Les attentats qui ont endeuillé l'Espagne au mois de mars n'ont pas encore livré leur dernier secret. De jour en jour, des vérités remontent à la surface, au gré des arrestations et des travaux de la Commission parlementaire chargée de l'enquête. Que de contradictions. La Commission parlementaire espagnole, qui cherche à déterminer la façon dont les attentats ont été orchestrés et à mettre la lumière sur la gestion de la crise par l'ancien gouvernement, est confrontée, ces derniers jours, à une série de témoignages contradictoires. Les deux principaux concernés ne sont autres que Pedro Diaz-Pintado et Santiago Cuadro, respectivement ancien directeur adjoint de la police et ancien commissaire de la sécurité urbaine de Madrid. La Commission s'active tant bien que mal à démêler l'écheveau entourant ce qui ne serait, selon les intéressés, qu'un simple problème de perception auditive. Mais la question revêt une importance cruciale quant à l'accusation qui vise l'ancien gouvernement et qui fait état de l'orientation de l'enquête, pour des raisons politiques, vers la piste basque. En effet, Pedro Diaz-Pintado s'était prononcé devant la commission sur la nature des explosifs utilisés par les terroristes, selon les indications que lui auraient fournies ses subordonnés, identifiée comme de la dynamite «Titadyne». L'explosif en question incriminait de façon irrévocable les séparatistes de l'ETA. Et puis, coup de théâtre, lors de l'audition de Santiago Cuadro. Ce dernier a déclaré devant la commission ne jamais avoir mentionné le mot «Titadyne». L'ex-commissaire a certifié avoir indiqué à son supérieur que les enquêteurs ont trouvé des traces de dynamite «probablement renforcée», soulignant sa certitude que le terme «Titadyne» n'est, à aucun moment, sorti de sa bouche lors de la communication téléphonique avec Pedro Diaz-Pintado. «J'en suis certain et personne ne pourra me faire changer d'avis», avait-il lancé à l'intention des parlementaires. Du coup, les propos contradictoires de deux hauts garants de la sécurité espagnole ont donné du fil à retordre aux seize membres de la commission. Comment trancher entre les déclarations de deux personnes supposées travailler en étroite collaboration et qui, en principe, devrait produire le même son de cloche. Désœuvrés, les parlementaires ont dû évoquer une simple erreur, afin d'expliquer la façon avec laquelle le mot «dynamite» puisse être interprété «Titadyne» à l'autre bout du fil. Les membres de la commission ont finalement attribué ce «malentendu» à une éventuelle qualité de communication défaillante, conjuguée au malaise occasionné par l'affolement qui régnait, ainsi qu'au facteur de la brusquerie. Cependant, la mention de « Titadyne » a pesé de tout son poids dans l'orientation de l'enquête. Qu'elle soit délibérée ou erronée, la thèse a aussitôt été exploitée à fond par le gouvernement sortant. Même après la découverte du fameux véhicule créditant la piste islamiste, l'on s'était borné à pointer du doigt les séparatistes basques de l'ETA. Élections obligent.