Alors que le Maroc fustige l'«activisme antagonique» de Berlin après la reconnaissance américaine de la souveraineté du Maroc sur le territoire du Sahara, il s'avère que les autorités allemandes, blâmées pour leurs bavardages avec un ex-terroriste, veulent renouer avec les méthodes du ministère de la sécurité d'Etat, dit la Stasi, dissolu après la réunification en 1990. Organiser la surveillance et la délation, recruter des personnages de l'ombre qui entretiennent des contacts avec des informateurs ou mouchards, diffamer le plus souvent sans état d'âme, tout y passe. Décryptage. Rabat a reproché à Berlin, avec beaucoup de véhémence, de s'être abouché, au rebours du bon sens, avec un ex-terroriste notoire, et de manger à deux râteliers. Engrenage inextricable et fécond en vilenies de toutes sortes. Ce fut bien pis quand les autorités marocaines avaient abordé la vraie question : celle des renseignements allemands et de leur attitude étrange, qui consiste à dévoiler des informations sensibles de manière interlope à un extrémiste au passé trouble. Dans les cercles officiels marocains, cette manière d'agir brouillonne et présomptueuse interpelle. «On commença à s'apercevoir qu'il y avait une fissure quelque part et que des fuites se produisaient», a-t-on confié. Les hommes du métier sont seuls à connaître l'énorme gravité de cette faute. Les plus instruits des questions de renseignements n'y voyaient pas sans angoisse un dangereux précédent. Au Maroc, les attaques de la presse allemande contre les institutions névralgiques du royaume sont jugées inadmissibles. Une presse officiellement soutenue qui descend aux pires bassesses pour déconsidérer le Maroc en recrutant une race d'aboyeurs et de sycophantes à la plume légère, connue pour son animosité à l'égard du pays. Des médiocrités ambitieuses, que le hasard a portées aux portes de médias allemands privilégiés et qui tiennent à y rester, sont devenues des condottieri d'une presse délatrice sans honneur, à l'assaut du Maroc et de ses intérêts essentiels. Des journalistes comme Ismail Azzam, ex-ramasseur de bouts de papier, qui jette en pâture des institutions ou des hommes, avec impunité. Un système qui rappelle le ministère de la sécurité d'Etat, dit la Stasi, le service de police politique, de renseignements, d'espionnage et de contre-espionnage de la République démocratique allemande jusqu'a 1990. Tout ce qui avait trait à cet organe était suspect, équivoque, troublant par les brusques jets de lumière dont s'illuminaient d'obscurs recoins de ses agissements. La Stasi était connue pour ses procédés d'agence louche, ses basses mœurs policières où elle habituait un trop grand nombre d'officiers, les familiarisant avec le mensonge et la dissimulation. La gestion déficiente du secret relative à l'affaire du terroriste Mohamed Hajib n'est pas le premier impair du service fédéral de renseignement allemand (BND). Cet organe, accusé de ne pas protéger les données des citoyens allemands comme étrangers, adopte des pratiques de surveillance massive et d'intrusions à large échelle révélées par des rapports alimentés par des lanceurs d'alerte. Les informations divulguées ont fourni la preuve manifeste de l'existence de systèmes de grande envergure à la pointe des nouvelles technologies. La BND est en train de devenir un grand «complexe de la surveillance», qui tente d'échapper au contrôle démocratique et à l'obligation de rendre des comptes, et menace le caractère libre et ouvert de la société allemande. Le 6 mai, le Maroc a rappelé son ambassadrice à Berlin pour consultations, en dénonçant dans un communiqué officiel les «actes hostiles» de l'Allemagne, relatifs à son intégrité nationale. Le texte met en cause notamment l'«activisme antagonique» de Berlin après la reconnaissance américaine de la souveraineté du Maroc sur le territoire du Sahara, mais aussi «l'acharnement continu [de l'Allemagne] à combattre le rôle régional du Maroc, notamment sur le dossier libyen». Le Maroc n'avait pas été invité à participer aux négociations sur l'avenir de la Libye, menées à Berlin en janvier 2020. «Complicité coupable à l'égard d'un ancien terroriste» Le Maroc accuse les autorités allemandes de «complicité à l'égard d'un ex-condamné pour des actes terroristes, notamment en lui ayant divulgué des renseignements sensibles communiqués par les services de sécurité marocains». Il s'agit de Mohamed Hajib, un Germano-Marocain condamné en 2010 au Maroc à dix ans de réclusion pour terrorisme, une sentence ramenée à cinq ans début 2012. Résidant en Allemagne, cet islamiste radical, d'une petite intelligence, sans scrupule ni culture, mythomane et docile, publie régulièrement des attaques critiques à l'encontre des institutions politiques et sécuritaires marocaines sur les réseaux sociaux. L'opinion, ahurie et lassée par son manque de franchise, ses divagations et ses allures de comédien en quête d'applaudissements et d'approbation, sent les rouages de la machine qu'il a lancée se fausser entre ses mains imprudentes. Depuis quelque temps, Berlin donne l'impression de renouer avec la Stasi. Sa diplomatie tranche de tout, sèche, hautaine, d'une infatuation provocante, sauf que la police politique est-allemande, par le passé, ne jouissait pas d'une bonne renommée. En 2017, Der Spiegel, le magazine allemand d'investigation, a dévoilé que les services de renseignements extérieurs allemands (BND) ont espionné les journalistes de plusieurs médias étrangers, comme la BBC, le New York Times et l'agence de presse Reuters, affirmant qu'à partir de 1999, «au moins cinquante numéros de téléphone, de fax ou d'adresses électroniques» de journalistes ou de rédactions sur des listes d'écoute. En 2020, la Cour constitutionnelle de Karlsruhe (sud-ouest), a déclaré que le programme de surveillance des télécommunications à l'étranger, mené par le service fédéral de renseignement est contraire à la Constitution allemande. La plus haute autorité judiciaire du pays a laissé aux législateurs du pays jusqu'à la fin de cette année pour modifier la loi. Selon les magistrats, le BND est «tenu de respecter les droits fondamentaux», y compris quand il collecte des données à l'étranger. Or, son cadre légal actuel «viole le droit fondamental au secret des télécommunications», ainsi que «la liberté de la presse». Plusieurs médias allemands insistaient ainsi sur le besoin de réforme du BND après ces scandales, rappelant le limogeage du chef des renseignements extérieurs allemands (BND), Gerhard Schindler, en 2016, fragilisé par les révélations sur la centrale d'écoutes de Bad Aibling, près de Munich (sud-est), accusée d'avoir espionné pour la NSA des responsables et des entreprises européens. La BND et la Stasi, même combat ? Ce qui est sûr c'est qu'une véritable usine de faux fonctionne à plein régime contre le Maroc. L'on se rappelle de ces officiers qui fabriquaient, avec le plus grand soin, de faux états militaires, de fausses preuves, de faux plans de mobilisation et dont leurs armoires en étaient pleines.