La place de meilleur opposant à Sarkozy est actuellement fantasmée par de nombreux hommes politiques qui dépassent de loin les clivages traditionnels gauche droite. Dans le théâtre politique français, cette place de «meilleur opposant» à Nicolas Sarkozy est une des plus courues. Elle assure à son détenteur visibilité et prestige immédiat sans parler des reluisantes promesses d'avenir. L'occuper n'est pas tâche facile tant l'homme à qui il faut s'opposer est fort en communication et en séduction. Et pourtant c'est ce qui vient d'arriver à Ségolène Royal, l'ex-candidate socialiste aux derniers présidentielles. Cette vérité politique vient d'être confirmée par un sondage de l'institut Opinionway pour le Figaro et LCI. Ségolène Royal vient de détrôner, haut la main la place qu'occupait le jeune Oliver Besancenot, leader du NPA (Nouveau parti anticapitaliste). Le jeune facteur de Neuilly avait profité de l'intense séquence sociale que traverse l'économie française pour élaborer un discours et tisser une posture qui le met en opposition frontale avec Nicolas Sarkozy. Cette place de «meilleur opposant» à Nicolas Sarkozy est actuellement fantasmée par de nombreux hommes politiques qui dépassent de loin les clivages traditionnels gauche droite. De François Bayrou, le patron du MoDem dont la troisième place aux dernières présidentielles lui donne encore des vapeurs de revanche, à Dominique de Villepin en guerre fratricide ouverte contre Nicolas Sarkozy, accusé de lui avoir subtilisé son héritage chiraquien, passant par Martine Aubry qui, en prenant la direction du PS, estime que la positon de challenger de Nicolas Sarkozy lui revient naturellement. Tous les ingrédients étaient donc réunis pour qu'au moins un de ces personnalités décroche cette palme. C'était sans compter avec la rage de vengeance développée par Ségolène Royal contre les siens qui n'ont pas montré un effort de solidarité et contre Nicolas Sarkozy qui l'a battue. Ségolène Royal était donc restée sur ce registre de challenger de Nicolas Sarkozy. Souvent pour la moquer , les porte-flingues de l'UMP s'interrogent à haute voix devant les journalistes : «Y a-t-il quelqu'un pour dire à Ségolène Royal qu'elle a perdu la présidentielle ?» Ségolène Royal avait ciselé sa posture. Les phrases choc qu'elle jette aux journalistes ne sont pas du même tonneau que sa gaffe linguistique chinoise sur la «Bravitude». Quand au plus fort de la crise guadeloupéenne, elle lance cette harangue quasi insurrectionnelle : «quand les parents n'arrivent plus à donner à manger à leurs enfants, ça finit mal. Souvenons-nous de la Révolution française», elle sait dans quel registre elle se positionne. Et quand les salariés licenciés élèvent «la séquestration» des patrons au rang de méthode d'expression sociale, Ségolène Royal donne l'illusion d'être en harmonie avec la motivation profonde : «Les salariés doivent forcer le barrage de l'injustice absolue». Son «pardon» africain, présenté comme un des coups politiques les plus durs portés à Nicolas Sarkozy, a fini par finaliser son image de première opposante au président de la République. Mais signe qu'on peut occuper cette place très enviée et être toujours contestée dans sa propre famille, les prises de postion de deux valeurs sûres de la gauche socialiste. Le premier est Pierre Moscovici qui, brisant le consensus socialiste sur cette question, a planté un coup de pied de l'âne dans le dos de Ségolène Royal. Pierre Moscovici s'est distingué par cette phrase : «Ségolène Royal a raison sur la critique du discours de Nicolas Sarkozy (mais) je suis plus réservé sur le fait de demander pardon au nom de la France (…) Il n'y a qu'une personne qui peut s'exprimer au nom de la France, c'est Nicolas Sarkozy, il n'y a qu'une personne qui peut demander pardon pour des propos maladroits -qui sont les siens d'ailleurs- c'est Nicolas Sarkozy. Il n'y a pas de contre président en France». L'autre socialiste qui tient à prendre ses distances avec Ségolène Royal est son ancien bras-droit, le député-maire d'Evry, Manuel Valls. Il lui lance ce défi: «aujourd'hui, le PS doit être incarné par une nouvelle génération qui porte d'autres idées, d'autres pratiques. Je n'ai plus l'âge d'être l'élève d'un «sage Actif», quel qu'il soit. En 2012, c'est cette génération qui doit incarner le changement et le renouvellement».