Une école de Gnaoua: Telle était la 5ème édition du festival qui a eu lieu à Essaouira du 20 au 23 août. Quelque neuf troupes de jeunes Gnaoua, apprentis-gnaouis issus de diverses régions du Royaume, étaient en lice pour les quatre prix du festival. Ces jeunes ont concouru sous l'oeil vigilant et l'oreille attentive des maâlems composant le jury, notamment Mahmoud Guinia, Abdesslam Alikan, Abdesslam Belghiti et Said El Bourki, quatre maîtres gnaouis dans la valeur n'est plus à prouver. Ainsi le prix du «Guembri» a été remporté par Mohammed Boumazzough d'Essaouira, Said Amchir d'Essaouira «prix meilleure voix», Abdesslam El Ouassif d'Agadir «Prestation scénique» et Salem Rahrouh de Tanger «T'bal». «Le festival des jeunes talents gnaouis a pour but d'assurer la relève et de pérenniser et d'enrichir le patrimoine gnaoui. Cet événement qui était local pendant les deux premières éditions, c'est-à-dire réservé aux troupes d'Essaouira, s'est élargi à d'autres régions du Royaume pour confronter les expériences et représenter les multiples écoles gnaouies du Royaume» a indiqué à ALM Abdesslam Alikan, directeur artistique du festival. Et d'ajouter : «outre l'encouragement des jeunes, les prix du festival ont pour but de créer un esprit d'émulation et d'offrir aux spectateurs des spectacles de qualité». Ainsi selon les organisateurs, cette édition a attiré plus de 160.000 personnes venues à Essaouira des différentes régions du Royaume pour découvrir une nouvelle génération des Gnaoua. Tout en concevant les spécificités ancestrales de la tradition gnaouie, cette nouvelle génération se distingue comme ses précédentes par son ouverture aux diverses influences et patrimoines culturels. Ainsi durant les trois soirées de la compétition, l'entrée en scène de la plupart des troupes de jeunes Gnaoua s'est déroulée sous les rythmes du «tbal» ( tanbour marocain) comme dans les «lila», quand les Gnaoua inaugurent la soirée de transe en demandant la miséricorde divine, et en priant et saluant le Prophète. Au niveau des chorégraphies, énergiques et innovants, sur scène les jeunes gnaouis se sont démarqués par l'introduction de pas et de figures issues du hip hop, ou encore par d'époustouflants sauts, influences des Gnaoua tachelhit. Par ailleurs d'autres troupes se sont distinguées par leur respect pur des traditions gnaouies de leur région. «Tagnaouit» (la tradition gnaouie), depuis qu'on l'a connue, s'est toujours distinguée par une attitude qui tend à l'ouverture et à la rencontre des autres cultures. À l'origine, elle n'était constituée que de dialectes africains et de «fraja» (spectacles chorégraphiques) d'esclaves. Puis elle s'est enrichie avec la rencontre de diverses confréries (Jilala, Derkaoua, Hmadcha…) et cultures, a souligné Abdesslam Alikan. Par ailleurs, la compétition du festival a été ponctuée par les concerts de huit groupes de la nouvelle tendance «world music», entre autres, Ganga Fusion, Paco Ghiwane, Haoussa, Darga, Zazz Band et Dar Dmana. La 5ème édition du festival qui est organisé conjointement par la province d'Essaouira, l'association Essaouira-Mogador, la délégation provinciale de la culture et la municipalité, a également été marquée par le vibrant hommage posthume rendu à Mahmoud Akharraz, une des figures emblématiques des Gnaoua, décédé récemment et auquel la cinquième édition de cette manifestation (20-23 août) a été dédié. «La singularité de Mahmoud Akharraz réside dans le fait qu'il n'était pas maâlem, dans le sens strict du terme, mais que son rôle était incontournable tant il était le fidèle garant de la mémoire collective gnaouie et de ses arcanes», ont fait remarquer les organisateurs lors d'une soirée d'hommage à Dar Souiri samedi 23 août. Et d'ajouter que «cette icône de la musique gnaouie jouissait du respect des adeptes de la confrérie». Elu moquadem, des années durant, de la zaouia Sidna Bilal, sa mission nécessitait présence, sens de la communication et connaissance profonde de l'univers des Gnaoua.