Comme nous l'avions annoncé il y a une semaine, c'est aujourd'hui officiel : les chibanis vivant en France et désireux de rentrer à leurs pays d'origine pour plus de six mois peuvent enfin le faire, sans être inquiétés sur leur droit à la pension de retraite. Hier, une conférence de presse à l'Assemblée nationale a en effet rendu public la mesure qui vient d'entrer en vigueur, le 1er juillet dernier. Une bataille de huit ans, jalonnées de réunions de travail avec élus et membres du gouvernement, viennent d'être récompensées. Portée par l'association de droit marocain CAP Sud MRE, la revendication des chibanis de rentrer au pays plus de six mois par ans sans perdre leur droit à la sécurité sociale en France en tant que retraités est enfin entendue. Tenant une conférence à ce sujet, mardi à l'Assemblée nationale de Paris, l'organisation s'est en effet félicitée d'une «victoire collective». Il s'agit ici du fruit des efforts de l'association, appuyés par une délégation de députés de la majorité, avec à leur tête Olivier Véran (LREM), rapporteur général de la commission des Affaires sociales, Mustapha Laabid (LREM), président du groupe d'amitié France-Maroc, Fiona Lazaar, vice-présidente du groupe de LREM à l'Assemblée nationale et Michèle de Vaucouleurs (MoDem). Levée d'une inégalité qui devenait une règle Cette action a donné lieu à un amendement adopté fin 2018 et à une décision de la ministre la Santé, Agnès Buzyn, d'effacer ce qui a longtemps constitué une inégalité entre salariés retraitée français et les bi-pensionnés étrangers en France. Depuis le 1er juillet dernier, «ces personnes peuvent désormais d'adresser au Centre National des Retraités de France à l'Etranger (CNAREFE) pour la prise en charge de leurs soins, via tout titre de séjour et sans condition de résidence», explique CAP Sud MRE dans un communiqué parvenu à Yabiladi. La prise en charge des frais de santé au titre de la protection universelle maladie aux retraités bi-pensionnés, ou aux cotisants pour au moins 15 ans en France, est de ce fait assurée aux anciens travailleurs ayant exercé en France, issus de pays hors-Communauté européenne et essentiellement d'Afrique. «Cet amendement a été complété par l'envoi d'une instruction officielle du ministère des Solidarités et de la anté aux caisses d'assurance maladie (CPAM), confirmant la prise en charge par la sécurité sociale des soins en France pour les retraités étrangers dits monopensionnés, ayant cotisé au moins 15 ans en France, et cela également sans condition de résidence et via tout titre de séjour», indique la même source. Une interprétation erronnée de la loi Confirmant que cette injustice a résulté d'une interprétation erronée de la loi, la ministre Agnès Buzyn a adressé un courrier aux députés et CAP Sud MRE dans ce sens, dont Yabiladi a obtenu copie. Extrait de la lettre de la ministre Agnès Buzyn Elle y explique aussi que ces dispositions légales «s'inscrivent en complément des dispositions applicables aux assurés dits 'monopensionnés' ayant cotisé au moins quinze ans en France, qui ont également droit à la prise en charge de leurs frais de santé pour leurs séjours temporaires en France en vertu de l'article L. 160-3 du code de la sécurité sociale». De ce fait, une circulaire ministérielle devra être transmise aux différentes agences et caisses d'assurance maladie prenant en charge ces chibanis, dans l'idée de rembourser leurs frais lors des séjours temporaires en France, du moment qu'ils sont reconnus pensionnés d'un régime français. En effet, les différentes agences n'ont pas rapidement pris connaissance de cette mesure. Contactée début juillet par Yabiladi, une agente du CNAREF a confirmé l'entrée en vigueur de cette mesure, précisant cependant que «les notes internes et les directives pour sa mise en œuvre ne sont pas encore parvenue aux différents services afin de fixer le traitement de l'ensemble des cas concernés». France : Les chibanis vivront leur retraite au pays sans être inquiétés sur leurs droits C'est désormais chose faite, puisque la circulaire de la ministre explique les différents cas de bénéficiaires de ces prestations, incluant les chibanis même lorsque ces derniers choisissent de ne plus vivre en France. «Avec Mustapha Laabid et Olivier Veran, nous avons porté le projet à bout de bras et il s'est concrétisé à travers plusieurs étapes pour aboutir dans la Loi de finances de la fin d'année à un amendement et à des engagements de la ministre», nous a précédemment expliqué Fiona Lazaar, qui nous confie avoir elle-même vécu cette situation dans son cercle familial. «Il s'agit de retraités, donc d'anciens salariés qui ont cotisé et qui ont donc des droits ; leur devoir était de contribuer à la fiscalité de la France et l'Etat leur doit les mêmes droits que tout autre travailleur en France, sans condition de nationalité», a précédemment souligné à Yabiladi Salem Fkire, président de CAP Sud MRE. Celui-ci tient à préciser que «le changement qui a abouti ne bénéficie pas seulement aux retraités Marocains mais à l'ensemble des anciens travailleurs immigrés, hors-communauté européenne ; c'est un combat mené par une association de droit marocain mais qui a été porté au nom de l'ensemble des étrangers qui ont été privés de prise en charge de la sécurité sociale, sous motif qu'ils n'ont plus vécu en France depuis plus de six mois». Article modifié le 2019/07/24 à 22h04