Les forces d'Alassane Ouattara et leurs rivales de Laurent Gbagbo ont campé sur leurs positions dimanche à Abidjan, où les combats ont été moins intenses qu'au cours des trois jours précédents. Après 72 heures de violents affrontements, on a vu s'installer un calme relatif dans la capitale économique ivoirienne, où la tension était néanmoins entretenue par des tirs et des explosions sporadiques. La grande offensive pour chasser du pouvoir le président sortant Laurent Gbagbo n'a pas eu lieu, même si le commandant de «Don», Issiaka «Wattao» Ouattara, avait lui aussi signalé un peu plus tôt que l'assaut, annoncé comme imminent depuis trois jours, allait débuter. Les partisans d'Alassane Ouattara, reconnu internationalement comme le vainqueur de l'élection présidentielle du 28 novembre, cherchent à contraindre le président sortant de lui céder le pouvoir. «Il n'y a pas eu de combats ici. Nous attendons la reprise des hostilités à tout moment et sommes prêts à nous défendre et à garder le contrôle d'Abidjan par tous les moyens», a déclaré un officier pro-Gbagbo au palais présidentiel. «Il sera difficile de prendre Abidjan, personne ne doit penser que nous abandonnerons facilement nos positions. Nous sommes déterminés à aller jusqu'au bout», a-t-il ajouté. S'exprimant plus tard dans la journée sur la TCI, la télévision contrôlée par le camp Ouattara, Guillaume Soro a expliqué que la stratégie avait consisté à encercler la ville, harceler les positions des troupes pro-Gbagbo et réunir des renseignements sur leur arsenal. «La situation est désormais mûre pour que l'offensive soit rapide», a-t-il déclaré. Rempart humain Selon un diplomate occidental, une attaque des pro-Ouattara contre la résidence présidentielle était prévue samedi mais n'a pas eu lieu, peut-être à cause du rempart humain formé par de jeunes partisans de Gbagbo . Les forces pro-Gbagbo ont repris le contrôle de la RTI, qui a diffusé au cours du week-end des images invérifiables du président sortant buvant tranquillement un thé dans ce qui ressemble à sa résidence d'Abidjan. Autre élément moralement réconfortant pour le camp Gbagbo, le chef d'état-major de l'armée ivoirienne, le général Philippe Mangou, a repris ses fonctions après avoir trouvé refuge pendant plusieurs jours à la résidence de l'ambassadeur d'Afrique du Sud. Les troupes de Laurent Gbagbo tiennent des positions autour du palais présidentiel, dans le quartier d'affaires du Plateau, et de la résidence du président sortant, à Cocody. Y'aurait-il division dans le camp Ouattara ? Selon des sources proches des insurgés, l'hésitation est aussi au moins en partie liée à des dissensions entre des commandants qui rivalisent pour gagner en influence dans l'hypothèse de l'après-Gbagbo. Les combattants regroupés derrière Ibrahim «IB» Coulibaly - personnalité clé au sein des «commandos invisibles» qui ont harcelé les forces de Gbagbo ces dernières semaines à Abidjan - affirment leur allégeance à IB, non à Ouattara. «IB veut être président. C'est un idiot», lâchait Wattao d'un ton sans appel ce week-end. Une autre explication possible est que les forces de Ouattara attendent simplement le bon moment pour attaquer, mais la question est de savoir combien de temps, elles pourront patienter. De source proche du camp Ouattara, on dément l'existence de divisions internes et on explique que l'»assaut final» prendra plus de temps que prévu parce que les FRCI ont d'abord voulu assurer leurs gains sur le terrain. Dans le camp de base, certains hommes de Wattao ont remarqué dimanche que leur ration de pain n'était pas accompagnée de la boîte de sardines habituelle.