Les conséquences de la crise financière internationale qui s'abat sur la plupart des pays européens, envoient des signaux d'alarmes en Espagne où les indicateurs économiques suscitent l'inquiétude sur l'avenir économique et même social de la péninsule ibérique. Par : Omar El Mrabet. L'économie espagnole, qui a subi un impact rapide de la crise sur tous les niveaux et entrée en récession depuis 2008, inquiète au plus haut point, notamment suite à la publication de plusieurs rapports européens mettant en lumière la faiblesse structurelle de l'économie du pays. Avertie par plusieurs institutions mondiales spécialisées, dont la Banque centrale européenne et le Fonds Monétaire international (FMI), l'Espagne, qui assure actuellement la présidence tournante de l'UE, semble perdre le chemin de la récupération économique en dépit des messages apaisants du gouvernement socialiste de José Luis Rodriguez Zapatero. +Un panorama sombre+. Le Produit Intérieur Brut (PIB) du pays a accusé un recul de 3,6 pc en 2009 par rapport à l'année précédente, ce qui représente la pire baisse des dernières décennies, alors que le chômage a franchi un nouveau cap alarmant. Le nombre de personnes sans-emploi dépasse la barre des 4,3 millions, soit un taux de 18,9 pc et la situation n'est pas à l'amélioration. Il s'agit du taux le plus élevé en Espagne depuis 1996, et parmi les pays du bloc européen, seule la Lettonie devance l'Espagne avec 22,8 pc. De son côté, le déficit public a atteint les 120.000 millions d'euros l'année dernière, soit 11,4 pc du PIB, dépassant ainsi les estimations du gouvernement, qui tablait sur un déficit de 100.000 millions d'euros (9,5 pc du PIB). Cette déviation est due à plusieurs facteurs, dont le déficit de 800 millions d'euros dans le système public des pensions, soit 0,8 pc du PIB, presque le double des spéculations initiales établies par l'exécutif. A leur tour, les comptes publics affichent aussi un déficit record de l'histoire récente de l'économie espagnole, qui est passée dans un laps de deux ans d'un excédent supérieur à 20.000 millions d'euros en 2006 et 2007 à un déficit se situant à presque le 12 pc de la richesse du pays. Et pour compléter le tableau, le pays est réduit à occuper le trentième rang en termes de compétitivité, devancé par presque la totalité des pays de l'Union européenne, et loin derrière des pays comme l'Irlande, la Chine, Taïwan, l'Estonie, la Malaisie, le Chili, l'Inde et la Corée du Sud. +L'hémorragie va-t-elle s'arrêter là?+. Pour l'année en cours, les spécialistes pronostiquent déjà une montée du taux de chômage pour atteindre le seuil de 20 pc: Au seul mois de janvier dernier, plus de 1250.000 chômeurs ont rejoint les rangs des sans-emploi. Et comme un malheur ne vient jamais seul, le Fonds Monétaire International (FMI) prévoit que l'Espagne restera en récession durant l'année 2010, avec un recul de 0,6 pc du PIB. Ainsi, l'économie espagnole sera la seule grande économie à rester en récession durant l'année en cours, même si la baisse de son PIB sera légèrement moins aigue que celle pronostiquée auparavant, selon les dernières prévisions du FMI. De son côte, l'exécutif espagnol prévoit un déficit dans les comptes publics de l'ordre de 8,1 pc de son PIB pour l'actuel exercice, largement en dessous de la limite fixée par le Pacte européen de stabilité (3 pc du PIB). +Optimisme en dépit de la grave situation+. En dépit des analyses et des chiffres inquiétants mentionnés auparavant, le gouvernement de Zapatero reste toujours optimiste et confiant quant à la prochaine reprise de l'économie de son pays. "L'Espagne est sur le point de sortir de la récession", compte tenu du PIB réalisé au 4ème trimestre de 2009, a indiqué Zapatero devant le Congrès des députés espagnol, tout en défendant la solvabilité de la dette publique du pays. Le chef de l'exécutif espagnol a rappelé que l'économie mondiale "traverse la crise la plus grave des 80 dernières années", ajoutant que son gouvernement œuvre "par tous ses moyens" pour sortir de cette situation. Pour sa part, la première vice-présidente du gouvernement, Maria Teresa Fernandez de la Vega, a assuré que l'exécutif se trouve sur la "voie correcte" pour faire face à la crise, ajoutant que toutes les mesures prises jusqu'à présent s'inscrivent dans le cadre d'une "stratégie bien ficelée". Le gouvernement, par la voix de son numéro deux, a voulu de cette manière faire entendre que l'exécutif refuse qu'on remette en question le potentiel, la crédibilité et la force de l'économie espagnole. +Réforme du marché du travail visant à réduire l'impact du chômage+. Donnant corps à cette stratégie, le gouvernement espagnol a approuvé un projet pour la réforme du marché du travail visant à réduire l'impact du taux de chômage, à travers d'une série de propositions afin de d'améliorer les conditions de l'emploi et de l'employabilité. Ce nouveau projet ambitionne d'aider à dépasser la crise économique et de renouveler l'actuel modèle productif de l'Espagne qui n'est plus "valable" pour l'avenir du pays, selon l'exécutif. Le projet porte sur un programme d'emploi destiné aux jeunes âgés entre 18 et 24 ans visant à répondre aux besoins de ceux d'entre eux qui ne sont pas titulaires de diplômes professionnels, et à procéder à une révision du système d'octroi des primes de rendement tendant à sa simplification. S'agissant du modèle d'embauche, le gouvernement espagnol propose la réduction de la journée de travail à l'instar du modèle allemand, d'accorder une attention particulière à la précarité de l'emploi et à l'extension de l'embauche à temps partiel stable. Le nouveau plan de l'exécutif espagnol comporte, en outre, un volet axé sur la formation à l'emploi et l'égalité entre les sexes dans le domaine du travail. Pour le volet du déficit public, le gouvernement espagnol a adopté un plan de soutenabilité des comptes publics prévoyant une réduction des dépenses publiques de l'ordre de 50 milliards d'euros entre les années 2010 et 2013. "L'objectif de cette décision est de situer le déficit public à 3 pc du PIB en 2013", selon la ministre espagnole de l'Economie et des Finances, Elena Salgado. Pour les spécialistes, les mesures prises par le gouvernement socialiste, devancé de 3,8 points dans les intentions de vote par le Parti Populaire (PP- principal parti d'opposition), ne seraient pas suffisantes pour l'exécutif pour contrôler la situation, bouleverser la donne et redorer son blason devant l'opinion publique espagnole.