Dans ses sorties pour stigmatiser les actions de Nicolas Sarkozy, Ségolène Royal cherche à se positionner sur un plan politique et symbolique comme l'alternative potentielle à Nicolas Sarkozy pour les échéances à venir. Dans une logique politique normale, les déboires de Nicolas Sarkozy, avec la baisse vertigineuse de sa cote de popularité et de son indice de crédibilité, auraient pu profiter pleinement à son opposition. Personne n'aurait rien eu à redire si les études d'opinion montraient un report d'affection et d'estime vers le plus grand parti d'opposition, le parti socialiste que dirige dans les faits François Hollande et dont le symbole le plus médiatique demeure la finaliste de la présidentielle Ségolène Royal. Or si quelques sondages et analyses politiques se hasardent à anticiper une débâcle de l'actuelle majorité présidentielle au prochain scrutin municipal, rares sont ceux qui voient déferler une vague rose sur le pays. Bien au contraire, même les socialistes, sans doute mus par une sourde angoisse du mauvais œil, s'empressent de dresser un argumentaire de justification comme le fait François Hollande dans une interview parue mercredi dans «Le Parisien» : «A force de laisser claironner une victoire les 9 et 16 mars, je vois bien que si elle n'est pas aussi ample que prévu, Nicolas Sarkozy arrivera à démontrer qu'au lieu de la grosse claque qui lui était promise, c'est une douce caresse qui lui aura été administrée par les Français». Depuis quelques jours déjà, la première dame socialiste Ségolène Royal tente de labourer le terrain des municipales avec ce mot d'ordre : il est impératif de transformer cette consultation en vote d'avertissement et de sanction pour les choix contestés du président de la République, avec ses explications : «L'enjeu dans les collectivités territoriales, c'est d'amortir le choc que la mauvaise politique de Nicolas Sarkozy fait subir au pays, en particulier la vie chère, la précarité qui augmente, les salaires qui baissent, les impôts nouveau et la dégradation de l'accès aux soins». Auparavant avec des accents qui fleurent bon la campagne électorale, Ségolène Royal avait tenté d'exister dans la symphonie des multiples oppositions à Nicolas Sarkozy avec une tonalité dramatique particulière sur le pouvoir d'achat des Français : «Je vois beaucoup de personnes âgées qui ne font plus qu'un repas par jour, les pâtes ont augmenté de 40%, (…) Il faudrait que Nicolas Sarkozy reprenne contact avec la réalité de la vie quotidienne, il y a une profonde inquiétude, une colère, une angoisse». Quelques jours plutôt, dans une tribune publiée par le Journal «Le Monde», Ségolène Royal annonce ouvertement le grand soir : «Le choc de confiance promis a laissé place à un choc de défiance, qui dégénère aujourd'hui en vent de révolte (…) Et si rien n'est fait pour construire la confiance, les injustices criantes déboucheront sur une violence ouverte». Dans ses nombreuses sorties pour stigmatiser les actions de Nicolas Sarkozy, Ségolène Royal cherche manifestement à se positionner, sur un plan politique et symbolique comme l'alternative potentielle à Nicolas Sarkozy pour les échéances à venir. Elle profite de la consultation municipales pour rendre sa voix plus audible et plus porteuse. Alors qu'elle s'apprêtait tranquillement et méthodiquement à partir à la conquête du Parti socialiste après le départ de son ex compagnon, François Hollande, du premier secrétariat, plusieurs facteurs l'ont obligé à revoir son agenda et accélérer le rythme de sa démarche. D'où cette tonalité critique extrêmement violente à l'encontre de Nicolas Sarkozy. Parmi ses facteurs , se trouve la fin précoce de l'état de grâce de Nicolas Sarkozy. Le président de la République avait dévissé dans les sondages avec une rapidité qui a surpris même ses adversaires. Le second facteur est la riche variété des oppositions à Nicolas Sarkozy. De la sourde grogne de l'UMP que dirige Patrick Devedjian et Jean Pierre Raffarin, passant par l'impérissable rancune des centristes emmenés par François Bayrou jusqu'à la gauche plurielle qui contient des profils comme Olivier Besancenot ou Marie Georges Buffet, Ségolène Royal éprouve une difficulté manifeste à marquer son propre sillon. Le troisième facteur, et non des moindres, est la multiplicité des candidatures qui prétendent diriger le Parti socialiste, la plus fraiche étant celle d'un ancien proche de Ségolène Royal, Julien Dray. Cette multiplicité, loin de refléter la richesse du Parti socialiste, interroge directement le leadership naturel de Ségolène Royal.