La mise en place de sanctions pécuniaires pour dissuader les mauvais payeurs portera encore plus ses fruits si tous les acteurs de l'informel et le phénomène de la sous déclaration du chiffre d'affaires se réduisent significativement, selon Amine Hassouni, Directeur Arbitrage chez Coface Maroc, spécialiste de l'assurance-crédit. Pour l'expert, il est aujourd'hui difficile d'évaluer la réelle capacité des entreprises à honorer leurs engagements vis-à-vis de leurs fournisseurs, car cette performance est le reflet des mesures de soutien du gouvernement. «Cependant, selon une vision indépendante de notre portefeuille, la crise sanitaire a largement contribué à la détérioration des délais de paiement inter-entreprises, sachant qu'ils sont passés, selon la CGEM, de 408 milliards de dirhams (MMDH) en 2018 à 421 MMDH en 2019», affirme-t-il. «Aussi, les entreprises ayant été impactées par la baisse du niveau d'activité en 2020, leur trésorerie s'en trouve affectée avec une répercussion directe sur la chaîne de valeur et donc sur leurs fournisseurs. La 3e édition du Baromètre de la CGEM indique d'ailleurs une hausse du délai supplémentaire moyen de 53 jours. Cependant, s'agissant des délais de paiement de l'Etat, nous constatons une amélioration continue (passage de 60 à 40 jours en moyenne)», poursuit-il. Le spécialiste de l'assurance-crédit ajoute que l'amélioration des délais de paiement n'est pas exclusivement tributaire de la réussite de la campagne de vaccination, mais aussi des mesures de relance actuelles et prévues par le gouvernement. Celles-ci auront un impact positif sur la confiance des investisseurs vis-à-vis du climat des affaires. Il note que l'instauration des sanctions pécuniaires à l'encontre des mauvais payeurs portera encore plus ses fruits si tous les acteurs de l'informel et le phénomène de la sous déclaration du chiffre d'affaires se réduisent significativement. Dans le cas contraire, beaucoup d'entreprises de taille moyenne ou modestes (PME & PMI) ou des structures plus importantes avec un endettement structurel, subiront cette mesure qui deviendra une contrainte malgré les efforts de l'Etat pour améliorer ses propres délais de paiement. «On risque de mettre en difficulté un certain nombre de sociétés qui devront en plus de payer leurs fournisseurs, trouver des moyens pour financer les sanctions pécuniaires. Les banques et assureurs-crédit pourront aussi penser à créer une base commune d'entreprises défaillantes afin de soutenir cette loi et conseiller les entreprises dans le développement sain de leur chiffre d'affaires», conclut-il.