsey souligne que les comportements de leadership dans les organisations s'observent de plus en plus chez les femmes. Qu'en pensez-vous ? Malgorzata Saadani : Je ne pense pas qu'on puisse attribuer les caractéristiques du leadership particulièrement aux femmes. Mais il est vrai que de manière générale les femmes sont mieux communicantes que les hommes du fait qu'elles ont plus besoin d'échanger, de parler (parfois trop). Ce comportement rejoint en quelque sorte la dimension humaine aujourd'hui tant recherchée dans les organisations, car le facteur interpersonnel commence à s'imposer. Il se trouve donc que bien souvent les femmes arrivent à représenter ce visage humain du management. Toutefois, je crois foncièrement que le vrai secret se trouve dans l'équilibre entre la manière de penser et d'agir masculine et celle féminine, c'est-à-dire dans la mixité. À quoi reconnaît-on aujourd'hui un leader ? On reconnaît un leader par sa stature de chef d'orchestre. C'est quelqu'un qui apparaît au moment où il faut, donne les consignes qu'il faut et même s'il est absent, les choses fonctionnent comme s'il était présent. S'agissant des qualités, le leader est quelqu'un qui connaît bien son métier, il a la capacité de trouver des solutions, il est à l'écoute et a de l'humilité. Il a bien évidemment de la confiance en soi et incarne un certain pouvoir, ces traits le rendent très courtois et équitable dans le traitement des personnes. En fait, de façon unanime on admet qu'un leader c'est avant tout un fédérateur, qui insuffle une dynamique et entraîne les autres avec lui. Y a-t-il un lien entre leadership et position hiérarchique, dans une entreprise par exemple ? Normalement, cela doit aller de pair. Toutefois, cette normalité peut être bouleversée lorsqu'on est dans une organisation où existent des ascensions inexpliquées (effet de parachutisme, par exemple). Mais là aussi, si ce «parachuté» est une personne qui a suffisamment de sagesse, il est possible qu'elle sache convaincre et fédérer les personnes qui travaillent avec elle. Par contre, si on parachute un jeune qui n'a pas assez de maturité et d'acquis personnels, cela peut causer un problème de leadership. Interview avec Mouhcine Ayouche, Fondateur Associé de bmh COACH : "Il ne faut pas confondre leader et chef ou dirigeant" Les Echos quotidien : Quelles sont les bénéfices pour une entreprise d'avoir à sa tête un manager «leader-charismatique»? Mouhcine Ayouche : Les leaders apportent entre autres une vision claire, qu'ils arrivent à partager, une cohésion des équipes toujours entretenue, un management par le sens et vers des caps bien définis, des succès collectifs dûment capitalisés, de l'évolution et du progrès pour l'élément humain. Ce sont donc là autant d'éléments qui font que les organisations deviennent performantes et pérennes. Y-a-t-il un lien entre leadership et statut social ou position hiérarchique? Il ne faut surtout pas confondre leader et chef ou dirigeant ou responsable (président, secrétaire général ...). Ces appellations portent sur des instances officielles avec des fonctions formellement définies par les statuts de chaque organisation concernée et dûment codifiés dans les organigrammes. Le leader est un meneur (to lead en anglais = conduire) et le leadership est plutôt dans le mouvement, le processus et non dans un statut ou un état quelconque. Le leadership ne se décrète pas et n'est pas forcément visible dans les organigrammes. Il faut aller le détecter dans les sociogrammes (ces organigrammes non formels que l'on trouve dans tout groupe humain organisé). Compte-t-on suffisamment de leaders charismatiques à la tête des entreprises marocaines, aujourd'hui? À moins d'une étude détaillée et approfondie des profils des dirigeants des entreprises marocaines, on ne peut répondre avec précision à cette question. Il n'en reste cependant pas moins que de nombreux grands managers émergent et développent des styles de management qui ont quelque succès. Le développement du leadership (l'acquisition des qualités de leader) requiert d'abord un travail sur soi en matière de représentation (à clarifier), de sentiment de superpuissance (à bannir), d'humilité (à développer) et de présence à l'autre (à enrichir). De ce fait, l'accompagnement coaching peut être une aide précieuse au développement du leadership.