Attirer les compétences des MRE pour participer au développement du Maroc : c'est l'objectif du tout nouveau site www.maghribcom.gov.ma lancé hier par le ministre des MRE. Après l'échec de Fincom, ce site va-t-il réellement encourager les MRE à s'installer au pays ? Yabiladi a voulu savoir ce qu'en pensaient deux associations de MRE. C'est hier jeudi 31 janvier à Casablanca que le tout nouveau site internet www.maghribcom.gov.ma a été lancé par Abdellatif Mâazouz, ministre chargé des MRE. Objectif : faciliter l'implication des compétences des MRE pour contribuer au développement du Maroc. Le ministère précise dans son dossier de presse que ce nouveau site permet aussi d'«apporter un soutien intelligent aux intérêts du Maroc à l'étranger» et «participer au rayonnement du Maroc et véhiculer ses grandes valeurs». Wanted compétences pointues Le fonctionnement du site est simple : lorsqu'une institution marocaine publique ou privée recherche une compétence particulière ou pointue inexistante au Maroc, elle publiera une annonce sur le site. «Maghribcom vient répondre aux stratégies de développement sectorielles mises en place par le Maroc il y a quelques années. L'un des obstacles de ces stratégies est lié notamment au manque de compétences dans les différents secteurs» explique Abdellatif Maâzouz à l'Economiste dans son édition d'aujourd'hui. Le ministre donne un exemple de cas concrets dans lequel des compétences MRE seront requises : le pipeline lancé par l'OCP pour conduire les phosphates. Dans ce cas précis, l'OCP sera à la recherche de compétences en tuyauterie industrielle. Mais pas seulement. Tous les secteurs sont privilégiés : l'électronique, l'informatique, les sciences biologiques, l'environnement, les ressources humaines ou encore l'enseignement. Le temps des missions varie : cela peut aller d'une mission freelance à un CDI en passant par un CDD. Du déjà-vu Le lancement de ce nouveau site nous donne un sentiment de déjà vu qui n'est autre que Fincom, un autre site lancé en 2006 qui avait pour but de mobiliser les compétences marocaines. «Malheureusement, Fincom n'a pas été suivi avec toute la rigueur qu'il fallait. Il n'a pas été bien vulgarisé. Le public avait cru que le site était destiné seulement aux salariés expatriés à l'étranger», répond Abdellatif Maâzouz. Le Maroc gagnant, mais les MRE le sont-ils vraiment ? Le lancement de ce nouveau site est une initiative qui ne peut-être que saluée car elle permet de créer un lien et une passerelle entre le Maroc et sa diaspora. Elle envoie un signe positif aux MRE en leur disant que le Maroc a besoin d'eux pour permettre au pays d'avancer. Néanmoins, alors que ce site a pour objectif «d'apporter un soutien aux intérêts du Maroc», les intérêts des MRE, eux, seront-ils protégés derrière. C'est là que réside la grande question. Car il faut jouer carte sur table et ne pas être naïfs. Les MRE ne sont pas un menu à la carte dans lequel on pioche ce qu'il y a de meilleur en eux et qu'on délaisse ou abandonne par la suite lorsqu'ils rencontrent des problèmes une fois installés au Maroc. Salem Fkire, président de Cap Sud MRE accueille chaleureusement le lancement du site Maghribcom. «Néanmoins, quand on parle de compétences et de confiance économique, il faut aussi qu'il y ait une compétence judiciaire qui suive derrière», lance-t-il. Pour lui, l'un des gros chantiers sur lequel doit travailler le ministère des MRE est la justice immobilière. «Comment le Maroc peut-il attiré les jeunes MRE avec toutes les histoires d'injustice qu'on lit dans la presse comme celles des spoliations immobilières», se demande-t-il. Il cite notamment les affaires Friekh et Makcharrad dans lesquelles deux pères de famille sexagénaires sont décédés après s'être vu spolier leur terrain sur lequel ils voulaient construire une petite maison pour y passer une retraire tranquille. Sans oublier les centaines de familles MRE qui ont acheté un appartement dans les Jardins Moulouya à Saïdia, projet initié par Urbatlas filiale de GFM détenu à 50% par Addoha et 50% par Fadesa Martinsa et qui n'ont toujours pas été livrés aujourd'hui après plusieurs années d'attente. Mondialisation Du côté de Mohammed El Halfa port-parole d'Acia, lui aussi applaudit cette initiative. Lui, confie qu'il aimerait, par amour pour son pays d'origine, que son fils aîné, âgé aujourd'hui de 14 ans, mette un jour ses compétences à profit du Maroc. Cependant, il craint qu'avec la non-livraison de leur appartement à Saïdia, cela donne une mauvaise image du Maroc à son fils. «Tout partenariat est basé sur un procédé de gagnant-gagnant, mais je crains qu'avec ce site, il n'y ait qu'un seul gagnant, qui n'est autre que le Maroc des entreprises», explique-t-il. «Il faut que le gouvernement marocain comprenne que les MRE évoluent dans un contexte de mondialisation. Et cette mondialisation met la barre très haut. Les MRE ont le choix aujourd'hui de s'installer et de travailler où ils veulent. Si le Maroc veut que ces MRE viennent au Maroc, il faut établir un cadre de vie et leur donner des garanties derrière, notamment en matière de justice. Un MRE ne fonctionne pas comme un Marocain. C'est dommage et ça me fait mal de dire ça, mais c'est la réalité. Un Marocain lui n'a pas d'autre choix que de vivre au Maroc. Un MRE si», conclut-il.