La visite de la Secrétaire d'Etat adjointe américaine, Wendy Sherman, au Maroc a été une occasion pour débloquer la coopération militaire entre Rabat et Washington, perturbée par des pressions du Congrès. Détails Très attendue par la diplomatie marocaine, la visite de la Secrétaire d'Etat adjointe, Wendy Sherman, est intervenue dans un moment opportun, où les relations maroco-américaines ont besoin de clarté. La numéro deux du Département d'Etat a été au rendez-vous, en réaffirmant le soutien des Etats-Unis au Maroc dans le dossier du Sahara. Un soutien pourtant limité au plan d'autonomie, sachant qu'aucune mention de la reconnaissance de la souveraineté du Royaume sur le Sahara n'a été prononcée. Certes, les annonces officielles peuvent parfois s'avérer moins retentissantes que les assurances de coulisses. L'Administration démocrate de Joe Biden a assuré à maintes reprises que la décision de Donald Trump restera en vigueur, bien que le Département d'Etat préfère évoquer le processus des Nations Unies à chaque fois qu'il est question du conflit régional. Mais le soutien américain est là et Wendy Sherman l'a clairement exprimé. Rappelons que celle-ci est perçue comme l'un des alliés sur lesquels le Maroc peut compter au sein de la diplomatie américaine. Coopération militaire : contournement des pressions du Congrès La visite de la diplomate américaine n'a pas été uniquement l'occasion de rassurer le Royaume du soutien US, mais également d'élucider plusieurs points et mettre fin à quelques désaccords qui ont surgi surtout en ce qui concerne la coopération dans le domaine de la défense. Après sa rencontre avec le ministre des Affaires étrangères, Nasser Bourita, Sherman a exprimé la gratitude de son pays envers le Royaume pour abriter les exercices conjoints African Lion, le plus grand exercice conjoint en Afrique qui se déroule chaque année dans le Sud du Maroc. Cette gratitude américaine s'est exprimée également dans les actes et pas uniquement dans les paroles. Concomitamment à cette visite, les Etats-Unis ont débloqué, à titre dérogatoire, le soutien financier destiné à la participation du Maroc dans les exercices militaires. Bardha Azari, porte-parole du Commandement américain pour l'Afrique, a annoncé cette nouvelle au journal britannique Middle East Eye. « Le secrétaire à la Défense vient de signer une dérogation qui permet au Commandement Afrique des Etats-Unis de poursuivre la coopération et l'entraînement avec le Maroc», a-t-elle déclaré, ajoutant : « Notre partenariat militaire avec le Maroc est solide et nous sommes convaincus que ce partenariat inébranlable continuera de prospérer dans les années à venir ». Ce geste vient contourner la tentative du Congrès américain de restreindre le soutien de Washington à Rabat en ce qui concerne les exercices militaires multilatéraux, à l'instar d'African Lion. Pour mieux comprendre la situation, il convient de rappeler que le Congrès américain, sous la pression des élus du lobby pro-polisario commandé par le faucon James Inhofe, avait adopté un amendement au "National Defense Authorization Act" (NDAA), qui limite les fonds finançant la participation du Maroc à tout exercice multilatéral administré par le Département de la Défense. Une façon de couper au Maroc les fonds fédéraux mis à la disposition du Département de la Défense. Toutefois, cet amendement permet, à titre d'exception, d'accorder une dérogation pour des raisons de sécurité nationale. Ce sur quoi s'est appuyé le Secrétaire d'Etat pour débloquer le financement. L'amendement conditionne cette aide par l'engagement du Maroc à chercher une solution mutuellement acceptable dans le conflit du Sahara. Ce que le Maroc a toujours fait en prenant, de son plein gré, l'initiative de proposer le plan d'autonomie, dont la crédibilité est reconnue par la communauté internationale. Le Congrès américain est devenu un lieu propice pour les lobbys pro-algériens pour s'attaquer aux intérêts du Maroc. Il y a quelques jours, une dizaine d'élus démocrates sont allés jusqu'à implorer le président Joe Biden de suspendre la livraison d'armes au Maroc. D'ailleurs, cette influence des élus du Congrès explique en partie la raison pour laquelle l'Administration américaine attache autant d'importance à la solution politique. Ces tentatives ne semblent nullement en état d'infléchir la position de la Maison Blanche qui reconnaît la valeur d'un allié comme le Maroc en Afrique du Nord. En témoigne la déclaration de Wendy Sherman qui a qualifié le Royaume de « partenaire stable et exportateur de sécurité », tout en exprimant sa gratitude pour le soutien continu du Maroc aux exercices militaires multilatéraux « African Lion ». Avec cette nouvelle dérogation, l'Administration américaine se montre flexible, ce qui pourrait augurer un potentiel déblocage des contrats d'armement restés en stand-by, à savoir le contrat d'achat des drones MQ-9B Sea-Guardian. Le Maroc les attend avec impatience. Coopération économique : cap sur Dakhla Au-delà de la coopération militaire, le Business est à l'ordre du jour. Au lendemain de la visite de la Sous-Secrétaire d'Etat, les relations économiques maroco-américaines ont connu un nouvel élan avec la tenue du forum économique Maroc-USA à Dakhla. Réunissant des investisseurs avec les responsables marocains, ce forum est une façon de courtiser le capital américain et l'inciter à investir dans les provinces du Sud et aller au-delà vers le marché de l'Afrique subsaharienne. Une opportunité qu'offre le Maroc à ses partenaires, de par son positionnement géographique et sa présence notoire en Afrique de l'Ouest, sachant que le Royaume est le premier investisseur africain dans la région et le deuxième à l'échelle du continent. En effet, ce forum s'est focalisé sur les opportunités d'investissement et les domaines où peuvent prospérer des IDE américains. Les domaines de l'agriculture, le tourisme ou encore les mines et les énergies renouvelables s'annoncent comme les plus convoités par les capitaux américains. Ceci n'est qu'une première étape qui consiste à tâter le terrain. Au lendemain de la reconnaissance américaine de la marocanité du Sahara, les Etats-Unis se sont engagés à soutenir à hauteur de trois milliards de dollars les projets d'investissement dans les provinces du Sud. Le Maroc attend encore l'ouverture du nouveau consulat des Etats-Unis à Dakhla.