L'Association de lutte contre le sida (ALCS) dénonce l'amplification du phénomène des guérisseurs et appelle le ministère de la Santé et l'Ordre des médecins à réagir. Le guérisseur de Skhirat ne fait pas de miracles auprès des associations. C'est même le contraire qu'il provoque au sein de l'Association de lutte contre le sida qui s'insurge contre le « charlatanisme » dans un communiqué publié mercredi. L'ALCS y dénonce fermement le « tapage médiatique de ces derniers jours avec l'affaire de Chrif El Mekki ». Cet homme, qui se dit doté de pouvoirs extraordinaires, prétend guérir toutes les maladies par une poignée de main et une eau qu'il prend le soin de «bénir» à sa manière. En quelques jours, l'adresse de ce mystérieux El Mekki s'est transformée en un lieu de pèlerinage pour des milliers de patients venant de toutes les régions du Maroc et même de l'étranger. L'affluence que connaissent ces pratiques a fini par attiser la colère des professionnels de la médecine et les militants associatifs. «C'est choquant le silence des officiels ! Nous attendons que le ministère de la Santé et l'Ordre des médecins prennent position contre les guérisseurs, car il n'y a pas que celui de Skhirat», déclare à ALM le Pr. Hakima Himmich, présidente de l'ALCS. Une réaction pour mettre un terme à l'ignorance, éviter le pire aux malades chroniques, c'est ce que revendique cette association. Les autorités publiques devraient, selon cette dernière, au moins publier un communiqué à ce sujet : «Le ministère de la Santé doit réfléchir au moyen de mettre de l'ordre au sein des guérisseurs et du secteur de la médecine parallèle en général», estime le Pr. Himmich faisant allusion à plusieurs expériences menées dans de nombreux pays africains. Parmi ces expériences que le Maroc est convié à suivre, cette spécialiste cite la formation des guérisseurs en les sensibilisant sur le danger que cela représente d'imposer aux malades de prendre des produits pouvant aggraver leur cas. La présidente de l'ALCS tient de même à préciser que jusqu'à ce jour, il n'y a pas de traitement permettant de venir à bout du VIH de façon définitive. Seuls les médicaments antirétroviraux permettent d'améliorer l'état de santé des personnes affectées en ralentissant la multiplication du virus. En somme, pour cette militante contre le sida, «un guérisseur qui prétend guérir le sida est un charlatan qu'il faut dénoncer». L'ALCS lance donc un appel aux citoyens de ne pas se faire prendre dans des pièges qui pourraient leur coûter cher. Et c'est d'ailleurs le cas pour les personnes atteintes du sida. «Une interruption du traitement ne serait-ce que 48 heures représente un gros risque pour une personne qui suit un traitement à base d'antirétroviraux», insiste le Pr. Himmich. Quelles sont les conséquences ? «Arrêter le traitement ou ne pas respecter les prises facilite l'apparition d'une résistance et cela contraint le malade à changer de traitement. Pour un malade du sida, il doit passer au traitement de 2ème ligne qui coûte 12 fois plus cher et cela pose un grave problème», réponde le Dr. Othman Mellouk qui représente l'ALCS à Marrakech. Pourtant, l'ignorance fait que les malades du sida essaient de tenter « une dernière chance » en recourant aux guérisseurs qu'accuse clairement l'ALCS d'être responsables d'une pratique «criminelle» dès qu'ils poussent leurs clients à arrêter leur traitement. C'est pourquoi cette association s'est décidée à mettre l'accent sur les faux espoirs que suscite la communication autour de ce phénomène de «charlatans». «J'espère que d'autres associations suivront notre mouvement en dénonçant ces guérisseurs qui menacent la vie des malades», souligne le Dr. Mellouk. Pour une maladie chronique et des pathologies très graves, choisir un guérisseur signifie tout simplement se condamner soi-même à mort. Là, il n'y aura plus de seconde chance.