L'avocat du journaliste Taoufik Bouachrine a donné, ce jeudi 21 février à Rabat, une conférence de presse pour appuyer une résolution du Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire (GTDA). Parue ce lundi 18 février, cette résolution du groupe constitué par le Conseil des droits de l'Homme des Nations unies (OHCHR) a relevé dans l'Affaire Bouachrine « des lacunes » dans le respect du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) ratifié par le Maroc. Tambour battant, Me Mohamed Ziane a tenu à exprimer ses intentions dans cette affaire secouant l'opinion publique depuis le 23 février 2018, jour d'arrestation du fondateur et directeur de publication du quotidien arabophone Akhbar Al Yaoum. Résolution du Groupe de travail de l'ONU sur la détention arbitraire et Code de procédure pénale marocain en main, l'avocat jure que la détention de son client est « arbitraire ». « On peut mettre fin à cette situation en libérant le détenu, ce qui ne veut pas dire qu'il est innocent, ou qu'il a cessé d'être coupable », déclare Mohamed Ziane au micro de Hespress FR. Mais il suggère que la justice continue à juger cette affaire, conformément au droit marocain, tout en garantissant au journaliste prévenu une liberté « qui lui permettra de mieux défendre ses intérêts ». Photos Mounir Mehimdate Pour une liberté conditionnelle Pour l'avocat, la liberté conditionnelle de Toufik Bouachrine est « une garantie pour tout le monde », y compris pour la partie plaignante. « En ayant un jugement qui ne sera pas frappé de nullité, car sans abus de procédure, les victimes auront plus de chances d'obtenir réparation du préjudice qu'elles prétendent avoir subi. Mais si elles l'obtiennent cette réparation dans des conditions contraires au droit et à la procédure légale, ce serait un jugement nul et elles n'auraient rien à gagner », argumente Me Ziane dans une déclaration à Hespress FR. Sur 14 pages, cette résolution affirme en effet que la poursuite du journaliste et le déroulement de son procès « ne peuvent être dissociés des opinions politiques et des articles qu'il écrit ». Le même document onusien souligne que la poursuite de Taoufik Bouachrine « n'a concerné que des affaires de droit public pour dissimuler l'atteinte à la liberté de la presse », ce qui, selon la résolution, « peut être prouvé par un certain nombre de procès antérieurs à celui de Boucherie, mentionnés dans un certain nombre de rapports internationaux ». D'autre part, Mohamed Ziane a sévèrement critiqué le ministère public, affirmant qu'« il n'était pas habilité à ordonner l'arrestation d'un accusé » et que « son pouvoir de le placer en prison s'annulait à la fin de la détention provisoire par la police ». L'avocat soutient plutôt que Bouachrine devait être déféré devant le juge d'instruction afin de permettre à la défense de contester sa décision s'il décidait de le mettre en prison. Un opposant makhzénien Photos Mounir Mehimdate De l'avis de son avocat le plus en vue, la défense de Taoufik Bouachrine demande, par conséquent, « non pas le respect des conventions internationales, mais l'application de la législation marocaine ». C'est du kif-kif selon Me Ziane, puisque le droit marocain a totalement assimilé le Pacte des droits civils et politiques. « Le Groupe de travail a bien noté que notre législation était au niveau des ambitions universelles en matière des droits de l'Homme. Il faut simplement les respecter et les pratiquer » relève-t-il. Hier mercredi, le ministre de la Justice Mohamed Aujjar a exprimé son « grand étonnement » suite à la publication de la résolution du GTDA. Et en guise de réplique, Me Ziane refuse que « le gouvernement donne des leçons en matière de droit international ». « Un travail sérieux mène au résultat à condition que le travail se poursuive jusqu'à sa fin », martèle l'avocat en ajoutant que la défense de Toufik Bouachrine « ne veut pas contester ni faire pression sur le pouvoir judiciaire, et ne vise autre chose que l'application de la loi ». Réfutant, d'autre part, toute surenchère en termes de patriotisme, l'ancien ministre des droits de l'Homme a tenu à se présenter comme un « monarchiste, makhzénien et croyant que l'avenir du Maroc est lié à la monarchie ». Photos Mounir Mehimdate