Plusieurs centaines de Syriens scandant «Liberté!» se sont rassemblés samedi soir à Douma, dans la banlieue de Damas, pour accueillir les manifestants blessés la veille dans des heurts avec les forces de l'ordre, rapporte un témoin. Une cinquantaine de blessés à bord de voiture de police banalisées sont arrivés place de la Municipalité, où cinq personnes ont été tuées vendredi lorsque les services de sécurité ont ouvert le feu sur des militants réformistes, selon le bilan des mouvements de défense des droits de l'homme. Des agents de la police secrète ont en outre donné les noms de 25 blessés graves toujours hospitalisés et ont promis de rendre les corps des tués à leur famille avant la prière de midi, selon le même témoin. «Des personnalités locales ont clairement fait savoir aux autorités que Douma voulait ses morts. Nous en attendons 15», a-t-il ajouté. Les morts par dizaines Les décès de Douma portent à 60 tués au moins le bilan des manifestations contre le régime de Bachar al Assad et du parti Baas, qui ont débuté il y a quinze jours à Deraa, dans le Sud. A Deraa, des milliers de fidèles ont manifesté contre le régime devant le palais de justice en sortant d'une des mosquées de la ville, aux cris de «La mort plutôt que l'humiliation» et «Unité nationale». Dans cette ville, la violence a déjà fait au moins 30 morts selon les autorités, 55 selon Amnesty International, plus de 70 selon Human Rights Watch et 130 selon les militants sur place. Les autorités syriennes n'ont pas pour habitude de restituer les corps mais semblent prêtes à faire une exception pour Douma, ville charnière entre la campagne et la capitale, où la contestation était très organisée. «Douma est en ébullition. La Syrie en tant que Nation ne doit pas rester inerte et laisser passer cette chance historique de liberté», a plaidé un manifestant. La localité est devenue un point de ralliement pour les opposants de la région, disent les militants démocrates. A Deraa, où le mouvement a débuté avant de gagner les villes de la côte et la capitale, un sit-in qui a réuni jusqu'à 300 personnes a été dispersé samedi place du Sérail. La police a procédé à une vingtaine d'arrestations, selon des témoins. Un nouveau Premier ministre Le président syrien, Bachar Al-Assad, a chargé dimanche le ministre de l'Agriculure sortant, Adel Safar, de former le nouveau gouvernement, a annoncé l'agence officielle Sana alors que le régime fait face à une vague de contestation. «Le président Bachar al-Assad a promulgué un décret chargeant Adel Safar de former le gouvernement», a rapporté Sana. Membre du parti Baas et âgé de 58 ans, M. Safar a fait des études d'agriculture à l'Université de Damas avant d'obtenir un doctorat en France. Auparavant, Al Assad a ordonné jeudi la création d'une commission de juristes chargée d'examiner la levée de l'état d'urgence en vigueur depuis 1963. Il a également promis l'ouverture d'une enquête sur les violences, mais ces offres ont été jugées insuffisantes par les contestataires.