Deux sœurs étaient seules dans leur villa à Témara. Tout à coup, elles sont surprises par un jeune armé d'un grand couteau. Il enferme la cadette dans la salle de bains et viole l'aînée. Il est 15h passées d'un jour de la troisième semaine du mois d'octobre 2002. La salle d'audience de la Chambre criminelle près la Cour d'appel de Rabat est archicomble. Quand le président de la Cour appelle Abderrahim, un jeune d'une vingtaine d'années, celui-ci se lève du banc des accusés et avance quelques pas vers le box. Il ne tourne sa tête ni à gauche ni à droite, ses yeux fixent le juge. Il semble qu'il tient son équilibre comme s'il était chez lui. Deux belles filles accompagnées d'une femme, la quarantaine, avancent également vers le box. Elles s'arrêtent quelques centimètres avant de l'atteindre. Elles sont deux sœurs; l'aînée a dix-sept ans et la cadette en a treize. La femme est leur mère. Le juge leur demande d'avancer un peu plus. Contrairement à la femme, les deux filles restent collées à leur place, elles hésitent à avancer. Pourquoi ? Elles seules le savent. Le président de la Cour n'insiste pas et leur demande de sortir hors de la salle d'audience avant de les appeler à tour de rôle. Abderrahim tient toujours son calme. Il fait semblant comme s'il est seul dans cette salle avec les juges. «Connais-tu les deux filles qui viennent de quitter la salle d'audience ?», lui demande le président de la Cour. «Non, non, je ne les connais pas…», répond-il. «Elles t'accusent de séquestration et viol…». Abderrahim baisse sa tête, puis la relève pour la hocher en signe de non avant de prononcer : «Non, je ne les ai jamais vues…». Le juge appelle l'aînée qui entre à pas lents. Quand elle arrive devant la cour, le président lui demande : «Connais-tu cet homme ?». «Je ne le connaissais pas…mais je l'ai vu cet après-midi, lorsqu'il a ouvert par effraction la porte de notre villa à Témara et y est entré pour...». Ses paroles cèdent la place à ses larmes. Elle n'a pu les retenir pour poursuivre son témoignage. Le juge tente de la calmer. Mais en vain. Il lui demande de s'asseoir pour quelques secondes. Elle retourne à sa place, se calme et se lève pour reprendre son témoignage : «Nous étions, moi et ma sœur, en train de voir la télévision quand cet homme nous a surprises…Il était armé d'un grand couteau…». Abderrahim ne manifeste aucun sentiment, il se tient toujours calme et fait semblant que son histoire ne le concerne pas. Elle continue à raconter et ses larmes ne cessent de couler : «Il nous a menacées de nous tuer si l'une de nous ose crier ou demander secours… Il a demandé à ma sœur, la cadette, de s'approcher de lui avant de la saisir par son bras et l'a entourée d'un drap et d'une corde, puis l'a conduite vers la salle de bains pour l'enfermer avant de revenir vers moi. Il m'a demandé de me dénuder… Quand j'ai refusé, il m'a giflée violemment au point que je suis tombée par terre…je me suis relevée et j'ai ôté mes vêtements sous la menace de son couteau…Il m'a violée à deux reprises avant de me ligoter et prendre la poudre d'escampette». «Ce sont des mensonges…», réplique Abderrahim, lorsque le juge lui demande de répondre à ces accusations. La cadette rentre à la salle d'audience, elle n'a pu regarder son bourreau. Elle se contente à bégayer: « Il m'a entouré d'un drap et d'une corde avant de me conduire vers la salle de bain… ». Abderrahim continue à nier. Seulement la Cour est convaincue des témoignages des deux victimes et l'a condamné à 10 ans de réclusion criminelle.