Samedi à 17 h à la corniche de Aïn Diab à Casablanca, presque deux heures avant la rupture du jeûne, plus d'une vingtaine de personnes font du footing et quelques réchauffements. Saïd, la trentaine, un habitué de sport, ne peut pas envisager d'arrêter ses entraînements pendant tout un mois. «Il est vrai qu'il est difficile de maintenir le rythme des entraînements durant le mois sacré du Ramadan. Personnellement, je fais deux fois par semaines, quelques exercices physiques dont la durée ne dépasse pas vingt minutes.», a déclaré ce jeune homme à ALM. De son côté, Amina et sa collègue de travail Fedoua, dans la quarantaine, font de la marche. Pour elles, il est hors de question de prendre du poids en ce mois où les habitudes alimentaires changent. «On sait que durant le Ramadan, nos habitudes alimentaires changent. Pour cela, j'estime qu'il faut bien gérer cette période particulière. J'ai même des copines qui sont au régime. Il ne faut pas craquer durant ces quelques jours de l'année», a formulé Fedoua qui ne s'abstient pas de faire du sport pendant le Ramadan. Alors que des gens sortent au plein air avant le f'tour pour exercer du sport, d'autres ne se sentent pas prêts à fournir de l'effort avant la rupture du jeûne. «Faire du sport avant le f'tour constitue pour moi un véritable défi que je ne pourrai jamais relever. Je ne veux même pas y penser. Mais je ne nie pas le fait qu'après la rupture du jeûne, je suis complètement disposée à suivre des cours d'éducation physique dans une salle de sport», renchérit une femme de foyer. Khaled Bembri, spécialiste en endocrinologie, diabétologie et nutrition a déclaré à ALM quant aux conditions de l'exercice du sport que : «Il faut d'abord distinguer les sportifs professionnels des amateurs. Ces derniers ne doivent pas dépasser une demi-heure de sport par jour, une heure avant la rupture du jeûne. Ils doivent respecter une alimentation équilibrée en qualité et en quantité, durant les trois repas en l'occurrence le f'tour, le dîner et le s'hour tout en diminuant les matières sucrées et grasses». Pour Docteur Bembri, beaucoup de médecins ont remarqué le changement positif qui a affecté les habitudes alimentaires des jeûneurs. Il n'est donc pas interdit de faire du sport et de jeûner. Selon une étude faite par le Docteur Jawad Nadim de la Fédération royale marocaine de football (FRMF), le danger est réel pour un sportif qui ne gère pas bien cette période. Tous les paramètres de l'environnement médical du football moderne sont concernés : préparation physique sur le terrain, préparation psychologique, alimentation et métabolisme, gestion de fluides et des électrolytes, chronobiologie. Pour Docteur Nadim, l'encadrant du sportif doit être compréhensif lors de l'établissement de l'emploi du temps des entraînements. Au cours de ce mois sacré, le nombre moyen de repas chez un joueur de football est de 2,2 par jour contre 3,5 en dehors de cette période avec des horaires complètement modifiés. La consommation des excitants (thé et café) est augmentée. La consommation en liquides (eau et boissons) est réduite, inférieure à trois verres par jour. L'équilibre alimentaire entre les lipides, les glucides et les protides n'est alors plus respecté. Pas en quantité, puisque les repas du soir sont très riches, mais en qualité, car ce que l'on y mange n'est pas très compatible avec l'alimentation. La fatigue associée au jeûne peut être aussi à l'origine de malaises et de pertes d'attention potentiellement dangereuses. Ce genre de risque est pratiquement nul si l'on se nourrit correctement. Des cas de mort subite ont été relevés au cours de ce mois sacré surtout au cours des périodes où la température est élevée (ce n'est pas tant la saison ou la période qui peut être éprouvante, mais la durée des journées associée à l'intensité de l'exercice physique). Les médecins du sport alertent depuis des années sur les risques qu'encourent les footballeurs professionnels, et plus généralement les sportifs de haut niveau, lorsqu'ils jeûnent et pratiquent leur activité sportive. «Nous rapportons tout le temps que le Ramadan et la compétition dans le sport de haut niveau (football en l'occurrence) sont incompatibles», formule Docteur Nadim. Par ailleurs, si le mois du Ramadan est synonyme de piété, de charité, de prière et de recueillement, quelques personnes ont du mal à supporter les journées ramadanesques. Ce mois entraîne une certaine nervosité chez une partie de jeûneurs. Selon Docteur, Bembri, «le jeûne a une dimension sociale et psychologique. L'état de nervosité qu'on remarque chez certaines personnes n'est pas dû au jeûne mais surtout au manque du sommeil», a formulé Docteur Bembri.