Pour obtenir une augmentation des livraisons de gaz algérien à la France, en pleine crise énergétique engendrée par la guerre en Ukraine, Paris a fait montre d'un visage liberticide assez inquiétant. Au risque de voir sa voix discréditée. Ferhat Mehenni, président du Mouvement pour l'autodétermination de la Kabylie (MAK, organisation indépendantiste) a été grossièrement censuré après que CNews, chaîne de télévision française d'information nationale en continu, a annulé au dernier moment un entretien avec le leader kabyle en exil, programmé depuis dix jours. Aucune explication n'a été fournie, mais les premières informations affirment que la main de l'Elysée est derrière cette amputation médiatique. Une censure qui prend un caractère semi-officiel qui la rend plus douloureuse aussi bien que plus nuisible. Début septembre, le journal «Le Monde» a retiré de son site une tribune sur la visite du président Emmanuel Macron en Algérie. Ce texte avait été retiré quelques heures après sa publication. Signé par le chercheur Paul Max Morin, il était intitulé «Réduire la colonisation en Algérie à une "histoire d'amour" parachève la droitisation de Macron sur la question mémorielle». Là aussi, l'Elysée est intervenu pour imposer ses diktats vexatoires, avec comme conséquence des accusations de censure contre Le Monde. Quand le régime algérien pousse la France à renier ses principes Jamais les restrictions imposées à la liberté de la presse n'ont atteint ce degré de sévérité. C'est l'usage autorisé de l'arbitraire par un gouvernement occidental qui se dit scrupuleux observateur des engagements qu'il a contractés en matière des droits. Ces attaques qui visent des voix dissidentes algériennes surviennent alors que la chef du gouvernement français Elisabeth Borne se rendra en Algérie les 9 et 10 octobre pour entamer des discussions sur une possible augmentation des livraisons de gaz algérien à la France, en pleine crise énergétique engendrée par la guerre en Ukraine. Cette dernière «a fait part de ses craintes en cas d'hiver particulièrement froid cumulé à des difficultés d'approvisionnement.» La France court le risque de coupures, et le gouvernement a même plafonné les prix du gaz et l'électricité à 15 % en 2023. L'Etat français va continuer à dépenser des milliards d'euros pour atténuer les contrecoups de la pire crise énergétique alors que la dette publique a explosée. Interrogé sur la crise diplomatique en mars, lors d'une interview avec des médias algériens diffusée par la télévision officielle, Abdelmadjid Tebboune a affirmé qu'«il faut bien que ces relations reviennent à la normale, à condition que l'autre partie (la France) les conçoive sur une base d'égal à égal». «Nous sommes d'accord pour qu'on traite l'un avec l'autre pour ne pas nuire aux intérêts de chaque partie, mais nous n'accepterons pas qu'on nous impose quoi que ce soit», a ajouté Abdelmadjid Tebboune. Si ce dernier a prédit «un retour à la normale» des relations avec la France, il demeure désormais clair que le régime algérien cherche à humilier Paris après les propos du président français Emmanuel Macron où ce dernier a accusé le système «politico-militaire» algérien d'entretenir une «rente mémorielle». Emmanuel Macron avait même questionné l'existence d'une nation algérienne avant la colonisation française lors d'une rencontre avec des éléments de la diaspora algérienne. Le Maroc, cible d'une presse française pas totalement libre En assujettissant les journaux à une gêne particulière, le gouvernement français se rend de fait, malgré lui, responsable de tout ce que dit la presse. Récemment, les articles antimarocains diffusés en France se sont répandus comme la mauvaise herbe. On les lit comme symptômes de la volonté du maître, plusieurs lignes aventurées semblaient une déclaration, ou, ce qui est tout aussi fâcheux, un tâtonnement de l'autorité française qui subit désormais un ascendant algérien considérable. À cet inconvénient s'en joint un autre. Empêcher qu'on ne dise du mal de l'Algérie pour fructifier ses affaires prouve que les journaux sont sous l'influence officielle, qui multiplie des mouvements inquiets et minutieux peu conformes à sa dignité. La France, d'ailleurs, courtise une Algérie qui dispose certes de réserves considérables mais ses capacités d'exportation sont presque saturées. Le régime algérien, lui, pointe sans cesse une hausse de la consommation locale comme prétexte qui limite sa marge de manœuvre quant à une augmentation substantielle de ses livraisons à l'étranger. Ses relais médiatiques ont raillé le président Macron «qui n'a signé aucun contrat énergétique», lors de la dernière visite.