L'annonce de la cession par le groupe Etisalat de six de ses filiales à Maroc Telecom relance le groupe marocain en le remettant dans la case «entreprise de croissance». Les analystes de CFG estiment qu'avec cette opération, les revenus de l'Afrique représenteront désormais jusqu'à 44% du chiffre d'affaires du groupe et valorisent le titre à 106,8 DH. Pourtant, le marché ne réagit que très peu à cette opération. C'était il y a une semaine. Le groupe émirati des télécommunications, Etisalat, avait annoncé dans un communiqué qu'il allait vendre ses opérations dans six pays africains à Maroc Telecom pour 650 millions de dollars. «Un chiffre qui avoisine la moitié du cash-flow généré par l'opérateur marocain en 2013 et dont on connaît la capacité d'endettement encore importante», explique un analyste. Ainsi, la société basée à Abu Dabi va céder ses filiales au Bénin, en République centrafricaine, au Gabon, en Côte d'Ivoire, au Niger et au Togo à IAM. Sur le papier, cette opération ne peut être que bénéfique pour Maroc Telecom et les analystes de CFG Group qualifient ces acquisitions d'«actifs à fort potentiel qui réduiraient l'exposition du groupe au marché marocain». Car, il faut le dire, l'activité au Maroc est vue d'un mauvais oeil par les investisseurs. Elle se tasse et supporte une concurrence surdimensionnée, sans pour autant faire perdre de l'argent à Maroc Telecom. Au premier trimestre de 2014 par exemple, le chiffre d'affaires au Maroc est en baisse de 3,4%, alors que l'EBITDA, qui mesure la performance opérationnelle, est en baisse de 11%, tout en restant positif bien sûr. Un ralentissement qui s'inscrit parfaitement dans la tendance des 2 ou 3 dernières années. Cette configuration fait de Maroc Telecom «une entreprise en maturité», malgré ses nombreux actifs rentables en Afrique, mais qui ne représentent que 25% de l'EBITDA global du groupe. Mais la situation va changer avec ces acquisitions. «Selon nos premières estimations, ces actifs ont généré en 2013 des revenus de 4,9 Mds de dirhams pour une marge d'EBITDA de 22,3%. A titre de comparaison, les filiales subsahariennes de Maroc Telecom qui sont implantées dans la même région, ont généré des revenus de 7,8 Mds de dirhams pour une marge d'EBITDA de 50,4%», expliquent les analystes de CFG. Et d'ajouter: «après la finalisation de l'opération, l'international devrait représenter 44% des revenus consolidés contre 27% en 2013, et changer ainsi fondamentalement le profil de croissance du groupe». En d'autres termes, la montée en puissance de la contribution des filiales africaines rajeunira à coup sûr le profil de la société en la remettant dans la case «entreprise de croissance». Le marché attentif Si l'annonce de cette opération stratégique a généré un vent d'optimisme chez la communauté des analystes, le marché, lui, reste prudent et aucun mouvement de foule n'a été observé sur la valeur. «Même les volumes montrent que le marché temporise», explique un gérant d'OPCVM. Car, il faut dire que ce n'est pas encore totalement gagné pour IAM. D'ailleurs, les analystes de CFG continuent leur lecture de cet évènement comme suit : «La finalisation de cet accord est conditionnée entre autres par l'approbation des autorités locales des pays concernés et, surtout, par la conclusion du deal Vivendi-Etisalat». D'autres expliquent cet attentisme également par l'approche du détachement du dividende, ce qui risque de stopper toute hausse rapide du cours. En somme, le comportement extrêmement prudent du marché montre que la conclusion du deal entre Vivendi et Etisalat retient en haleine les opérateurs jusqu'à la veille même de la date butoir. En plus et, surtout, les chances sont grandes de voir ces acquisitions prendre beaucoup de temps pour se concrétiser avec, dans certains cas, des contraintes politiques en plus de celles réglementaires. Les télécoms sont un secteur stratégique. Signalons enfin que CFG valorise le titre à 106,8 DH contre un cours, au moment où nous mettions sous presse, de 101,8 DH, soit une décote de 5%, tout en concluant ne pas avoir pour l'instant suffisamment d'informations sur le mode de financement de ces acquisitions et leurs valorisations.