L'accord tripartite de Madrid était l'instrument juridique original et premier qui devait confirmer officiellement la souveraineté du Maroc sur le Sahara devant la communauté internationale et l'ONU. Cette vérité était pourtant claire comme de l'eau de roche, et bien gravée dans le texte de l'accord tripartite de Madrid. Dans une lettre datée du 18 août 2004, adressée au Secrétaire général des Nations Unies, le Président algérien avait qualifié le Maroc de «puissance occupante» au Sahara. Ces propos venaient avant une déclaration dans laquelle le même Bouteflika qualifiait l'affaire du Sahara de «conflit de ‘décolonisation inachevée'»1. Répliquons scientifiquement et sereinement aux prétentions du Président Bouteflika. 1 - Le Maroc, dans l'ex-«Sahara occidental», n'est pas une «puissance occupante». En voici les arguments essentiels : a) Le règlement de La Haye de 1907 et la IV ème convention de Genève du 12 août 1949 définissent le concept de «puissance occupante» comme «un Etat qui occupe partiellement ou totalement le territoire d'un autre Etat et qui bénéficie des compétences liées à la subsistance et à la sécurité de ses troupes» D'ailleurs, le gouvernement marocain vient de souligner que ce concept «n'a aucune relation avec la situation du Sahara où il n'y a eu ni guerre avec un autre Etat, ni occupation du territoire de ce dernier»2 droit international, conventionnel et coutumier et l'Affaire du Sahara de «conflit de ‘décolonisation inachevée'».3 En effet, il serait superflu de répéter que l'ex-«Sahara occidental» faisait partie intégrante du Royaume avant l'arrivée des Espagnols en 1884. Car cette région marocaine n'a jamais été constituée en Etat selon les conditions fixées par le Droit international. On le sait. Parce que les Espagnols, à leur débarquement, n'avaient pas trouvé un «terra nullius» (territoire sans maître) comme l'a affirmé la C.I.J. On le sait aussi. Par conséquent, il ne pouvait y avoir deux puissances occupantes (marocaine et espagnole) dans l'ex-«Sahara occidental» puisque l'Espagne l'avait bel et bien placé sous son autorité dans les conditions que nous connaissons. b) l'Etat algérien était le premier à reconnaître au Maroc cette réalité historique par la bouche même de ses hauts dirigeants. Rappelons les faits: Feu Houari Boumediene exprimait -disait-il - les «intentions de l'Algérie et de façon définitive» en ce qui concerne la question du «Sahara occidental» en déclarant devant le 7ème sommet de la ligue Arabe, (tenu à Rabat en octobre 1974) : «Nous sommes avec le Maroc et la Mauritanie pour la libération de chaque parcelle, non seulement du ‘Sahara occidental' ou le Sahara encore sous domination espagnole, mais également Sebta et Melilla et toutes les îles encore sous domination espagnole».4 Mieux encore, c'est l'actuel Président algérien Bouteflika qui, depuis trente ans, quand il était ministre des Affaires Etrangères, avait réitéré la même position de son pays neuf mois après ladite déclaration de son chef et quatre mois seulement avant la Marche Verte (4 juillet 1975). Voilà ce qu'il dit textuellement : «l'Algérie, tout en confirmant qu'elle n'a aucune visée sur le ‘Sahara occidental' qui ploie sous le joug de l'occupation espagnole, exprime sa parfaite satisfaction quant à l'entente qui s'est produite entre les deux pays frères le Maroc et la Mauritanie concernant la région, et qui vise à renforcer les fondements de la sécurité, de la tranquillité, de la stabilité et de la coopération. Une coopération qui assurera le bien général à cette partie vitale du Maghreb arabe (…)».5 No comment! 2 - L'Affaire du Sahara n'est pas un «conflit de ‘décolonisation inachevée'».6 Pourquoi ? Parce que, tout simplement, la 4ème commission de l'ONU (commission chargée des questions politiques et de la décolonisation) avait soutenu que «cette instance n'est plus habilitée à discuter de l'affaire du Sahara. Car celle-ci n'était plus depuis longtemps une affaire de décolonisation. Aujourd'hui, force est de constater que la question du Sahara a déjà vu son destin scellé d'une part par l'avis de la cour internationale de justice (CIJ) et d'autre part par les accords de Madrid. Lesquels ont définitivement mis fin à la colonisation du Sahara marocain».7 En effet, l'Espagne, mettait fin à l'exercice de son «pouvoir administrant» en quittant le Sahara marocain. Il relevait ainsi l'obstacle politico-militaire qui rendait impossible l'exercice de la souveraineté nationale marocaine sur le Sahara. L'accord tripartite de Madrid était l'instrument juridique original et premier qui devait confirmer officiellement cet événement devant la communauté internationale et l'ONU. Cette vérité était pourtant claire comme de l'eau de roche, et bien gravée dans le texte de l'accord tripartite de Madrid. Rappelons-le ci-dessous: «L'Espagne réaffirme sa décision – maintes fois réitérée devant les Nations Unies – de décoloniser le territoire du Sahara occidental en mettant fin aux responsabilité et aux pouvoirs qu'elle détient sur ce territoire en tant que «puissance administrante». (2ème paragraphe du texte de l'accord). Remarquons bien les deux derniers termes utilisés par le gouvernement espagnol : «puissance administrante. Comme pour confirmer la définition exacte de cette expression que nous venons d'évoquer en la distinguant de la notion de «souveraineté nationale». Cette formulation correspond donc au concept de «puissance occupante» que le Président Bouteflika utilise à l'égard du Maroc, puisque c'est l'Espagne elle-même qui se l'attribuait en quittant le Sahara. Par ailleurs, le paragraphe du texte de l'accord cité plus haut répond également au gouvernement algérien qui avait qualifié auparavant le Maroc de «puissance administrante» dans son mémorandum du 22 mai 2001 adressé au Secrétaire général de l'ONU. Car le Maroc, Etat anciennement occupé par l'Espagne dans son Sahara, ne peut pas être désigné comme «puissance administrante» ni «occupante» après avoir récupéré juridiquement son Sahara. D'autant plus que l'Espagne a bien avoué avoir été la « puissance administrante». Finalement, comment peut-on prétendre après tout cela que «la décolonisation de l'ex-‘Sahara occidental' n'est pas achevée» ? Faut-il souligner qu'aucune nation au monde n'est étrangère dans ses propres frontières, ni dans l'une de ses provinces authentiques. Aucun peuple indépendant sur terre ne peut se coloniser lui-même en gouvernant une partie de son territoire et de ses habitants, après les avoir libérés d'un colonisateur étranger qui les dominait par la force ou par un traité (imposé). Pourrait-on prétendre que l'Etat français occupe illégalement L'Alsace- Lorraine après les avoir récupérées de l'Allemagne depuis novembre 1944 ? Pourrait-on avancer que les Français, considérés dans leur globalité, colonisent aujourd'hui les Parisiens après les avoir affranchis de l'occupation nazie en août 1944 ? Ce Paris «outré (…) » comme disait le Général De Gaulle. Il est donc erroné de penser que l'Etat marocain occupe illégalement les provinces de Sakiet Al Hamra et Oued Addahab et que les Marocains colonisent aujourd'hui les Sahraouis après les avoir rendus indépendants de l'Espagne pacifiquement (par la Marche Verte) et juridiquement (par l'accord tripartite de Madrid). • Par Dr Issa Babana El Alaoui (Politologue, Ecrivain) 1- Le quotidien «Aujourd'hui Le Maroc » N° 737 du 27 septembre 2004, p. 5. 2- Mémorandum adressé par le Maroc au Secrétaire général de l'ONU, voir «l'Opinion» du 27 septembre 2004. 3- Le quotidien «Aujourd'hui Le Maroc» N° 737 du 27 septembre 2004, p. 5. 4- Mohamed Moatassime, «Pour la marocanité du Sahara, lettre à M. James Baker», Imprimerie Najah el jadida, Casablanca, 2003, p. 108 5- Voir publication marocaine arabophone annuelle : «Inebiate Oumma» N. 20, Rabat, 1975, imprimerie du Palais royal. 6- Le quotidien «Aujourd'hui Le Maroc » N° 737 du 27 septembre 2004, p. 5. 7- Le quotidien marocain «Libération» du 06 octobre 2000, p. 3.