Parmi les curiosités du salon du livre de Casablanca, une exposition de «livres tactiles» pour enfants et jeunes non-voyants. Cela est visible au stand dédié aux livres pour enfants des éditions «Yanbow Al Kitab». Apparemment, il s'agit de la première expérience marocaine du genre. Ces livres tactiles sont constitués de pages avec des dessins en relief et de l'écriture en braille accompagnant ces dessins et aussi de l'écriture en caractères alphabétiques. Ces livres sont réalisés à la suite d'une convention entre l'Association Marocaine pour la Réadaptation des Déficients Visuels (AMARDEV) et l'éditeur de livres pour enfants «Yanbow Al Kitab» au bénéfice des déficients visuels de cette ONG qui a son siège au Complexe culturel d'Anfa à Casablanca. Il s'agit d'une nouvelle expérience de l'AMARDEV et de son atelier «Touche à Tout» de la ludothèque qu'elle anime avec des animateurs bénévoles. «Pour l'instant, les textes en caractère alphabétique normal et en écriture braille sont surtout en français car nous n'avons pas de logiciel en arabe qu'il faudrait importer du Caire ou de l'Arabie Saoudite», indique Rachid Rifaï président de l'AMARDEV, cadre bancaire non voyant. L'association attend un mécène pour la doter d'un logiciel en arabe qui est assez onéreux. Ce logiciel permettra d'enrichir sa ludothèque de livres tactiles pour lecteurs déficients visuels voulant lire en arabe. L'AMARDEV avait créé une structure d'accueil pour non-voyants au centre culturel Anfa à Casablanca depuis 2006 grâce à un partenariat avec la Ligue française de l'enseignement, ensuite avec la Fondation Colas Maroc. «Nous avons une soixantaine de personnes déficientes visuelles bénéficiaires, généralement des enfants âgés entre 2 à 14 ans» poursuit Rachid Rifaï. La structure est entièrement gérée par des bénévoles dont Rachid Rifaï et Afaf Zaoug, une jeune non-voyante qui avait effectué son cursus scolaire à l'Organisation Alaouite pour la Promotion des Aveugle, obtenu une licence en littérature arabe à la faculté des lettres et sciences humaine de Ain Chok. A la Fac, elle avait trouvé des difficultés multiples parce qu'il n'y avait pas de livre en braille. Ce qui ne l'a pas empêché de réaliser une thèse de fin d'étude sur le conte orale à partir d'une enquête de terrain sur sa région d'Idaw Tanane (région d'Agadir) où, malgré son handicap, elle a pu collecter, en parfaite ethnographe, des contes racontés en tachelhit qu'elle a enregistrés et transcris ensuite en caractère arabe. Avec les autres éléments du groupe au sein de l'AMARDEV, Afaf s'occupe du projet du livre tactile qu'on fabrique de manière artisanale, chaque livre étant une pièce unique contrairement au livre ordinaire que l'imprimerie permet de duplicater en nombre d'exemplaires qu'on veut. Ce genre de livres, assure Rifaï, joue un rôle essentiel pour développer chez le non-voyant le sens du toucher et le goût de la lecture. Selon Rachid Rifaï, la structure de l'AMARDEV, bien qu'elle ne compte qu'une soixantaine de bénéficiaires, constitue un dictame pour les familles qu'elle peut toucher. «Les parents d'enfants non-voyants sont dans le désarroi, ils ne savant pas quoi faire car il n'y a que 12 écoles de non-voyants au Maroc et il y a 57 mille enfants déficients visuels en âge de scolarité sur les 180 milles non-voyants que compte le pays, selon l'enquête réalisée par le secrétariat d'Etat chargé des Handicapés». Rachid Rifaï est non-voyant depuis l'âge de dix ans. Doué pour les études, il avait obtenu un Bac à Paris dans un lycée d'élèves non déficients visuels, avait obtenu une licence en économie et un Doctorat en markéting. Ayant travaillé dans le secteur bancaire en France pendant trois ans, à son retour au Maroc, il n'a pas trouvé de difficultés pour s'intégrer dans le même secteur dit-il. «Pour s'intégrer, il faut toujours avoir des atouts».