Alors que les voix s'élèvent pour inciter le secteur privé à s'impliquer dans la gestion de la chose culturelle, l'association Casamémoire, elle... est arrivée à convaincre ses partenaires (pour la plupart des sociétés privées) de l'accompagner dans la réalisation de sa mission, celle de préserver le patrimoine architectural de la ville de Casablanca. Mardi soir, l'association et la Marocaine Vie (filiale du groupe Société Générale) ont dévoilé le premier guide des architectures du XXe siècle de la métropole. Un document inédit qui regroupe plusieurs bâtiments emblématiques de Casablanca construits entre 1910 et 1970. «En tant qu'entreprise citoyenne, nous avons tenu à soutenir ce projet d'éditer un guide architectural. En plus, notre filiale immobilière nous a encouragé à financer le projet», nous a précisé Jean Elia, administrateur directeur général de la Marocaine Vie. En effet, la société d'assurance a débloqué 200.000 DH pour éditer ce guide ainsi que pour financer les journées du patrimoine organisées, il y a deux semaines et qui ont, à l'instar de l'année dernière, réussi à drainer bon nombre de Casablancais et de touristes venus découvrir les «bijoux architecturaux» de la ville. Mosquées, églises et synagogues À travers les 130 pages de ce guide, réalisé dans le cadre du programme Mutual heritage (un programme mis en place par l'Union européenne), Casamémoire entend, d'une part, faire découvrir aux lecteurs, notamment les jeunes, la richesse du patrimoine architectural de Casablanca mais aussi, les sensibiliser à l'importance de le sauvegarder. Ainsi, le guide est divisé en trois secteurs situés en plein centre ville, considéré comme un laboratoire architectural où «l'art-déco, le néo-marocain, le Bauhaus, le fonctionnaliste et autres styles brutalistes ont pu s'y développer avec une audace et sur une échelle incontestablement exceptionnelle dans le monde», expliquent les éditeurs. Une bonne partie du guide, a été consacré à l'ancienne médina, à sa célèbre Sqala, à ses mosquées, son église ou encore sa synagogue. Immeubles, villas, banques, cinémas (Liberté, Lynx, Opéra, Rialto), cités (Aïn Chock, Cosumar, Habous, El Hank, Hay Hassani...) font de ce guide un document riche. «Vous savez... aucun document n'offre une lecture didactique du patrimoine architectural de Casablanca, d'où notre initiative d'éditer ce guide», nous confie Abderraim Kassou, président de Casamémoire. Il faut dire que l'ouvrage qui comprend cinq cartes de repérage, offre des informations sur chaque bâtiment présenté (date de construction, nom de l'architecte, emplacement, style architectural...). Bref, il s'agit avant tout d'une mine d'informations qui contribuera, sans aucun doute, à mettre les projecteurs sur ces bâtisses qui font de Casablanca une ville pas comme les autres. «Il y a certainement des personnes qui ne vont pas être d'accord avec notre sélection. C'est par un choix subjectif que nous avons essayé de présenter des bâtiments et des villas en dehors de ceux que nous connaissons tous. Des cités comme Hay Mohammadi, Aïn Chock ou Hay Hassani figurent dans notre sélection... et puis, les gens qui ne sont pas d'accord avec nous, n'ont qu'à éditer un autre guide», ajoute Kassou. Edité à 2000 exemplaires en langue française, le guide des architectures du XXe siècle sera distribué gratuitement dans les écoles, collèges, lycées, universités, bibliothèques... le but étant de sensibiliser les jeunes et les moins jeunes à l'importance de cet héritage architectural. Plus résolus que jamais de continuer leur combat, les membres de Casamémoire sont en train en ce moment de chercher un montage financier pour les versions arabes et anglaises de ce guide. Par ailleurs, l'association qui œuvre depuis quelques années pour la sauvegarde du patrimoine casablancais s'apprête à éditer un beau livre sur l'histoire du quartier mythique de Hay Mohammadi. Il faut dire que Casamémoire aspire à organiser des activités tout au long de l'année avec un seul objectif : la sauvegarde de l'âme de Casablanca ! Un projet ambitieux Financé par l'Union européenne dans le cadre d'Euromed Heritage IV Program, Mutual Heritage vise à sauvegarder l'héritage patrimonial constitué entre les XIXe et XXe siècles dans la région méditerranéenne. Il vise, entre autres, à organiser des formations spécifiques, des ateliers et actions ponctuelles, ainsi que des journées d'action pour former les différents professionnels et pour sensibiliser les populations. Il vise aussi à la mise en forme d'une série de publications (dont l'exemple concret est la publication du guide sur Casablanca) relatives aux connaissances nouvelles et à la valorisation de cet héritage souvent méconnu. Par ailleurs, le consortium du projet est composé de Citeres (France), Casamémoire et ENA (Maroc), ASM Tunis (Tunisie) et Riwaq (Palestine) et compte favoriser l'intégration de ces vestiges récents dans la vie active des villes actuelles.