Jusqu'à il y a quelques mois, le PJD était donné largement gagnant aux prochaines élections législatives, programmées le 7 octobre prochain. Mais depuis l'arrivée d'Ilyas el Omari à la tête du PAM et son activisme débordant, en coulisses ou au grand jour, les ténors du parti d'Abdelilah semblent douter de leur victoire, et engagent la batille, sous le mot d'ordre « tahakkoum » (contrôle). Cette notion, difficilement traduisible, évoque une entreprise de contrôle de la scène politique, et le terme « asservissement » est souvent utilisé pour renforcer celui de « tahakkoum ». La répartition des tâches est bien effectuée entre les dirigeants du PJD, et même leurs alliés du PPS, principalement son secrétaire général Nabil Benabdallah. Que reproche-ton à Ilyas el Omari, et à son parti, sans jamais les nommer ? Vouloir orienter et diriger l'ensemble des intervenants politiques. En off, des personnalités du PJD et/ou du PPS nous ont expliqué que les choses se font sous la menace : « mener la vie dure à un maire », « exhumer un rapport accablant de gestion d'une collectivité locale », « menacer de contrôle fiscal »… Mais ces accusations restent sans preuve et lorsqu'on répond à nos interlocuteurs que leurs responsables au sein de leurs partis ne sont donc pas si intègres que cela, ils ne trouvent rien à redire. Aussi, nous avons Benkirane qui tire à boulets rouges sur Ilyas el Omari, l'accusant tour à tour de pratiques financières douteuses (« comment a-t-il pu réunir 65 millions de DH pour son groupe de presse ? »), d'être sorti du néant avant de briller au grand jour, d'être un parti surfait (« le PAM a les notables, les moyens financiers et l'influence, alors que nous, nous nous appuyons sur le peuple »), de procéder à des actions relevant du « Mounkar » (grande faute)… Le champion de la bataille à venir est sans nul doute Mohamed Yatim qui se lâche depuis plusieurs semaines à coups d'écrits publiés sur le site du PJD, et dénonçant systématiquement les faits et gestes d'el Omari, invariablement indiqué comme politicien dominateur. Dans une récente émission radio du même site, Yatim estime que « l'arrivée d'el Omari au grand jour est une bonne chose car la clarté révèle les microbes », puis, plus tard, il dit que « notre pays et notre système politique n'ont plus besoin des services nauséabonds de ce tahakkoum ». Et, à son tour, la députée PJD Nezha Louafi monte au créneau, pour s'en prendre à… Samira Sitaïl qu'elle a accusé d'être « la cheffe de file du tahakkoum, une femme à qui personne ne demande des comptes ». Il faudrait alors que Mme Louafi demande, elle, des comptes à Mustapha el Khalfi (ministre de la Communication) qui n'en demande pas à Samira Sitaïl alors même qu'il est son ministre de tutelle. Et puis arrive Nabil Benabdallah, qui se déclare déjà en campagne électorale et qui tire à boulets rouges sur Ilyas el Omari, l'accusant lui aussi de vouloir tout dominer et tout asservir, l'accusant aussi d'avoir accusé l'Etat de trucage des élections de 2011 en disant que « des instructions ont été données au PAM pour ne pas couvrir l'ensemble des circonscriptions » (ce qui, à dire vrai, est une déclaration malheureuse sur laquelle el Omari devrait s'expliquer). Benabdallah va jusqu'à dire qu'el Omari met en péril l'intégrité territoriale du pays en ayant explique que « la proposition d'autonomie de 2007 avait été précipitée ». Les troupes se mettent donc en place et, en l'absence de ripostes systématiques d'el Omari, le PJD et le PPS se lâchent… Mais le patron du PAM a une autre stratégie car, connaissant son déficit oratoire et tribunicien face à Benkirane, il rogne petit à petit, travaille en coulisses, agit sur l'opinion publique par des conférences et des rencontres multiples avec les médias, distille des petites phrases. La bataille promet donc, à défaut d'être passionnante, de se révéler saignante. Et cela ne fait que commencer. On notera cependant que si les attaques du PJD et du PPS contre el Omari sont personnelles et insultantes, le chef du PAM se garde bien de manquer de respect à son adversaire, préférant l'égratigner, poliment mais systématiquement. Nous y reviendrons.