◆ La loi 49-95 a été amendée pour sanctionner les mauvais payeurs. ◆ Les amendes collectées alimenteront le fonds d'appui au financement de l'entrepreneuriat.
Par Y. Seddik
Le stock des crédits interentreprises privés ne cesse de grossir. Il culmine à 421 milliards de DH à fin 2019, soit à peu près le tiers du PIB marocain. Un chiffre amené encore à augmenter en 2020 sur fond de crise. Car durant cette année, les entreprises qui n'ont pas eu ou peu de marchés, se sont retrouvées en manque de liquidité et ainsi en grande difficulté pour régler leurs fournisseurs. D'ailleurs, les résultats de la 3ème édition du baromètre de la CGEM indiquent une hausse du délai de paiement moyen de 53 jours. L'analyse préliminaire de la 4ème édition, réalisée en partenariat avec Inforisk, elle, devrait confirmer cet allongement. Cela va sans dire que les retards de paiement sont avant tout une question de taille d'entreprises avant d'être une question de secteur. Les TPME en sont le souffre-douleur. Très attendu par le milieu d'affaires, l'amendement de la loi 49-95 relative aux délais de paiement, qui consiste notamment en l'introduction d'amendes à l'encontre des mauvais payeurs a été approuvé en début de semaine par les membres de l'Observatoire des délais de paiement (ODP). «Cette réunion est une occasion de faire le point sur l'évolution des délais de paiement durant les derniers mois, non seulement en ce qui concerne les paiements de l'Etat, des collectivités locales et des établissements et entreprises publics, mais surtout les délais de paiement entre entreprises», a indiqué le ministre de l'Economie, des Finances et de la Réforme de l'Administration, Mohamed Benchaâboun, qui présidait les travaux de la réunion. Et d'ajouter que «l'ensemble des équipes de l'Observatoire se sont mises d'accord sur l'amendement de la loi 49-95, ce qui va permettre de pénaliser les sociétés dont les délais de paiement dépassent les durées réglementaires». Secteur public, le bon élève La configuration est tout autre dans le secteur public depuis que le discours du Roi en août 2018, adressé aux administrations publiques et aux collectivités territoriales, les a incitées à s'acquitter de leur dû vis-àvis des entreprises. Notons que les délais de paiement moyens déclarés par les EEP sont passés sous 40 jours en décembre 2020. «Nous sommes passés de 60 jours à 40 jours aujourd'hui», s'est félicité le ministre, qui a indiqué qu'il y a tout de même des efforts à déployer, notamment en ce qui concerne la maîtrise de la zone grise, la partie du temps qui s'écoule entre le moment où le travail est fait et la prestation attestée. «En revanche, pour ce qui concerne les délais de paiement entre entreprises, ils se sont détériorés du fait de la conjoncture actuelle liée à la Covid-19», a-t-il relevé, ajoutant que cette situation a fait que l'ensemble des membres de l'Observatoire se sont mis d'accord sur l'amendement de la loi 49-95. «Nous espérons que cela va permettre de réduire ces délais», a-t-il poursuivi, notant que les montants qui seront collectés dans ce sens serviraient uniquement à l'appui de l'entrepreneuriat dans notre pays. Les mauvais payeurs bientôt mis à nu De son côté, le président de la CGEM, Chakib Alj, a relevé que l'amendement de cette loi est de bon augure car «elle prend en considération un certain nombre de points que nous avons portés dans cette instance». Il a cité dans ce sens l'introduction de l'amende pécuniaire et le fait que le produit de ces amendes serve le fonds d'appui au financement de l'entrepreneuriat, ainsi que la mise en place d'une instance de contrôle du respect des dispositions de la Loi. Alj a également noté que les délais de paiement constituent une problématique majeure pour les TPME notamment, et qui s'est fortement accentuée avec la crise de la Covid-19, mettant l'accent sur l'urgence de mettre en place des solutions rapides et concrètes. Il s'agit, selon lui, d'agir en amont du processus de facturation et d'introduire de manière progressive le dépôt électronique des factures au niveau des EEP et d'éliminer la double peine pour éviter aux entreprises de payer un impôt sur un produit qu'ils n'avaient pas encaissé. Alj a enfin proposé d'insérer dans le rapport annuel de l'Observatoire la liste des sociétés dont les comptes annuels affichent des délais dépassant les délais légaux.