Il est de coutume que les prévisions varient d'un organisme à l'autre. Au Maroc, il existe souvent des écarts dans diverses prévisions macroéconomiques posant la problématique de la précision des données communiquées. Le cas le plus récent est celui du déficit budgétaire prévu en 2021. Il est de rigueur que chaque institution dévoile ses prévisions, souvent légèrement différentes des autres, invoquant des méthodes de calculs et surtout une grille d'analyse différente. Il y a autant de d'organismes que de données distinctes faute d'une méthodologie commune. Mais parfois le gap est tellement important qu'il interpelle sur la précision et par ricochet l'efficience des prévisions annoncées, ce qui entame quelque peu l'appréciation qu'on peut en faire et leur corrélation avec la réalité. Le cas échéant du déficit budgétaire prévu en 2021. Il s'agit là de deux institutions, Ministère des Finances et Bank Al-Maghrib, deux poids lourds qui nous livrent des prévisions avec un 1,4 point d'écart. Et autant le dire immédiatement, lorsqu'il s'agit des prévisions sur le déficit budgétaire, ce qui semble être une légère différence se chiffre en réalité en milliards de Dirhams. Rappelez-vous, à l'issue du troisième conseil de Bank Al-Maghrib, le Wali de la Banque centrale avait livré une série de données macroéconomiques dont des prévisions de 2021. Prudent, il insiste que ces données sont le fruit d'une conjointure à l'instant T qui est appelée à changer face à l'incertitude que fait planer la Covid-19. Le 22 septembre donc, BAM tablait sur une croissance de 4,7 % en 2021 avec une campagne de 75 millions de quintaux (une valeur agricole de 12,6%) et une amélioration de la valeur ajoutée non agricole de 3,7%. Le déficit budgétaire, hors privatisation, devrait atteindre 7,9 % en 2020 pour revenir à 5,1 % en 2021. BAM, par ailleurs réputée par la précision de ses projections, aurait-elle tablé sur le même scénario poste crise mondiale de 2008, le déficit ayant été de 7,2 % en 2013 et a pu être ramené à 5,1% en 2013 ? Sauf qu'il n'y a aucune commune mesure entre les deux crises, l'actuelle étant inédite et ayant des impacts systémiques avérés aussi bien au Maroc que dans le monde. L'autre inconnue, est qu'on ne sait pas véritablement à quel horizon la crise sanitaire sera contenue. Lire également : PROGRAMME INTELAKA : ACCORDEZ VOS VIOLONS SVP Le 28 septembre, le ministre des finances Mohamed Benchaâboun présentait l'exécution du budget 2020 et le cadre de préparation du PLF 2021 devant le parlement où il évoque une aggravation du déficit budgétaire. Le 14 octobre, il présentait devant le Roi les grandes lignes du PLF 2020 et avance un taux de croissance de l'économie nationale de 4,8% et un déficit budgétaire de 2021 de 6,5% du PIB (La Loi de Finances rectificatives tablait sur 7,6% en 2020). Entre les deux institutions, il existe 1,4% d'écart. Il est possible de l'expliquer par les dépenses supplémentaires évoquées par M. Benchaâboun devant le Parlement (33,2 Mds de DH), notamment les 5 Mds de DH additionnels dans le budget 2021 pour les secteurs de l'Education et la Santé, les + 8,5 Mds de DH pour le dialogue social et la régularisation de la situation des salariés, 1,5 Md de DH pour les législatives, + 2 Mds de DH pour la compensation + 1,6 Md de DH pour la régionalisation avancée, et 14,6 milliards de DH entre la mise en œuvre des orientations royales. Et ce dans un contexte où il est attendu une réduction drastique des recettes de l'Etat devant recourir à l'endettement et à des mécanismes de financement innovants. Déjà sous l'effet des premières répercussions de la crise, il est attendu une baisse de 20 à 25 milliards de DH des recettes de l'Etat en 2020. Vu le contexte actuel, incertain et volatil, Mohamed Benchaâboun semblerait le plus réaliste face à une augmentation des dépenses et la poursuite de l'amenuisement des recettes en 2021 mais surtout une relance plus lente qu'on ne l'aurait souhaité et une crise sanitaire loin d'avoir dit son dernier mot. Rendez-vous donc en 2022, pour savoir laquelle des deux parties avait vu juste, du moins était proche de la réalité. Bien que sincèrement, un déficit de 6,5 % du PIB n'est pas une bonne nouvelle !