Le vice-président américain Joe Biden s'est employé mardi à Tokyo à jouer les «démineurs» dans la crise qui ne cesse de s'envenimer entre le Japon et la Chine où il attendu mercredi. L'exercice est pour le moins délicat au moment où les Etats-Unis recentrent leur diplomatie sur l'Asie: Washington doit donner des gages sans faille de son soutien politique et militaire au Japon, son principal allié régional, sans pour autant froisser la puissante Chine avec laquelle les USA ont de gros intérêts politiques mais aussi économiques et financiers. Avant d'arriver au Japon, que Washington considère comme le socle de sa stratégie asiatique dite du «pivot» et où sont maintenus près de 50.000 soldats américains, Joe Biden a déclaré les Etats-Unis «profondément préoccupés» par la «zone d'identification aérienne» décrétée le 23 novembre par Pékin au-dessus de la mer de Chine orientale, décision qui a provoqué de vives tensions avec le Japon et ravivé la crainte d'un incident armé. «Nous restons profondément préoccupés par l'annonce de cette nouvelle zone d'identification aérienne de défense (ZAI)», avait-il confié au quotidien japonais Asahi Shimbun juste avant son départ pour Tokyo où il est arrivé lundi soir, première étape d'une tournée qui doit ensuite le conduire en Chine et en Corée du Sud. Engagement et alliance «Ce dernier incident prouve la nécessité d'un accord entre la Chine et le Japon pour établir un mécanisme de gestion des crises ainsi que des mesures permettant d'établir la confiance afin de faire baisser la tension» entre les deux pays, a-t-il poursuivi. Au Japon, «je veux réaffirmer la force de notre engagement et de notre alliance, ainsi que l'importance de s'abstenir de toute action qui pourrait saper la paix, la sécurité et la prospérité dans la région», a encore déclaré le vice-président américain. Début octobre, les chefs américains de la diplomatie et de la défense, John Kerry et Chuck Hagel, étaient déjà venus rassurer Tokyo sur la solidité de leur alliance militaire. John Kerry avait notamment rappelé que le traité de défense mutuelle américano-japonais s'appliquait aux îles Senkaku, le petit archipel inhabité de mer de Chine orientale au coeur des tensions sino-japonaises. Kerry avait aussi appelé «toutes les parties à ne s'engager dans aucune action unilatérale» qui remette en cause le statu quo: il n'a visiblement pas été entendu par Pékin. En Chine, selon un officiel américain, Joe Biden compte justement faire part des «inquiétudes» des Etats-Unis au sujet de la ZAI et «demander des éclaircissements». «Le Japon et les Etats-Unis partagent le point de vue que la ZAI (chinoise) est inacceptable», a affirmé mardi le porte-parole du gouvernement japonais Yoshihide Suga selon qui le mouvement des autorités chinoises est «extrêmement dangereux». L'instauration de la ZAI, exigeant que les appareils traversant la zone déposent leur plan de vol et s'identifient, a immédiatement fait monter la tension dans la région. Outre le Japon, qui campe sur la ligne de fermeté absolue du Premier ministre Shinzo Abe, la Corée du sud et l'île de Taïwan ont prévenu qu'elles n'entendaient pas s'y plier. Tokyo et Séoul y ont envoyé des avions militaires sans en informer les Chinois. Washington a pour sa part adressé un signal très clair à Pékin en envoyant deux bombardiers B-52 non armés traverser la zone. Pékin n'a toutefois pas ouvertement protesté, se contentant d'affirmer avoir suivi ce vol de bout en bout et préférant concentrer ses attaques sur le Japon voisin. Avant de rencontrer M. Abe mardi après-midi, M. Biden s'est entretenu avec le vice-Premier ministre Taro Aso, et a été reçu en audience par le Prince héritier Naruhito. Selon la Maison Blanche, il devait également aborder avec M. Abe le dossier du TPP. Les Etats-Unis, qui mènent les discussions, veulent arracher un accord d'ici à la fin de cette année pour ce partenariat de libre-échange trans-Pacifique qui regroupe 12 pays, dont le Japon depuis quelques mois, mais pas la Chine.