Une équipe de chercheurs du Institut national d'archéologie a mis au jour des vestiges attestant de l'existence de communautés agricoles sédentaires sur la côte méditerranéenne du Maghreb plus de 3 000 ans avant notre ère. Cette découverte, mentionnée par la presse britannique, remet en question l'hypothèse d'un territoire inoccupé avant l'arrivée des Phéniciens vers le VIIIe siècle av. J.-C. et révèle un passé bien plus riche et complexe que présumé. Un site occupé dès le Bronze ancien Les recherches menées sur le site de Kach Kouch, identifié en 1988 et initialement fouillé en 1992, ont permis de distinguer trois phases d'occupation s'étalant de 2200 à 600 av. J.-C.. Les premières traces attestées, datées entre 2200 et 2000 av. J.-C., se limitent à quelques tessons de céramique non décorée, un éclat de silex et un os de bovin. Leur rareté pourrait s'expliquer par l'érosion des sols ou une occupation temporaire du site. Après une période d'abandon, la colline de Kach Kouch fut investie de manière durable dès 1300 av. J.-C. par une communauté d'une centaine d'individus vivant dans des habitations circulaires en clayonnage et torchis. Ces populations pratiquaient une agriculture organisée et un élevage diversifié, s'appuyant sur des structures de stockage creusées à même la roche pour conserver leurs récoltes. Un mode de vie structuré et des avancées techniques L'analyse des vestiges a mis en évidence la culture du blé, de l'orge et des légumineuses, ainsi que l'élevage de bovins, ovins, caprins et porcins. Ces populations utilisaient des meules pour la mouture des céréales, des outils en silex taillé et des poteries décorées. Parmi les artefacts exhumés figure un fragment métallique obtenu par coulée dans un moule, identifié comme le plus ancien vestige en bronze connu à ce jour en Afrique du Nord, à l'exception de l'Egypte. Des interactions précoces avec les Phéniciens À partir des VIIIe et VIIe siècles av. J.-C., alors que les Phéniciens établissaient des comptoirs commerciaux sur la côte maghrébine, notamment à Lixus, les habitants de Kach Kouch ont préservé leurs pratiques culturelles tout en intégrant certains éléments exogènes. Cette transition marque un tournant dans la compréhension des fluctuations culturelles de l'époque, révélant une continuité locale plutôt qu'une rupture brutale avec l'arrivée des navigateurs orientaux. Un bouleversement des perspectives historiques Cette découverte, fruit des campagnes de fouilles menées en 2021 et 2022, renouvelle profondément la perception de la préhistoire récente du Maghreb. Elle révèle des contacts précoces entre les populations locales et les civilisations méditerranéennes et met en évidence une occupation humaine bien antérieure à l'implantation phénicienne. Ces travaux ouvrent de nouvelles perspectives quant aux échanges, aux évolutions techniques et aux structures sociales des premières communautés sédentaires de la région en général.