Depuis le début de la guerre israélienne sur Gaza, l'Algérie a brillé par son absence. Obsédé par un retour des marches du Hirak de 2019, le pouvoir algérien à fermer les rues aux manifestations de solidarité avec la Palestine. En revanche au Maroc, plusieurs milliers de protestations ont eu lieu dans les villes marocaines. Le 1er janvier, l'Algérie a accédé officiellement au tour de table du Conseil de sécurité, en sa qualité de membre non-permanent pour la période 2024-2025. Dans une allocution prononcée lors d'une cérémonie organisée le même jour à New York, le représentant permanent de l'Algérie auprès des Nations unies, Amar Bendjamaa, a souligné que «la question palestinienne sera notre priorité absolue». Une précision faite alors que la guerre israélienne sur Gaza clotûrait son troisième mois. Cet engagement officiel à défendre la cause palestinienne s'est accompagné par l'accueil à Alger de figures du Hamas. En témoigne la réunion du 31 janvier, entre le président de la Chambre haute, Salah Goudjil, et Bassem Naïm, membre du bureau politique du Hamas. De son côté, le représentant de l'organisation palestinienne en Algérie, Youssef Hamdan, a multiplié les déclarations médiatiques. En revanche, c'est au niveau populaire que l'Algérie s'est montré absente. Les manifestations de condamnation de l'agression israélienne sont interdites par le pouvoir, relève le journaliste Lakhdar Benchiba. Obsédé par un retour des marches du Hirak de 2019, le pouvoir algérien a fermé les rues aux initiatives de solidarité avec Gaza. Une absence sur le terrain diplomatique aussi Contraints de se plier à ce diktat, les Algériens n'ont eu d'autre choix que de suivre les autres protestations organisées ailleurs, notamment au Maroc, un pays ayant pourtant établi des relations diplomatiques avec Israël, le 10 décembre 2020. Les médias algériens ne ratent, d'ailleurs, aucune contestation ou appels signés par la société civile ou des partis politiques (PJD et PPS), réclamant la rupture des liens avec Tel-Aviv et la fermeture du bureau de liaison israélien à Rabat, pour les relayer. La semaine dernière, Al Adl wal Ihsane a comptabilisé la tenue 1850 marches de soutien à la Palestine, du 7 octobre au 14 janvier. A ce nombre déjà important, il faut ajouter les nombreux rassemblements et sit-in organisés par d'autres organisations au Maroc. Si au niveau intérieur, l'Algérie s'est montrée aphone dans la dynamique mondiale de solidarité avec la Palestine, elle n'a guère brillé dans l'arène diplomatique pour défendre les Palestiniens, laissant ce rôle à l'Afrique du sud. C'est Pretoria qui a joué le rôle d'avocat des Palestiniens à la Cour Internationale de Justice (CIJ), déplore Benchiba. Pourtant, dans son discours prononcé le 7 novembre, le président Abdelmadjid Tebboune avait condamné «le silence mondial assourdissant» face à l'agression israélienne. Et d'appeler «tous les hommes libres du monde, les juristes arabes et les instances et organisations internationales des droits de l'homme à intenter une action judiciaire devant la Cour pénale internationale et les organisations internationales de défense des droits de l'homme contre l'entité israélienne». Après cet appel présidentiel, l'avocat du Polisario, Gilles Devers, s'est bien vu confier cette mission. La presse algérienne avait même annoncé que 600 avocats auraient rejoint le collectif conduit par le Français. Après quelques interviews et déclarations de Devers à des médias locaux et internationaux, cette initiative a été mise sous le boisseau. Depuis, l'appel de Tebboune a été jeté aux oubliettes. Au lendemain de la décision de la CIJ, du 26 janvier, relative à la plainte de l'Afrique du sud contre Israël, le ministère algérien des Affaires étrangères a indiqué que son pays «a pris connaissance avec intérêt du prononcé de la Cour Internationale de Justice à propos de la requête déposée par l'Afrique de Sud en relation avec la commission d'un crime de génocide à Gaza». En attendant, le peuple algérien qui s'est toujours montré solidaire des Palestiniens doit ronger son frein à défaut de pouvoir manifester dans la rue.