C'est finalement pour de bon, le ministre du tourisme, Lahcen Haddad a bien atterri dans la première station balnéaire du royaume. Pour ce nouveau responsable, il serait inconcevable de ne pas jeter l'ancre dans une destination sur laquelle reposent les espoirs de l'un des pôles névralgiques de l'économie nationale. La visite est donc très attendue par les professionnels et les opérateurs du secteur en vue d'insuffler de nouvelles bouffées d'oxygène pour un produit en phase d'essoufflement. Après le mot de préambule prononcé par Mohamed Boussaid, Wali de la région Souss Massa Drâa dans lequel il réitère la position de haute acuité de la destination, en quête d'une redynamisation soutenue du secteur, en tant que levier essentiel de l'essor global, le responsable gouvernemental, en premier lieu, mit l'accent sur la transition souple et édifiante que le Maroc a traversée au plan institutionnel, tout en soulignant que l'économie nationale n'est pas durement affectée par la crise mondiale. Cependant, reconnut-il, le tourisme est surtout caractérisé par une tendance baissière, en termes des nuitées et arrivées. Toutefois, ce secteur est d'une certaine immunité et d'une nette maturité, en dépit des indicateurs macro-économiques régressifs. Cette donne en fléchissement, nécessite une large mobilisation de la part de tous les intervenants du secteur pour assurer la relance escomptée. Reconsidérer le dispositif du plan Azur, s'aligner pleinement dans le sillage de la vision 2020, parfaire le module de la saisonnalité, relever de plus belle les taux d'arrivées et de nuitées, sont, à coup sûr, les leitmotivs du cheval de bataille du nouveau patron de la chose touristique. Ce dont souffre exactement le potentiel d'une destination telle Agadir. Une destination en perte de vitesse, en dépit des efforts consentis à plus d'un titre, étant donné les coups d'éclat que ne cesse de perpétrer le premier responsable de la région, ancien ministre de tourisme et connaisseur des rouages du domaine. Après la communication du ministre qui a succinctement mis en exergue la situation du secteur en corrélation avec l'état général, le président du Conseil Régional de Tourisme (CRT) d'Agadir, Abderrahim Oummani, a passé en revue l'état d'avancement des taux d'occupation, des arrivées et nuitées, au début, en notant que les derniers mois ont connu une régression due à des répercussions extérieures, des faiblesses de la capacité litière, de l'animation, du transport aérien…L'intervenant exhorte une synergie collective pour faire face à cette baisse, à travers un plan d'action concerté avec l'Office National Marocain de Tourisme (ONMT), avec plus de 689 millions de dhs sur trois ans qui généreraient plus de 4 milliards de dhs et 150 000 emplois. L'orateur a, par ailleurs, sollicité les décideurs centraux d'impliquer les professionnels dans la conception régionale au niveau des régions. Il est inconcevable que l'ONMT se charge de cette ébauche sans l'association des opérateurs régionaux. Il est bien évident que les crises qui secouent actuellement les marchés traditionnels comme la France et l'Espagne influent négativement sur nos rendements en termes de drainages, en plus des répercussions des perturbations occasionnées par les différentes révolutions arabes. Il n'en demeure pas moins vrai que l'attentat d'Argana et les soulèvements internes ont également contribué à cette décadence. Il va sans dire pareillement que cette délicate transition marquée par l'adoption de la Constitution, le déroulement de la première manche du processus électoral sous la nouvelle révision et la mise en place du nouveau gouvernement, tout cela dans la sérénité et la concorde, était pour le Maroc un pari majeur, relevé haut la main, à la différence de nombre de pays qui s'embourbent encore dans la dérive. La stabilité politique et la maitrise institutionnelle demeurent, de tout temps, un atout de haute acuité pour prétendre à des prouesses aux plans économique et social. Turbulences apaisées, il est bien loisible que le pays se focalise sur le renforcement de tous les acquis et l'acquisition d'autres générations de réformes. La rencontre du ministre du tourisme avec les intervenants du secteur s'insère, à fortiori, dans cette nouvelle dynamique ascendante. Un débat franc et pertinent a, en fait, caractérisé cette première entrevue, loin de la langue de bois et du non-dit stérile. Une opportunité idéale pour crever l'abcès et vomir les couleuvres pour l'intérêt d'une destination en perdition permanente. On a dit, en effet, à haute voix que la capacité hôtelière faisait atrocement défaut, depuis que, sur un peu plus de 25 000 lits existants présumés commercialisables, plus de la moitié est délabrée et se trouve continuellement dans un état piteux. On déplorera aussi non sans profonde amertume que l'aérien constitue un réel handicap, depuis que la compagnie nationale exerce une politique austère et réductionnelle à cet égard, d'autant plus qu'on a perdu pas moins de 17 vols. Des marchés porteurs tels que l'Allemagne, la Grande Bretagne et la Scandinavie exigent forcément les dessertes aériennes idoines et l'éventail d'accueil étendu. On aura évoqué également, l'ambiance « macabre » dans laquelle se trouve la destination d'Agadir en mal d'animation, susceptible d'accrocher les visiteurs, à longueur de journée. Enfermés dans des espèces de «ghettos », à cause de la formule « tout compris », les touristes ont le cafard. Mis à part, la promenade qui s'étend sur plus de cinq kilomètres sur la corniche et son prolongement littoral de la Marina ou encore le souk et la citadelle assez aménagés pour la circonstance, abordés non sans panache par le maire d'Agadir, Tarik Kabbage, les projets structurants de la ville n'offrent pas d'espaces de divertissement de qualité et de recoins d'attraction patrimoniale. Par ailleurs, on a beau reproduit des discours creux par rapport à l'arrière pays regorgeant de potentialités naturelles indéniables, il se trouve que l'aménagement de ces sites laisse à désirer, à l'image de la région d'Immouzzer, lamentablement abandonnée à son sort, malgré des ébauches timides en matière des sentiers pédestres, dans le cadre de la stratégie du Pays d'Accueil Touristique (PAT). Un grand coup de pouce est à prévoir, dans une optique de choix plus opérationnels, tout en maintenant les grandes orientations mises à contribution. A ce propos, il y a lieu de croire que l'Etat se doit, en ces moments de fléchissement, d'assurer le cap et rassurer les esprits, en injectant les fonds qu'il faut. L'idée de prendre la relève, après le désistement du privé dans pas mal de stations, n'est pas à écarter, d'autant plus que des pourvoyeurs tels la CDG ou encore le Fonds Marocain de Développement Touristique (FMDT) sont de nature à convaincre les investisseurs. Le cas des fonds de bailleurs golfiques qui mettent dernièrement le paquet dans des projets colossaux en est une parfaite illustration. A ce sujet, Irâa Sbai, vice-président du conseil préfectoral a soulevé aussi la problématique de la station balnéaire de Taghazout qui, durant plus d'une décennie, a été confiée, à maintes reprises, à des développeurs aménageurs étrangers, mais n'a jamais vu le jour, en dépit des tentatives toutes vouées à l'échec cuisant. Aujourd'hui, l'Etat est bien décidé de mettre un terme à cette série de désengagements déconcertants en tenant le taureau déchainé par les cornes. Son état d'avancement a été l'un des volets de discussion lors de la rencontre d'hier avec le ministre dont le dossier d'Agadir n'est certainement pas inconnu. Toutefois, il n'est pas sans savoir que les professionnels ont eu leur mot à dire et il n'est certainement pas sans savoir non plus qu'il est appelé à faire preuve d'écoute et de disponibilité. Qualités qui ne lui sont guère étrangères. Le potentiel d'Agadir non plus. Il est à rappeler que le tourisme est un secteur à haute valeur ajoutée. C'est le premier bailleur de fonds au niveau des recettes en devises. En 2011, il a drainé 6 milliards de dollars. Il est également le second contributeur au PIB après l'agriculture, avec 8 à 9%. C'est le deuxième employeur de la main d'œuvre et de cadres avec 470.000 emplois mis sur le marché. L'opérationnalisation de la Vision 2020, permettra, sans doute, la mise en fonction des projets structurants à travers le pays, surtout dans les destinations touristique de haute notoriété. Avec les stations balnéaires et les territoires touristiques, la création des ressources et des richesses est assurée. Une destination comme Agadir est censée rebondir à plein régime, avec une véritable politique de relance agressive, axée sur la consolidation des structures d'accueil et des activités parallèles (hôtellerie, restauration, agences de voyage, produits artisanaux…), la mise en marche des projets structurants d'accompagnement, la diversification du produit proposé, la mise en place de promotion et de marketing performants, la mise en fonction de l'animation continuelle pour réduire la saisonnalité…Pour ce faire, la mutualisation et la conjugaison des efforts de tous les intervenants, institutionnels, associatifs, professionnels, est une exigence impérative, car tourisme, de par son aspect sociétal, sa dimension universelles et sa nature fébrile et velléitaire, nécessite le parrainage de toutes les parties. C'est ce qu'attend sûrement le ministre du tourisme de sa première visite dans la capitale du Souss et ce qu'attendent les opérateurs d'Agadir du nouveau responsable de tutelle. Une synergie concertée. D'autres intervenants ont, tour à tour, posé des problèmes réels qui entravent l'expansion, notamment la qualité des prestations, l'investissement adéquat, l'inclusion des opérateurs sans exclusive, l'intégration du secteur dans une dynamique globale…