La rentabilité des banques marocaines a continué de se redresser au 1er trimestre 2022. D'après Fitch Ratings,cette tendance positive se poursuivrait, mais pourrait être ralentie à mesure que les conditions économiques mondiales défavorables se répercutent sur l'économie nationale et exercent une pression sur la qualité des actifs. Leur bénéfice net global a atteint les niveaux d'avant la pandémie, stimulé par la baisse des charges de dépréciation des prêts, souligne Fitch Ratings. Nous nous attendons à ce que la tendance positive se poursuive, mais elle pourrait être ralentie car les conditions économiques mondiales défavorables se répercutent sur l'économie locale et exercent une pression sur la qualité des actifs. Le bénéfice net agrégé des sept banques (AttijariWafa Bank, Groupe banque populaire, Bank Of Africa, Crédit du Maroc, CIH Bank, Société Générale Maroc, BMCI) a augmenté de 21 % en glissement annuel au 1er trimestre 2022, explique l'agence de notation internationale Fitch Ratings dans une récente note. « L'amélioration a été tirée par une diminution de 21 % en glissement annuel des charges de dépréciation des prêts, qui ont continué de chuter par rapport aux niveaux élevés de 2020-2021, lorsque les banques ont constitué des provisions importantes en début de période pour compenser les risques liés à la pandémie », explique la même source. Selon Fitch Ratings, la baisse des charges de dépréciation des prêts « reflète une stabilisation de la qualité des actifs ». Et de poursuivre que le ratio des prêts non performants du secteur était de 8,7 % à fin mars 2022, globalement inchangé par rapport à fin 2021. Cependant, souligne Fitch Ratings, les charges de dépréciation des prêts annualisés au 1er trimestre 2022 sont toujours supérieurs de 44 % au niveau de 2019, reflétant les risques liés à l'environnement opérationnel et un provisionnement prudent dans un contexte économique incertain. L'agence de notation internationale fait remarquer aussi que le ratio de ces charges au bénéfice d'exploitation avant dépréciation pour les sept banques est tombé à 32 % au 1er trimestre 2022 (2021 : 40 %). Ce qui est faible par rapport à de nombreux marchés d'Afrique subsaharienne - mais toujours bien supérieur au ratio de 2019 de 24 %, note encore Fitch Ratings, précisant que la normalisation des charges de dépréciation des prêts vers les niveaux de 2019 dépendra du rythme et de l'ampleur de la reprise économique du Maroc. Elle s'attend à ce que ces charges « continuent de baisser mais restent au-dessus des moyennes historiques en 2022 en raison d'une croissance économique plus faible ». BAM pourrait relever son taux directeur en 2022 Fitch fait observer, en outre, que le rendement des fonds propres moyens des banques s'est amélioré à 8,6 % au 1er trimestre 2022 (2021 : 8,1 %). Elle s'attend à ce que ce rendement « s'améliorera encore d'ici la fin de 2022, mais reste inférieur au niveau de 9,9 % de 2019...». Cela peut conduire, d'après les analystes de Fitch, certaines banques à étendre leurs activités à travers l'Afrique à la recherche d'une rentabilité plus élevée. Autre élément soulevé par Fitch : les produits d'intérêts nets agrégés des banques ont augmenté de 0,6 % au 1er trimestre 2022, reflétant la baisse des taux d'intérêt et la croissance limitée des prêts. Le taux de prêt moyen est tombé à 4,3 %, le plus bas depuis plusieurs années. Côté prévisions, l'agence de notation prévoit une hausse des taux de prêt en 2022-2023 en raison de l'augmentation du risque de crédit et des pressions inflationnistes. « La banque centrale du Maroc pourrait relever son taux directeur en 2022, les taux d'intérêt réels étant négatifs depuis octobre 2021. Une hausse des taux pourrait être déclenchée par l'augmentation du taux directeur de la BCE prévue pour juillet 2022, ou par de nouvelles hausses plus tard en 2022, étant donné que le dirham marocain est rattaché à un panier de devises pondéré à 60 % par rapport à l'euro et à 40 % par rapport au dollar américain », prévoit Fitch Ratings. Les banques marocaines en profiteront car la hausse des taux d'intérêt se répercutera sur les taux de prêt, estime la même source. Et d'ajouter qu' « environ 30 % des prêts intérieurs arrivent à échéance dans les 12 mois, la retarification étant susceptible d'être à des taux plus élevés, tandis que les coûts de financement ne devraient pas augmenter de manière significative car les banques sont largement financées par des dépôts à faible coût sur les comptes courants et les comptes d'épargne (84 % des prêts du secteur dépôts à fin 2021) ». Nonobstant, poursuit Fitch, la faible croissance des prêts et la concurrence entre les banques pourraient limiter les avantages d'une hausse des taux d'intérêt. « Nous prévoyons une croissance des prêts de 3 % à 4 % en 2022 (2021 : 2,8 %), principalement tirée par les facilités de fonds de roulement à court terme pour répondre à la demande des entreprises en raison de la hausse de l'inflation et des prix des matières premières », pronostique Fitch. Enfin, Fitch Ratings prévoit une croissance du PIB réel de seulement 1,1 % en 2022 (2021 : 7,4 %), passant à 3 % en 2023, et une croissance plus faible que prévu dans la zone euro, principal partenaire commercial du Maroc. Elle estime aussi que la flambée des prix de l'énergie et des denrées alimentaires pourrait présenter des risques pour les prévisions. A. CHANNAJE