Le rapport annuel 2004 du Programme des Nations unies pour le développement 2003 (PNUD), consacré au développement humain dans le monde arabe, a été ajourné. Les auteurs du rapport crient à la censure, fustigeant des pressions américaines et arabes. L'information a suscité une véritable polémique dans les milieux internationaux. Le 3ème rapport annuel 2004 du Programme de Nations unies pour le Développement 2003 (PNUD), consacré au développement humain dans le monde arabe a été mis à l'index. Les auteurs de ce document affirment que l'Onu a renoncé à publier ce rapport sous la pression des Etats-Unis et de l'Egypte. Pour rappel, le précédent rapport 2003 du PNUD concacré au même sujet avait été rédigé par une quarantaine de chercheurs arabes, parmi lesquels le philosophe marocain Mohamed Abd El Jabri. Intitulé «Par des Arabes, à l'intention des Arabes», ce rapport est un document accablant sur le degré d'inaptitude du monde arabe dans le domaine des connaissances et de transmission du savoir. Dans tous les domaines, les pays arabes sont à la traîne. Dans le domaine des nouvelles technologies, il existe 18 ordinateurs pour 1000 habitants dans les 22 pays de la Ligue arabe. Alors que la moyenne mondiale est de 78,3 pour 1000. Et seuls, 1,6 % de leurs populations ont accès à Internet. Pareil pour les médias, où le monde arabe enregistre le taux le plus faible au monde de journaux, de radios et de télévisions par habitant. Côté culture, les livres publiés dans le monde arabe ne représentent que 1,1% de la production mondiale. Au niveau économique, le PIB des 22 pays est très légèrement supérieur à celui de l'Espagne en fin 1999 (559 milliards de dollars). La part du Maroc dans ce pourcentage est de 34,2 milliards de dollars. Reste que ce rapport particulièrement accablant pour les pays arabes été à la base des arguments américains pour imposer la vision américaine de la démocratie dans le Moyen-Orient. Cheval de bataille de Bush pour justifier l'invasion de l'Irak, ce rapport a clairement identifié les problèmes des pays arabes. Inévitablement, le texte dérangeait les régimes de la région d'autant plus qu'il a été rédigé par des intellectuels arabes. Fait bizarre, l'Amérique et les régimes arabes se sont mobilisés cette fois-ci pour censurer le rapport 2004. pourquoi ? Les rédacteurs du document ont affirmé dans divers journaux internationaux avoir subi des pressions de Washington, qui reproche au rapport ses critiques de l'occupation de l'Irak par les troupes américaines et des pratiques israéliennes dans les territoires palestiniens. Pis, les Etats-Unis auraient même menacé de retirer leur financement au Pnud si le rapport était publié. L'Egypte, de son côté, a émis des réserves auprès des Nations unies à New York et demandé la reformulation de la partie concernant le pouvoir héréditaire en Egypte, ainsi que celles concernant la liberté d'organisation de la société civile, y compris la création de partis politiques, relèvent les rédacteurs du rapport. Outre le gouvernement égyptien, d'autres pays arabes, notamment ceux du Golfe, ont aussi exprimé leur opposition. Les Américains ainsi que l'ONU ont nié de telles pressions, mais le Pnud a bien fait savoir que «tout rapport publié au nom du Pnud doit appliquer les critères d'impartialité qui sont exigés d'une agence onusienne». Cela se traduit par un projet du Pnud qui étudie depuis quelques temps la possibilité d'aider à la création d'un nouveau centre indépendant, basé dans la région du Moyen-Orient qui pourrait rédiger, de façon «indépendante». Un communiqué du Pnud précise que cette démarche «pourrait garantir une totale liberté aux auteurs (du rapport) afin qu'ils exposent leur point de vue et la série des rapports sera aussitôt perçue comme étant la voix de la société arabe civile ». En décodé, cela veut dire que l'ONU retire sa caution sur le document. Ni censure, ni approbation, mais la logique politicienne a pris le dessus. Attitude convenable pour nous les arabes.