Vous l'avez certainement remarqué ces derniers temps, les prix du poulet ont nettement augmenté pour atteindre des niveaux inhabituels. Plusieurs facteurs ont contribué à cette hausse: mois de ramadan, période de consommation par excellence, notamment de viandes blanches, réceptions organisées à l'occasion du retour de Al Omra...mais le facteur le plus déterminant est sans conteste celui des célébrations de mariages. «La hausse des prix est tout à fait normale en ce moment de l'année. C'est la saison des fêtes de mariages qui se traduit par une forte demande de poulet. Cela dit, en comparaison avec la même période de l'année dernière, les prix sont plutôt en baisse. Mieux encore, les niveaux de prix ont même baissé depuis la fin de ramadan. On était à 16,50 DH le kilo (prix à la ferme) durant et après le mois de ramadan, maintenant ça a baissé à 15 DH», explique Chawki Jirari, directeur générale de la Fédération interprofessionnelle du secteur avicole (FISA). Les changements de tendance dans les fermes font changer la donne dans les marchés. Ainsi, dans les abattoirs traditionnels des quartiers populaires, le prix du kilo se négocie entre 18 et 20 DH. Il faut évidemment y ajouter le prix de l'abattage et du plumage, ce qui fait que le kilo revient plus cher. Néanmoins, «les prix restent assez corrects en prenant en compte la loi de l'offre et de la demande», indique ce vendeur de volaille, d'autant plus que «la hausse des prix durant cette période compense les pertes des producteurs accusées tout au long de l'année», renchérit le directeur général de la FISA. Correction À en croire les professionnels, les hausses sporadiques des prix, aussi conséquentes soit-elles, ne se traduisent pas forcément par des gains pour les producteurs. Pis, «les producteurs vendent à perte. Les marges de bénéfices se sont détériorées ces dernières années, d'où le fait que la majorité des producteurs ne s'en sortent pas. La machine continue à tourner à crédit, et plusieurs producteurs sont à deux doigts de mettre la clé sous le paillasson», tonne Chawki Jirari. Les estimations de la FISA font ressortir un rapport prix de vente/coût de revient inférieur à 1 pour la production de poulet, même s'il s'est amélioré en passant de 0,93 en 2010 à 0,96 en 2012. Pour la production d'œufs, les professionnels parviennent tout juste à rentrer dans leurs frais. C'est dans la production de dinde que les producteurs arrivent à tirer leur épingle du jeu en dégageant une marge de près de 10%. «L'augmentation des prix de vente permet donc tout juste de faire face à l'augmentation des charges et de recouvrer une partie de la rentabilité», explique Chawki Jirari. Si le coût de revient demeure élevé, c'est parce que les intrants n'ont pas arrêté de grimper ces dernières années. En effet, les cours du maïs et tourteau de soja, principales composantes entrant dans l'alimentation de la volaille, ont enregistré des hausses considérables ces derniers temps, influant ainsi sur le prix du revient des producteurs. Les deux matières premières en question sont déterminantes et constituent, à elles seules, près de 90% de la formulation des aliments composés; le moindre changement des cours fait donc vaciller les marges des producteurs. «Les changements du marché international des matières premières sont entièrement supportés par les éleveurs, ce qui devient insupportable pour les producteurs»,poursuit le directeur général du FISA. Les professionnels proposent plusieurs mesures pour décharger les producteurs. Entre autres pistes présentées, la suspension momentanée de la perception du droit d'importation et de la TVA à l'importation, appliquée à toutes les matières premières entrant dans la composition des aliments composés, ainsi que la suppression de la perception de la TVA locale appliquée aux aliments composés. Autre mesure exigée, la réduction au taux minimum (2,5 %) du droit d'importation appliqué aux matières grasses protégées, au tourteau de soja, quelle que soit son origine, ainsi qu'à la graine de soja pour tous les utilisateurs. 30 MMDH de chiffre d'affaires En scrutant les indicateurs macroéconomiques du secteur, il en ressort que les professionnels s'en sortent plutôt bien. Ainsi, l'activité a généré en 2012 un chiffre d'affaires de 29,6 MMDH, soit 5% de plus qu'en 2011. Pourtant, la production de viandes de volailles a baissé avec 440.000 tonnes de poulet (-4% par rapport à 2011) et 70.000 tonnes de dinde (-13%). La production d'œufs de consommation est quant à elle restée stable: 4,3 milliards d'unités ont été produites par le secteur moderne et 80 millions par le secteur traditionnel. Enfin, la consommation nationale des produits avicoles a également reculé. En 2012, les Marocains ont consommé 16,7 kg de viandes de volailles (-6%) et 152 œufs (-1%) par habitant. Conclusion, si le secteur a augmenté ses revenus en 2012, c'est uniquement grâce à une augmentation des prix de vente. Celui du poulet vif (prix à la ferme) a en effet pris 9% tout au long de l'année pour s'établir à 13,40 DH le kilo. Le prix moyen de vente de la dinde vive a pour sa part flambé, passant de 15,80 DH le kilo en 2011 à 17,90 DH en 2012. Quant aux œufs, leur prix moyen à la ferme a progressé de 22%.