L'arsenal juridique a été renforcé par l'adoption de cinq lois environnementales dont la portée reste somme toute limitée à cause de l'absence de décrets d'application. Au moment où nous parlons de réforme de la fiscalité, et dans un contexte de restriction budgétaire, il est plus judicieux d'insérer la fiscalité écologique dans une réforme plus globale. Au cours des dernières années, le développement durable s'invite à tous les débats. Et pour cause, le développement économique ne peut se faire comme il se doit sans qu'il y ait une protection réelle de l'environnement. Sans vouloir revenir sur une thématique qui, chaque jour, fait les choux gras de la presse, nous nous intéressons plus à la fiscalité sur l'environnement qui, malheureusement, reste le parent pauvre. Des experts en la matière estiment que jusqu'à présent, la fiscalité sur l'environnement est un luxe, eu égard aux défis qui nous guettent en matière de réforme fiscale. Vrai ou faux ? Une chose est cependant sûre: sous d'autres cieux, ceux qui mènent à bien leur politique de développement durable sont les pays qui, en parallèle, ont fait de la fiscalité verte, un levier de développement. Aujourd'hui, à la veille de la préparation du projet de Loi de Finances 2014, nous nous posons la question sur la nécessité d'introduire des mesures fiscales en faveur de la protection de l'environnement. Si on se réfère à l'exemple de la France, pays qui nous inspire beaucoup, elle s'est dotée d'un comité pour la fiscalité écologique qui se réunit régulièrement pour débattre des mesures à mettre en place. Il est censé remettre au gouvernement des préconisations précises sur des sujets sensibles. La dernière réunion en date est celle du 13 juin sur un désaccord sur l'alignement de la taxation du carburant diesel sur celle de l'essence et l'introduction d'une composante «carbone» dans la fiscalité énergétique. Bien qu'elle paraisse a priori simple, la fiscalité écologique est complexe et nécessite un dosage savant pour ne pas nuire à la compétitivité des entreprises. Le Maroc traîne le pas Le Maroc accuse du retard en la matière, mais il ne faut pas occulter les mesures qui ont été déployées. En guise de rappel, sur le plan juridique, notre arsenal a été renforcé par l'adoption de cinq lois environnementales : loi sur l'eau, loi-cadre sur la protection de l'environnement, loi sur les études d'impact, loi relative à la lutte contre la pollution de l'air et la loi sur la gestion des déchets et leur élimination. Le problème est que la portée de ces lois reste somme toute limitée à cause de l'absence de décrets d'application devant faciliter leur traduction sur le terrain par les outils et mécanismes juridiques et financiers. C'est le constat qui se dégage d'une table ronde organisée par l'Association marocaine de gestion de déchets et de l'environnement. Les fonds mis à la disposition des entreprises polluantes revêtent une grande importance. Nous pouvons citer à titre d'exemple, le Fodep qui consiste à financer les projets de dépollution pour les entreprises industrielles au moyen de dons et de crédits, ajoutés à ceux des fonds financés par l'Union européenne qui sont également importants. A un moment crucial où nous parlons de réforme de la fiscalité et dans un contexte de restriction budgétaire, il est plus judicieux d'insérer la fiscalité écologique dans une réforme fiscale globale, avec une évolution progressive des taux pour favoriser son acceptabilité sociale. Aussi, pour éviter d'opposer le social à l'écologie, serait-il plus intéressant d'intégrer la lutte contre les inégalités dans la mise en place de la fiscalité environnementale. Et pour ne pas céder à la tentation d'utiliser le levier environnemental pour alimenter les caisses de l'Etat, il faut réinvestir les marges dégagées grâce aux taxes environnementales dans des projets économiques ou sociaux vertueux. Nous savons tous que le principal défi de notre tissu économique est la compétitivité. Partant d'un tel constat, il est important de conjuguer compétitivité et fiscalité écologique, et ce en incitant les différents secteurs économiques à l'utiliser comme levier de développement. Et c'est d'ailleurs à ce niveau que se pose la question : faut-il mettre en place une fiscalité incitative ou dissuasive ? D'après un expert-comptable : « La fiscalité incitative ne peut se contenter de taxer, de manière élevée, les polluants-pollueurs. Elle doit surtout avantager par une taxation réduite, ou une dépense fiscale, les écoproduits, les écotechnologies, les environnements favorables à l'environnement». Il s'empresse d'ajouter : «Une fiscalité dissuasive ou incitative importe peu. Les deux vont de pair et l'une ne peut aller sans l'autre. L'idée de taxer les entreprises polluantes, l'emballe tout autant que celle d'encourager de celles qui font l'effort. Plus exactement, soumettre les pollueurs-payeurs à des écotaxes tout en déduisant de l'assiette les dépenses d'investissement dans les écoprojets. S. Es-siari Les lois environnementales La loi sur l'eau L'article 23 stipule la mise en place de redevances, taxes parafiscales et de toutes autres recettes pour améliorer les ressources des agences de bassin et, par conséquent, le financement des projets de préservation et d'exploitation du patrimoine hydraulique. Les sanctions prévues par la loi constituent également des sources de recettes pour les agences de bassin. Loi-cadre relative à la protection et la mise en valeur de l'environnement Cette loi, dans son chapitre IV, stipule la mise en place d'un système d'incitations financières et fiscales pour l'encouragement des investissements dans le domaine de l'environnement. La section V du même chapitre prévoit la création d'un Fonds national de l'environnement. Ledit FNE a été créé, toutefois les mécanismes de son alimentation restent à définir et à institutionnaliser. Dans la même loi, le principe du régime spécial de la responsabilité civile constitue la porte d'entrée pour toute action visant la mobilisation des fonds pour le financement de la dépollution au Maroc. L'article 23 stipule la mise en place d'un régime d'incitations financières et d'exonérations pour encourager tout investissement visant la prévention de la pollution de l'air, le recours aux énergies renouvelables et la rationalisation de l'utilisation de l'énergie. Loi relative à la lutte contre la pollution de l'air