Bouteflika nomme Bedjaoui ministre des Affaires étrangères Le nouveau chef de la diplomatie algérienne, Mohamed Bedjaoui, est loin d'être un inconnu de la classe politique marocaine. Autant il est l'un des fidèles du président Bouteflika, autant il était parmi les principaux artisans de la politique anti-marocaine de l'Algérie Boumédienniste. Pis, Il était surtout l'un des outils de la politique de sape et d'obstruction menée trente ans durant, contre les revendications légitimes marocaines sur les provinces sahariennes. Portrait. " Frère siamois", ainsi présentait le défunt Colonel- président de la République algérienne Houari Boumédienne, son complice, confident et ministre des Affaires étrangères Abdelaziz Bouteflika tout au long des 14 années qu'il avait passées à la tête de l'Algérie entre le coup d'Etat de 1965 et sa disparition subite en 1979. Abdelaziz Bouteflika, était en effet ce "Frère siamois" que le défunt président avait connu dès le déclenchement de la révolution armée pour la libération de l'Algérie au beau milieu des années cinquante. Il fut notamment l'un des principaux animateurs du célèbre "groupe d'Oujda" et surtout l'homme des missions difficiles auquel Boumédienne donnait carte blanche pour négocier, en son nom, avec tous les chefs d'Etat du monde, notamment avec le Roi du Maroc. D'ailleurs, feu Hassan II avait constamment usé de cette formule pour rappeler que s'agissant du Maroc, que ce soit le président Boumèdienne ou son ministre des A.E Abdelaziz Bouteflika, c'était finalement du blanc bonnet et bonnet blanc. Un autre "frère siamois" de Bouteflika Force est de constater qu'à la lecture des personnalités qui viennent tout juste d'intégrer le gouvernement algérien dans le cadre du dernier remaniement ministériel purement "technique", que celui – ci a connu samedi 30 avril dernier, que Bouteflika a finalement opté pour un nouveau "frère siamois"pour s'occuper du portefeuille hautement sensible des Affaires étrangères. Tous les organes de presse, notamment à Alger, qui ont fait état de l'arrivée de cet homme à la tête de la diplomatie algérienne en remplacement de Abdelaziz Belkhadem, n'ont pas manqué de souligner le fait que le nouveau ministre des A.E "est d'abord un fidèle parmi les fidèles du président de la République". De la cour de la Haye au siège de l'ONU à New York Pour nous autres Marocains qui pratiquons la diplomatie algérienne depuis plus de quatre décennies, Mohamed Bejaoui est loin d'être un inconnu. Ne serait-ce que parce que c'est l'une des figures de proue de la classe politique algérienne ayant farouchement combattu ce qu'il a toujours qualifié de "prétentions expansionnistes" du voisin marocain sur le “Sahara occidental”. Dès 1974, il se mettra en évidence à l'occasion des longues auditions qui eurent lieu à la cour Internationale de Justice (CIJ) de La Haye. Représentant l'Etat algérien à l'occasion de ces assises, Bedjaoui a toujours su trouver les mots qu'il fallait pour tourner en dérision les arguments marocains attestant, preuves à l'appui, que le Sahara était loin d'être une "terra Nihilus" lorsque les Espagnols s'y sont installés au milieu du 19ème siècle ( 1836) et que les populations de l'ex - Sahara espagnol avaient bel et bien des liens d'allégeances écrites avec les Rois du Maroc depuis les temps les plus reculés. Mohamed Bedjaoui, y opposera et avec force, l'argument algérien qui prétendait que " le Maroc n'était ni plus ni moins qu'une Dar (Maison) de l'Islam et qu'il était normal, selon lui, à ce que tout musulman vienne s'y réfugier. " L'homme qui arracha la clause du référendum Et c'est en grande partie grâce à la très forte pression de la partie algérienne que Bedjaoui représentait, que la CIJ, tout en attestant l'existence de liens incontestables d'allégeances entre Souverains marocains et populations du Sahara, introduit finalement une deuxième clause appelant à la consultation des populations, dans le cadre de ce qu'on appellera depuis lors, le référendum d'autodétermination des populations (peuple pour l'Algérie) sous l'égide des Nations Unies. Tout au long des trente années que dure le conflit du Sahara, Mohamed Bedjaoui, assumera régulièrement la politique de son pays sur ce dossier. Il le fera aussi bien en tant que représentant de l'Algérie à l'ONU ou encore en tant qu'ambassadeur de son pays auprès des principales capitales mondiales, notamment à Paris et Washington. Les connaisseurs et spécialistes de la politique algérienne, savent en tout cas, que le poste que Bouteflika a assuré avec brio depuis la proclamation de l'indépendance de son pays, ne pouvait revenir qu'à l'un de ses fidèles.Autrement dit, l'homme de confiance qui soit en mesure d'en assurer la continuité et le rayonnement. Que ce soit Mohamed Bedjaoui que le Président Bouteflika a finalement choisi pour mener la conduite de la diplomatie à l'aube de son deuxième mandat présidentiel, nombre d'observateurs y voient la preuve tangible du souci du président de revigorer une diplomatie qui n'a cessé de battre de l'aile tout au long de la dernière décennie. Ces nnées 90 marquées par la guerre civile et la lutte anti-terroriste qui s'en est résultée depuis 1992. Que nous prépare le tandem Bouteflika –Bedjaoui ? Dans ce nouveau redéploiement que le président de la République algérienne semble vouloir donner à son arme diplomatique, il est de notoriété publique que les relations avec le Maroc tiendront une place de tout premier ordre. Non seulement en raison du dégel apparent que les rapports entre les deux pays semblent connaître depuis quelques semaines avec le sommet Bouteflika- Mohammed VI, mais le plus important reste bien évidemment le déblocage annoncé et tant attendu du contentieux maroco – algérien sur l'avenir du Sahara. Cela étant, on ne peut que s'étonner du fait que la désignation de cet ultra pur et dur de la politique anti marocaine de l'Algérie, n'ait suscité aucune réaction significative au sein de la classe politique nationale, toutes tendances confondues. De même qu'on est en droit de se demander si le nouveau "frère siamois" du président algérien, connu pour ses qualités de négociateur et de manœuvrier politique particulièrement redoutable, n'est pas finalement en contradiction flagrante avec l'esprit de normalisation qui semble l'emporter depuis quelques temps entre les deux super grands du Maghreb Arabe. A moins que cette désignation ne soit perçue sous la forme du réalisme politique qui veut que ceux - là mêmes qui étaient les artisans de la rupture consommée depuis trente ans, (Bouteflika et Bedjaoui) soient, eux - mêmes, qui seraient appelés à devenir les initiateurs de l'ère des retrouvailles et de la réconciliation tant espérée. Dans un cas comme dans l'autre, on ne peut qu'afficher notre scepticisme face à ce que nous prépare cette diplomatie à géométrie variable dans le sens négatif du terme. Car si toute négociation et toute réconciliation implique forcement du réalisme, de la sagesse et des concessions réciproques, se montrer méfiant et constamment sur ses gardes, ne serait pas forcément un défaut de la part de la diplomatie marocaine.