Les attentats de Casablanca semblent avoir révélé au monde l'ampleur de la menace terroriste. Depuis le 16 mai, les Etats accentuent leur coopération sécuritaire pour faire face à de nouvelles attaques jugées «imminentes». À partir d'aujourd'hui, le ministre français de l'Intérieur entame une journée maghrébine axée sur la lutte contre le terrorisme. Nicolas Sarkozy est attendu en Algérie, au Maroc et en Tunisie pour y rencontrer ses homologues afin de «renforcer la coopération opérationnelle dans la lutte contre le terrorisme». Le ministère français de l'Intérieur a indiqué mercredi qu'aucun élément ne permette de penser que notre pays soit actuellement l'objet d'un projet précis. Le niveau de la menace terroriste dans le monde, encore confirmée par les récents attentats de Casablanca et de Riyad, exige une actualisation des modalités de la coopération entre les pays». M. Sarkozy vient d'ailleurs de participer à une rencontre sur ce thème en Espagne. Lundi et mardi, lui et ses homologues espagnols, italien, britannique et allemand ont convenu d'analyser les attentats survenus le 16 mai à Casablanca afin d'en tirer des conclusions pour leur propre système sécuritaire. Les travaux de cette première réunion ont aussi «conduit le ministre de l'Intérieur à convenir avec chacun de ses collègues algérien, marocain et tunisien de la nécessité d'une réunion de travail dans les meilleurs délais», précisait le communiqué parisien. Après les attaques-suicide de Riyad, le 12 mai, et de la métropole marocaine, nombreux sont les pays qui ont renforcé leurs mesures en matière de lutte contre le terrorisme. La menace est depuis largement prise au sérieux par la communauté internationale, à commencer par les Etats-Unis et l'Arabie saoudite. Mercredi l'ambassadeur britannique dans le Royaume wahhabite a même estimé que les attaques futures seraient d'un «genre complètement nouveau». Interrogé par la BBC, Derek Plumbly a expliqué que les menaces actuelles représentaient «un défi d'une échelle d'action différente». «Ce qui semble apparaître, d'après les informations du ministère de l'Intérieur, c'est un lien qui renvoie à Al-Qaïda», a-t-il déclaré, confirmant la préparation d'attaques «imminentes». Le Royaume-Uni, le Canada, l'Allemagne et les Etats-Unis ont fermé mercredi toutes leurs représentations diplomatiques en Arabie saoudite jusqu'à nouvel ordre par crainte d'être la cible de nouvelles bombes humaines. Des kamikazes pour lesquels, à Casablanca comme à Riyad, aucun lien n'a pourtant jusque-là été formellement établi avec Al-Qaïda. Mercredi, dans un entretien au journal koweïtien Al-Siyassah, le Prince héritier Abdallah ben Abdel Aziz a lui même expliqué que son pays ne détenait «pas d'élément concret prouvant qu'Al-Qaïda est responsable des attentats ayant fait 34 morts» il y a dix jours. «Quelles que soient les racines de l'idéologie trompeuse» qui a poussé les auteurs de ces attentats à agir, elle « a induit en erreur des jeunes en leur promettant le paradis après avoir assassiné des innocents», a ajouté le prince, qualifiant ces attaques d'«acte diabolique, sans rapport avec l'islam». L'Arabie saoudite n'est cependant pas la seule cible potentielle de la nébuleuse terroriste emmenée -ou non- par les fidèles de Ben Laden. Le Kenya et une bonne partie des pays de l'Afrique de l'Est sont depuis plusieurs jours des destinations déconseillées. Mercredi, la Belgique a à son tour averti ses ressortissants que le «risque d'attentats visant des objectifs et des intérêts occidentaux» était accru à Nairobi et d'autres villes kenyanes. L'Egypte -hantée par l'attentat islamiste de Louksor qui avait tué 62 personnes dont 58 touristes en 1997- a elle aussi récemment renforcé la sécurité dans les quartiers diplomatiques, résidentiels et touristiques. D'importants cordons de sécurité ont notamment été placés autour des ambassades des Etats-Unis et de Grande-Bretagne. Des rues ont été bouclées, les contrôles de véhicules multipliés sur les grands sites touristiques et dans les grands hôtels. Quant aux Etats-Unis, sur le pied de guerre partout dans le monde, ils ont élevé mardi leur niveau d'alerte terroriste de «jaune» (élevé) à «orange» (très élevé). Le secrétaire à la sécurité intérieure, Tom Ridge, a expliqué que la principale menace venait toujours d'Al-Qaïda et de ses sympathisants, mais que des organisations armées anti-américaines et autres groupes extrémistes régionaux pouvaient aussi être dangereux. Aux attentats spectaculaires du 11 septembre pourraient succéder, craint-on à Washington, des attaques urbaines comme celles de Casablanca.