Interviewé par Imane Bouhrara | Quelle est la finalité de la science ? Comment prévenir sa dérive lorsqu'elle touche à l'essence de l'humain : son ADN. Le sujet fait débat et s'est invité à la Semaine de la Science qui se poursuit jusqu'au 5 juin au campus de Benguerir de l'UM6P. A l'issue du colloque sur le transhumanisme, Jacques Attali revient sur un sujet de controverse. Au moment où la planète fait face à des défis climatiques et environnementaux qui mettent en péril son équilibre naturel (sous l'effet de l'homme et de son développement aussi bien économique, industriel que démographique) et menaçant la vie humaine et d'autres espèces, la science est en train d'explorer les pistes d'amélioration des capacités de l'homme. Le transhumanisme en repoussant chaque jour les limites du réels jusqu'à viser l'objectif d'immortalité, a dans ce sens poser plusieurs grandes interrogations sur l'éthique, les limites et l'utilité même de la recherche scientifique. Faut-il inéluctablement choisir une voie sans l'autre ? Il s'agit d'un débat mondial, qui s'est invité à la deuxième édition de la Semaine de la Science organisée par l'Université Mohammed VI Polytechnique (U6MP) et qui a été marquée cette année par la tenue d'un colloque sous le thème « Transhumanisme : l'humain augmenté », avec comme invité d'honneur, l'écrivain et penseur Jacques Attali. L'artificialisation de l'homme divise et bien que tout ce qui est bon en l'humain est un artefact, mais lorsqu'on verse dans le bio activisme, à savoir la liberté de se modifier soi-même, des grandes questions se posent et autant dire que le sujet est loin de faire l'unanimité. En effet, dans son intervention Jacques Attali rappelle le cas survenu il y a quatre ans du généticien chinois, He Jiankui, qui avait effectué des manipulations sur des embryons dans l'objectif de provoquer une mutation de leurs génomes pour leur conférer une immunité naturelle contre le VIH. Ses jumelles désormais appelées bébés OGM ou Crispr et dont ignore aujourd'hui le sort, constitue un précédent dont on connaît l'existence alors que certaines expériences demeurent probablement méconnues. Ce qui constitue une source d'inquiétude pour Jacques Attali et la communauté scientifique internationale qui pose la question de l'éthique de la recherche scientifique. Pour lui, le champ de la science est vaste et doit être au service de l'économie de la vie, à savoir la santé, l'éducation et l'élimination de ce qui peut causer la disparition de la race humaine. José Cordeiro, ingénieur, économiste, futuriste et transhumaniste, qui estime que la quête de la science est justement d'éliminer ce qui menace la vie et donc cause la mort de l'humain est quelque part celle de l'immortalité. Il argue le fait que depuis toujours la recherche scientifique notamment médical a pour mission de lutter contre les facteurs de mortalité et de la mort tout simplement. Il soutient par ailleurs que cette quête entre autre le vieillissement comme facteur entrainant des maladies comme le cancer ou Alzheimer. Et par conséquent la quête de l'immortalité est une résultante naturelle de l'évolution et les ambitions scientifique. Il soutient tout simplement que ceux qui veulent mourir meurent et que ceux qui veulent vivre vivent, en opposition à toute idée de mettre des limites ou des frontières à l'ambition d'améliorer l'humain et le doter de nouvelles capacités tout en supprimant les facteurs de mortalité ou de maladie. Et avec le soutien des progrès technologiques et l'intelligence artificielle. La réaction de Jacques Attali ne s'est pas faite attendre. Allant jusqu'à qualifier le transhumanisme de secte, il estime que ce mouvement essaye de faire croire qu'il y a des réponses individuelles à des enjeux collectifs. Mettant les pieds dans le plat, il qualifie d'escroquerie intellectuelle de dire que nous serons immortels dans 20 ans. Une imposture selon Jacques Attali qui interpelle la question de l'éthique. Mais quelle gouvernance ? Quelle éthique ? Et qui décidera de quoi alors ? La réponse de Jacques Attali au micro d'EcoActu.ma