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Syrie : Malgré une répression sans relâche, de gigantesques manifestations dans tout le pays L'opposition syrienne en conclave en Turquie pour une sortie de crise
La Syrie a été le théâtre vendredi des plus importantes manifestations depuis le début, en mars, du soulèvement contre le régime de Bachar Al Assad, dont les forces de sécurité ont abattu une trentaine de contestataires pour cette seule journée, ont rapporté des témoins et des opposants. Malgré une répression ayant coûté la vie à 1.400 civils depuis mars, selon le bilan des opposants, des centaines de milliers de Syriens sont descendus dans les rues après les prières hebdomadaires et la contestation semble désormais avoir atteint Damas, pourtant plus aisée et mieux quadrillée par l'appareil de sécurité. "Il s'agit des plus grandes manifestations à ce jour. C'est un défi lancé ouvertement aux autorités, notamment quand on voit la forte affluence enregistrée pour la première fois à Damas", a déclaré Rami Abdelrahman, directeur de l'ONG Observatoire syrien des droits de l'homme. La police n'a pas hésité à tirer à balles réelles sur la foule à Damas et dans ses faubourgs, où 11 personnes ont été tuées, ainsi qu'à Deraa, berceau de la contestation dans le sud de la Syrie, où l'on déplore quatre morts, ont rapporté des témoins et des militants de l'opposition. Trois autres personnes ont été tuées par balles dans la province d'Idlib, dans le nord-ouest du pays, et deux autres à Homs. Un témoin dans le quartier damascène de Roukn Al Dine a rapporté que des centaines de jeunes hommes masqués et armés de bâtons et de pierres avaient affronté les forces de sécurité en scandant "A bas, à bas Bachar Al Assad". Un autre témoin interrogé par téléphone et se trouvant dans le centre de la capitale syrienne a déclaré: "Nous nous trouvons à Midane et ils nous tirent dessus avec des grenades lacrymogènes, les gens scandent des slogans." A Hama, une foule immense s'est rassemblée sur la place centrale, place de l'Oronte, en scandant: "Le peuple veut le renversement du régime!", pouvait-on voir sur des vidéos. La présence de blindés aux entrées de la métropole n'a pas dissuadé les contestataires de descendre dans les rues. Au moins 350.000 personnes ont manifesté en outre dans la province orientale de Daïr Az Zour, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme. Un Conseil de salut national, à défaut d'un gouvernement en exil Plus de 300 opposants syriens se sont réunis samedi à Istanbul avec l'ambition de rassembler l'opposition, cependant le chef de la diplomatie américaine Hillary Clinton, également en Turquie, s'est montrée nettement en retrait dans sa condamnation du régime de Bachar Al Assad. Après des discussions parfois houleuses, marquées par des objections virulentes de représentants kurdes réclamant une prise en compte de leur identité ethnique, les participants à la conférence se sont mis d'accord sur une déclaration finale, qu'ils devaient encore entériner par un vote. Malgré leurs divisions, les opposants syriens réunis samedi à Istanbul ont élu dans la soirée un Conseil de salut national, mais ont remis la formation d'un gouvernement en exil à plus tard. "Nous devons tendre la main à d'autres mouvements d'opposition pour conduire le pays vers notre projet démocratique", a déclaré Haisam Al Maher, figure de l'opposition, interrogé par Reuters à l'issue de cette conférence parfois houleuse. Les personnalités réunies pour la journée n'étaient pas toutes favorables à la formation d'un gouvernement parallèle pour faire pression sur le président Bachar Al Assad, non seulement dans la rue, mais aussi sur le plan politique. Les 350 délégués présents, pour la plupart des dissidents en exil depuis plusieurs années, se sont toutefois entendus pour élire ce Conseil de salut national. Il devait se réunir, hier dimanche, pour désigner les 11 membres d'un comité distinct chargé d'organiser un nouveau congrès "dont l'ordre du jour sera dominé par l'élection d'un gouvernement en exil pour aborder la période de transition après la chute du régime", a expliqué Adib Chichakli, militant démocrate issu d'une ligné de responsables politiques, installé en Arabie saoudite. A l'origine, une conférence jumelle devait se tenir simultanément à Damas, grâce a un système de visioconférence. Sous la pression des services de sécurité, les intellectuels et dissidents syriens qui devaient y participer ont toutefois dû y renoncer. Clinton pour une "coopération pacifique avec le gouvernement En marge d'une visite officielle en Turquie, la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton a jugé la répression "inquiétante". "La brutalité doit cesser. L'opposition doit faire un effort sincère et légitime pour essayer de faire changer les choses", a-t-elle déclaré lors d'une rencontre avec des jeunes dans un café. "L'avenir de la Syrie est désormais entre les mains des Syriens et, bien évidemment, les efforts mis en oeuvre par l'opposition pour se rassembler, s'organiser et définir un agenda sont tout aussi importants", a estimé la secrétaire d'Etat américaine. "Les efforts de l'opposition pour se regrouper, pour s'organiser et définir un programme constituent une part importante de la réforme politique", a pour sa part déclaré Hillary Clinton, en visite à Istanbul. Mais ses propos se sont situés en net retrait par rapport à ses déclarations du début de la semaine. La tentative des Syriens de constituer une opposition est "encourageante", a-t-elle dit, évoquant son espoir d'une "coopération pacifique avec le gouvernement en vue d'un avenir meilleur". Elle a jugé, de manière plus générale, que la situation syrienne ne pouvait pas être influencée de l'extérieur. "Aucun d'entre nous n'a vraiment d'influence, en dehors du fait de dire ce que nous croyons, et d'encourager les changements que nous espérons", a-t-elle déclaré à une chaîne de télévision.