Cinquante mille milliards de centimes. Quel fabuleux pactole, quel miraculeux “magot” ! Enorme, colossal, vertigineux. Quel ministre des finances ne pleurerait pas de joie de l'avoir à disposition ! Pensez donc à tout ce qu'il pourrait en faire. Plusieurs sécheresses vaincues, de l'emploi pour tout le monde, de l'habitat salubre à satiété, des barrages, des hôpitaux, des écoles, que sais-je ? En un mot, le bonheur pour tous et pour longtemps. Et savez-vous où est “caché” ce trésor grandiose ? Eh bien, tout simplement dans les poches ou sur les comptes bancaires des héros des scandales financiers qu'a connus le Maroc. Ceux du Crédit immobilier, du Crédit agricole, de la Caisse nationale de sécurité sociale, de la Banque populaire. Ça a beau n'être qu'une rumeur, cela donne quand même un ordre de grandeur. Ah ! ils n'y sont pas allés de main morte nos “truands en col blanc”. De mauvaises gestions en opérations irrégulières, voire illégales, de prêts indûment consentis, en “dons” purs et simples à des gens qui n'en avaient nul besoin, ces créances perdues en détournements sans vergogne, de corruptions en enrichissements personnels criards, ils ont fondu, vol sinistre de charognards affamés sur la “bête” dépecée et à merci. L'opinion publique, naïve comme à son habitude, avait cru et croit encore que la justice allait mettre un terme aux scandales et sanctionner durement les coupables. On se remua bien un peu, du côté de la cour spéciale, on s'y remue toujours d'ailleurs, mais de procès publics, de débats judiciaires, point. Le secret est partout et les honnêtes gens parlent de justice à deux poids, deux mesures. De fait, si l'on condamne de-ci de-là, quelques lampistes, les barons, eux, ne sont pas inquiétés outre mesure. Et voilà qu'à présent, on en vient à l'idée d'abandonner toute poursuite judiciaire, à condition seulement que les voleurs veuillent bien accepter de rendre à l'Etat le produit de leur vol. Tout ou partie, selon leur “conscience”. On passera l'éponge sur le reste. Tout le monde sera content même le “pauvre” ministre des Finances qui versera quelques pleurs d'émotion en récupérant quelques milliards inattendus. Encore, faut-il les joindre tous, ces ex-patrons de banques qui ont grandement failli à leurs missions. Pour leur annoncer la bonne nouvelle : le butin contre l'impunité. Moulay Zine Zahidi (double Z pour les intimes), reste toujours introuvable. Est-il au Maroc, est-il en cavale ? Mystère. On ne lui connaissait pas ce grand talent de plonger dans la clandestinité. Et cela ternit quelque peu l'image de notre police réputée efficace et bien formée par ailleurs. A ce propos, il faut croire que le chantage paye. Double Z n'avait-il pas menacé d'aller plus avant dans son fameux “témoignage”. S'il le faisait, de très hautes personnalités seraient éclaboussées. Ce qui évidemment n'est pas du tout convenable…