Le secteur informel, très développé au Maroc, ne s'arrête pas aux frontières. La contrebande transfrontalière entre les pays de résidence des MRE,particulièrement l'Espagne et l'Italie, nouveaux pays d'émigration, et le Maroc existe mais elle reste très difficile à cerner et à quantifier. Certains Marocains résidant à l'étranger profitent des facilités qui leur sont accordées, dans le cadre conventionnel, pour se livrer à la contrebande», témoigne le chef de service de la lutte contre la fraude et la contrebande de la Douane marocaine, Sefrioui Morchid Dafrallah. La contrebande, ou trabendisme, est pratiquée par une partie des Marocains résidant à l'étranger. Le phénomène, parce qu'informel, est difficile à quantifier. Géographie de la contrebande Pour le responsable de la Douane, «le pourcentage de MRE qui ait de la contrebande est faible». Ils proviennent le plus souvent d'«Italie et d'Espagne» où vivent de grandes communautés marocaines. La contrebande entre la France et le Maroc est beaucoup moins importante que celle qui se déroule entre la France et la Tunisie, mais surtout avec le voisin algérien, où le terme «trabendo» a été inventé. En plus de la France, les contrebandiers s'activent dans d'autres pays, notamment la Turquie. Istanbul est devenue «la ville phare du trabendo», notamment pour les Algériens et les Tunisiens. «Les Marocains y sont peu présents, sans doute parce qu'avec la proximité du marché espagnol, la contrebande depuis les «présides» de Sebta et Melilla, rend inutile le voyage sur Istanbul pour de nombreux Marocains», renseigne l'anthropologue Michel Péraldi, directeur de la recherche au CNRS, spécialiste des circuits commerciaux informels entre le Maghreb et l'Europe. Entre la France et le Maroc, le phénomène date des années 70,80. L'émigration en est, tout naturellement, le catalyseur : «si on parle de la période contemporaine, c'est bien sûr la migration qui a développé une forme moderne de circulation marchande, les migrants ramenant au Maroc, depuis les années 70, à la fois des cadeaux pour la famille et des produits qu'ils vendaient l'été dans les «jouteya» (une sorte de marché populaire), parfois même devant leur porte, les «jouteya migri», observe Michel Péraldi. Bijoux, or, pièces détachées, voitures d'occasion, matériel électroniques, produits électroménagers, cosmétiques, outillages métalliques et même des produits alimentaires figurent sur la liste des objets prisés par les trabendistes. Les marchés populaires, comme Derb Ghallef à Casablanca, sont les principales destinations de ces produits. 71,6% des unités informelles se situent dans la sphère urbaine, selon l'étude «Réalités de l'économie informelle», commanditée par la Confédération générale des entreprises du Maroc. Pas de chiffres La contrebande est une réalité, mais «c'est un phénomène difficile à mesurer» avoue le directeur général de la Douane marocaine, Zohair Chorfi, du fait qu'il relève surtout «de l'informel». Son impact est, à la fois «économique, sécuritaire et sanitaire», renchérit le chef de service de la lutte contre la fraude et la contrebande, Sefrioui Morchid Dafrallah. La Douane prend donc les devants, en procédant au profilage des produits sensibles. Elle tente aussi de réduire les droits d'importation en concertation avec les départements de tutelle. Plus ces droits sont élevés, plus le risque de contrebande augmente et renforce un secteur informel. Cet article a été précédemment publié dans Yabiladi Mag n°7