Toyota et Suzuki ont anticipé ou répercuté la baisse des droits de douane entrée en vigueur en janvier. Gênés par l'appréciation du yen et du dollar par rapport au dirham, Kia et Honda n'ont plus de marge de manoeuvre pour une nouvelle baisse des prix. La baisse des droits de douane sur les importations de voitures continue d'alimenter les débats. Depuis le démantèlement des droits avec l'Union européenne à compter du mois de mars courant et la baisse conséquente des tarifs douaniers sur les véhicules introduits d'Asie en janvier dernier, une question se pose avec insistance : ces réaménagements ont-ils bénéficié au consommateur ? Autrement dit, est-ce que les concessionnaires automobiles les ont répercutés sur le prix de vente ? La question touche beaucoup plus les voitures asiatiques que celles fabriquées en Europe. En effet, l'importation de ces dernières a subi, dans le cadre de la dernière étape du processus de démantèlement entrant dans l'accord d'association entre le Maroc et l'UE, un changement tarifaire peu conséquent, les droits de douane ayant déjà été à un niveau très bas : entre 2% et 2,7% en moyenne selon la puissance des motorisations. Le taux appliqué à l'importation des voitures asiatiques est, quant à lui, passé de 25% à 17,5%. L'écart entre les taux en fonction de l'origine géographique reste quand même colossal et est qualifié d'«injuste» par les concessionnaires de marques non européennes. Il n'empêche que les consommateurs voient dans une baisse des droits de douane de 7,5% une éventuelle réduction des prix de vente. Les concessionnaires de voitures européennes accusés de renforcer leurs marges La réaction diverge d'un opérateur à un autre. Certains n'ont pas hésité à revoir à la baisse leurs prix de vente dès l'entrée en vigueur des nouveaux tarifs douaniers. Il en est ainsi de Toyota qui a saisi l'occasion pour lancer une campagne publicitaire axée sur les réductions consenties au client. «On a diminué les prix de pratiquement tous nos produits d'une moyenne de 5 à 6% depuis le premier jour de l'application des nouveaux droits de douane», affirme Adil Bennani, PDG de Toyota Maroc. Une autre marque nippone, en l'occurrence Suzuki, a aussi réduit par anticipation ses prix, «de 5 à 10% depuis le deuxième semestre de l'année dernière», signale son DG, Ryad Mezzour. Les concessionnaires des marques non européennes précisent tout de même que le passage des droits de douane de 25% à 17,5% n'est pas synonyme d'une réduction automatique de 7%. «Il y a plusieurs paramètres qui entrent dans le calcul des droits de douane qui font que la baisse effective est de seulement 5 à 5,5% qu'on a répercutée totalement et dans toute transparence sur nos prix de vente», nuance M. Bennani. L'évocation de la transparence renvoie subrepticement à un reproche fait aux concessionnaires de marques européennes. «Pendant les dix dernières années où le démantèlement des tarifs douaniers a porté sur 32%, les prix de vente des marques européennes n'ont pas subi de grands changements, c'est dire que ces concessionnaires ont préféré plutôt renforcer leur marge bénéficiaire, ou dans les meilleurs des cas, augmenter leur budget de communication», reproche un responsable d'une marque asiatique. Du coup, l'écart de la marge entre les professionnels d'une même activité commerciale ne cesse d'augmenter. «Il se situe actuellement entre 14 et 15 points, ce qui est inadmissible», déplore M. Mezzour. Le fossé s'est creusé d'autant que pas mal de concessionnaires de marques non européennes ont concédé, ces dernières années, d'importantes baisses des prix. C'est principalement pour cette raison que certains d'entre eux affirment ne pas en faire davantage, notamment «en raison de l'appréciation de 20% de la valeur du yen durant ces derniers mois», souligne Mehdi Tak-Tak, DG délégué d'Univers Motors. Les concessionnaires de voitures asiatiques peuvent se rattraper sur leurs modèles fabriqués en Europe L'importateur exclusif de la marque Honda, qui paie une grande partie de ses acquisitions en monnaie nippone, n'est pas le seul à subir les aléas du marché des changes. Kia Maroc, qui règle son fournisseur sud-coréen en dollars, a été affecté par le même problème. «Avec la dépréciation du dirham par rapport à la monnaie américaine, il n'est pas question de diminuer les prix de vente car après une série de promotions consenties depuis trois ans nous n'avons plus de marge de manœuvre», explique Hatim Kaghat, directeur de la communication de Kia Maroc. Les changements au niveau des droits de douane permettront ainsi «non pas de rétablir la situation mais de seulement limiter la casse», ajoute-t-il. Pourtant, qu'ils consentent ou non de nouvelles baisses des prix au profit de leurs clients, ces professionnels ont bien la possibilité, par ailleurs, de limiter le recul de leur marge par rapport aux concessionnaires de voitures européennes. Une partie non négligeable de leurs produits est importée de l'Union européenne. La plupart des constructeurs de marques asiatiques y disposent d'unités de production. Ainsi, près de 40% des approvisionnements de Toyota Maroc et de Honda Maroc et 4 à 5% de ceux de Kia et de Hyundai proviennent du Vieux Continent et paient donc des droits de douane à 0%.