J'avoue, à ma grande honte, être friand des “petites phrases” que lâchent les hommes politiques et dont je fais souvent, vous l'avez peut-être remarqué, mes choux gras. En voici, pour cette semaine, deux ou trois, prononcées par Abbas El Fassi, secrétaire général du parti de l'Istiqlal et ministre d'Etat… sans portefeuille, lors d'un récent dîner-débat, tenu à Rabat. Il a dit, à propos de cette dernière fonction : “elle a été comprise par les bases du parti comme un hommage rendu à l'Istiqlal à travers la personne de son secrétaire général”. Je veux bien moi, mais seulement lorsque l'hommage est mérité et vient récompenser une action d'éclat, une initiative politique d'envergure. Mais j'ai beau chercher, je ne trouve nulle justification particulière à la nomination en qualité de ministre d'Etat de Abbas El Fassi. Qu'a-t-il fait de plus ou de mieux que ses confrères “zaïm” des autres formations qui participent au gouvernement Jettou ? Et pourquoi pas des “promotions” analogues pour Ahmed Osman, Mahjoubi Aherdane ou Ismaïl Alaoui ? Apparemment, aucun d'entre eux n'a revendiqué cet honneur et que seul El Fassi a tenu à en être ceint… Il a dit aussi, le sémillant ministre d'Etat : “un ministre d'Etat sans portefeuille a toutes les compétences et n'en possède aucune”. Voilà qui est parlé pour ne rien dire, “des paroles verbales” comme on dit au “Canard enchaîné”. La seule question qui vaille étant celle-ci : que fait Abbas El Fassi au gouvernement ? A quoi sert-il ? A quoi est-il utile ? A voir les autres ministres qui ne sont pas d'Etat mais ont heureusement un portefeuille bien à eux, s'activer, prendre des initiatives et des décisions dans les sections qu'ils contrôlent, on est tenté de répondre : un ministre d'Etat sans portefeuille, ça ne sert à rien, c'est inutile. Il a dit enfin, le bon si Abbas «qu'un ministre d'Etat sans portefeuille dispose de tout le temps voulu pour réfléchir et faire des propositions». A croire que les autres ministres agissent sans réfléchir et dans la précipitation. En d'autres termes, c'est le sage parmi les fous. Abbas El Fassi dispose donc de tout son temps et il semble en profiter énormément. A quoi le passe-t-il ? Pour regrettable que cela soit, il le passe à régler ses petits comptes avec l'USFP le frère ennemi et plus particulièrement avec Abderrahman Youssoufi, l'ancien patron de l'Alternance. “Ah ! Si Abderrahman Youssoufi était resté fidèle à la Koutla”, tout cela ne serait pas arrivé, soupire-t-il tout le temps. Bien vrai d'ailleurs. Et qui sait, aujourd'hui Abbas El Fassi serait peut-être Premier ministre par intérim. Mais la mauvaise volonté de Youssoufi a détruit ce beau rêve. Au lieu de quoi, le voici condamné à végéter. Un vrai “légume”, hélas !