Ce Forum a été organisé par l'IMRI sous le Haut Patronage de Sa Majesté le Roi Mohammed VI et en partenariat avec la Fondation Hans Seidel, le ministère des Affaires étrangères et de la Coopération, l'Office Chérifien des Phosphates (Sponsor officiel) et la Banque Centrale Populaire (Sponsor). Après s'être penché sur les causes du printemps arabe, qui sont principalement le manque de démocratie et le sous-développement économique et social, et considérant que les pays arabes doivent compter avant tout sur eux-même, le Forum propose les recommandations suivantes : A) Mesures a prendre sur le plan interne 1) Sur le volet politique : l il est nécessaire de prendre toutes les mesures ayant pour but d'accélérer le processus démocratique, et rester vigilant pour éviter tout retour en arrière, et toute récupération par des forces susceptibles de mettre ce processus en péril ; l les institutions et la société civile doivent veiller au respect des droits de l'homme et de la parité hommes/femmes ; l il faut accorder aux jeunes, aux femmes et aux membres de la société civile une plus grande place dans la vie politique et prendre toutes mesures dans ce sens ; l il faut mettre en œuvre la régionalisation avancée et la réforme du système électoral afin d'assurer une majorité aux conseils régionaux et municipaux à même de permettre une gestion efficace des régions et des villes ; l l'Union du Maghreb devient de plus en plus impérieuse, elle nécessite l'ouverture dans les plus brefs délais de la frontière terrestre algéro-marocaine. 2) Sur le volet économique : l le développement économique passe en premier lieu par l'éradication de l'analphabétisme et une réforme profonde et radicale du système éducatif, afin d'adapter les enseignements aux besoins du marché, et en donnant une plus grande place aux langues étrangères dans le système public ; l une importance particulière doit être accordée à la création d'emplois, notamment pour les jeunes, avec une réforme des programmes d'incitation à l'auto-emploi ; l le développement économique nécessite l'instauration d'une bonne gouvernance de l'Etat et du secteur privé, ainsi que la lutte contre la corruption et l'économie de rente ; l il convient également d'encourager l'Entrepreneuriat féminin d'améliorer la compétitivité des économies des pays arabes, notamment par des mesures d'attractivité des investissements étrangers ; l le contrôle des établissements publics doit être renforcé en fournissant tous les moyens humains et matériels à la Cour des Comptes, et en donnant une suite administrative ou judiciaire à ses rapports ; l une nouvelle approche dans les relations patronat - syndicat doit être trouvée afin d'améliorer la compétitivité des entreprises publiques et privées, et contribuer activement à la production de richesses ; l il y a lieu de réformer d'urgence au Maroc la Caisse de Compensation qui absorbe des montants faramineux au détriment de l'investissement, et de cibler les bénéficiaires. 3) Sur le volet social : l nécessité d'anéantir le fléau de la pauvreté qui touche de larges franges de la population, par l'élaboration de programmes spécifiques donnant la priorité aux régions défavorisées, et en procédant à des évaluations périodiques ; l il faut prendre toutes les mesures nécessaires pour préserver les acquis de la classe moyenne, et procéder à une vaste réforme fiscale pour que chaque citoyen puisse contribue aux dépenses de l'Etat en fonction de ses moyens ; B) Partenariat de l'Union européenne et de la communauté internationale 1) Rôle de l'Union européenne l l'Union européenne doit cesser tout soutien aux régimes autoritaires non démocratiques, sous prétexte qu'ils constituent le rempart contre les mouvements fondamentalistes, l'immigration clandestine et le terrorisme, et reconnaître tout gouvernement arabe issu d'élections libres et transparentes ; • le partenariat euro-méditeranéen doit passer par un double processus : vertical entre l'Union européenne et les pays partenaires, et horizontal entre les pays partenaires eux-mêmes ; • l'Union européenne doit faciliter la mobilité et la circulation des personnes à l'intérieur de l'espace euro-méditerranéen, afin de ne pas être perçue par le Sud comme une forteresse, de même que les pays européens doivent cesser d'agir en ordre dispersé sur cette question très sensible ; • l'Union européenne, dans le cadre de la Déclaration de Barcelone, doit mettre en œuvre une conditionnalité positive et démocratique au service des peuples et non des régimes, et renforcer son partenariat avec les pays du Sud qui font le plus de progrès dans le processus démocratique et le respect des droits de l'homme ; • la société civile doit devenir pour l'Union européenne un partenaire incontournable au même titre que les institutions étatiques des pays partenaires ; • l'Union européenne doit lutter contre la propagation de l'islamaphobie en Europe, et promouvoir l'idée que l'Islam est compatible avec la gouvernance démocratique ; • il est apparu que la création de zones de libre-échange est une condition nécessaire, mais non suffisante pour le développement économique des pays du Sud. Le développement ne peut s'accomplir dans le Sud que par une aide financière accrue, une assistance technique tous azimuts, le développement des investissements et le transfert de technologies de la part du Nord ; • l'Union pour la Méditerranée créée en 2008 n'a pas réalisé ses objectifs du fait du manque de moyens financiers et de l'aggravation du conflit israélo-palestinien. Il faut repenser entièrement cette union qui a été élaborée sur des bases non crédibles. 2) Role de la communauté internationale : l la communauté internationale doit redoubler d'efforts pour protéger la société civile en Syrie et contribuer à une solution politique dans ce pays ; l les Etats-Unis doivent repenser leurs relations envers les pays arabes, reconnaître les gouvernements issus d'élections démocratiques, et équilibrer leur position vis-à-vis du conflit israélo-palestinien ; l les BRIC (Brésil, Russie, Inde, Chine) doivent s'impliquer davantage vis-à-vis des pays arabes, y apporter une contribution accrue et favoriser le processus démocratique dans ces pays ; l les institutions internationales, notamment l'ONU, la Banque mondiale et le FMI doivent multiplier leurs initiatives pour aider au développement économique et social de la région arabe. (*) Par Jawad Kerdoudi, Président de l'IMRI (Institut Marocain des Relations Internationales)