Le coordinateur du parti d'opposition en Algérie, le Mouvement Démocratique et Social (MDS), Fethi Ghares, a été condamné, dimanche, à deux ans de prison par un tribunal d'Alger. D'après le MDS, M. Ghares a été également condamné par le tribunal de Bainem (Alger) à verser une amende de 200.000 dinars (1 euro = 160 dinars). Le parquet avait requis trois ans de prison ferme assorti d'une amende de 100.000 DA à l'encontre de Fethi Ghares lors de son procès qui a eu lieu le 26 décembre dernier. Le coordinateur du MDS a été placé sous mandat de dépôt le 1er juillet dernier par le juge d'instruction du tribunal de Bainem (Alger). Arrêté la veille à son domicile à Gué de Constantine dans le sud d'Alger, M. Ghares est poursuivi pour "atteinte à la personne du président, outrage à corps constitué, diffusion au public des publications pouvant porter atteinte à l'intérêt national, diffusion d'informations pouvant porter atteinte à l'unité nationale, diffusion d'informations pouvant porter atteinte à l'ordre public". Cette énième condamnation du responsable d'un parti d'opposition en Algérie a soulevé l'ire de nombreux militants politiques, défenseurs des droits de l'Homme et de pans entiers de la société algérienne. Réagissant à la condamnation de son coordinateur, le MDS relève que ce verdict, par cette lourde peine contre un dirigeant de parti, sonne comme une détermination du pouvoir à installer l'Algérie dans le despotisme et à écraser toute voix opposante. Le MDS relève que cette condamnation ne vise pas seulement le MDS, mais elle a aussi comme objectif de "tétaniser le peuple algérien et ses forces vives qui restent attachés à leur combat émancipateur". Après avoir noté que ce verdict vient dans un contexte de répression sans précédent, il rappelle que l'Union pour le Changement et le Progrès (UCP), le Parti Socialiste des Travailleurs (PST) et l'association "Rassemblement Actions Jeunesse" (RAJ) sont menacés de dissolution et le Rassemblement pour la Culture et la Démocratie (RCD) est mis en garde sur ses les activités politiques à l'intérieur de son siège, dénonçant la vague d'arrestations (plus de 300 détenus politiques et d'opinion), de poursuites, de contrôles judiciaires et de détentions provisoires abusives qui s'abat sur le pays. Pour Mohcine Belabbas, président du RCD, il s'agit d'un "scandale politico-judiciaire". "La condamnation de Fethi Ghares à deux années de prison ferme va renforcer la défiance du peuple algérien envers la justice de notre pays", met-il en garde. Pour lui, "cette décision illustre l'instrumentalisation politique de la justice dont même les magistrats sont les victimes", considérant que la justice est "déjà largement malmenée par le placement de dizaines de citoyens innocents dans les geôles du pouvoir sans jugement à ce jour". Pour sa part, le Front des Forces Socialistes (FFS) déplore "une régression terrible du climat des libertés individuelles et collectives" en Algérie depuis quelque temps. Le FFS dénonce aussi le recours "méthodique" du pouvoir à "la criminalisation de l'action politique" dans le cadre d'une "stratégie autoritaire" qui s'exprime par "le harcèlement et les provocations sécuritaires et judiciaires à l'encontre des organisations politiques, associatives et syndicales", ainsi que les défenseurs des droits de l'Homme et les journalistes. Le FFS réitère son exigence de cesser "immédiatement" ces pratiques "répressives" et met en garde contre l'aggravation de la crise par "la poursuite de la répression et l'adoption de l'approche sécuritaire dans le traitement des affaires politiques et publiques". De son côté, Zoubida Assoul, présidente de l'UCP accuse le pouvoir politique de chercher à "casser l'opposition". "La condamnation de Fethi Ghares à deux ans de prison ferme est une preuve de l'instrumentalisation de la justice par le pouvoir politique pour casser l'opposition, mais aussi un signe de la fragilité du système en place", écrit-elle sur sa page facebook. "Fethi Gherras est un militant politique, président d'un parti politique légal. Sa place n'est pas en prison", a estimé pour sa part, Zoheir Rouis, vice-président de "Jil Jadid". "Sa condamnation n'est pas digne du combat pour les libertés et l'Etat de droit auquel on aspire", s'indigne-t-il.