Pour gérer les clubs au quotidien durant la crise sanitaire, les supporters du Wydad et du Raja qui disputeront le match du derby, ce dimanche, ont participé à la vente de tickets virtuels ou de maillots des deux clubs. Mais pour sauver le ballon rond, une stratégie durable est urgente. Touché par le Covid-19, le monde du football cherche des remèdes. Le modèle de gestion actuel, basé sur des revenus classiques (billetterie, sponsors, droits de retransmission, vente de joueurs, etc.) a prouvé ses limites. A l'échelle nationale, les équipes, plus ou moins, ont innové pour s'adapter à cette crise sanitaire. Prenons les exemples des deux anciennes équipes du championnat national, le Wydad et le Raja, qui se préparent à disputer leur match du derby, prévu dimanche 21 mars 2021. Concernant le Wydad, plusieurs projets ont été réalisés, suite aux directives du président du club. « Pendant le confinement, nous avons organisé un match virtuel contre le Covid-19, qui nous a per- mis la vente de 60.000 tickets virtuels en 48 heures. Pendant cette période, nous avons aussi initié une campagne de vente de 10.000 mail- lots portant le slogan « Tous contre le Covid », à 150 DH l'unité. Les revenus de ces deux opérations ont été partagés avec le Fonds de solidarité contre le Covid. D'autre part, le 8 mai dernier, correspondant au 83ème anniversaire de notre équipe, nous avons aussi vendu le drapeau du club, dont les bénéfices sont allés renforcer la trésorerie du club», a expliqué Karim Berdaï, membre de la cellule marketing du Wydad. Pour encourager les sponsors à investir, sur le terrain le parc d'affichage a été revu, pour optimiser tous les espaces. « Avec cette nouvelle stratégie d'affichage, les 90 minutes du match sont déjà vendues pour toute l'année. D'autre part, nous proposons à nos sponsors un affichage en 3D qui seront opérationnels dès le prochain match du Derby », a ajouté M. Berdaï. Du côté du Raja, l'équipe a aussi mobilisé son public pour participer à une campagne digitale pour vente de tickets virtuels. Par ailleurs, la campagne d'adhésion au club pour la saison 2020-2021 a permis aux nouveaux adhérents de verser dans les caisses du club 3,4 millions DH. Malgré ses difficultés, le club a participé au Fonds de solidarité contre le Covid-19, créé par SM le Roi Mohammed VI. C'est aussi dans ce contexte difficile que le parlement du Raja, institution représentant les adhérents, a versé 1 million DH pour affréter un avion spécial pour se déplacer, lundi 15 mars, en Zambie, afin de permettre au Raja de disputer son match comptant pour la 2ème journée de la Coupe de la CAF. Les « Verts » comptent aussi sur le projet Raja-Connect qui verra prochainement le jour. Il s'agit d'une plate-forme Internet qui permettra aux « Rajaouis » de payer leurs fac- tures et leurs achats avec une carte bancaire. Le Raja prélèvera des commissions sur toutes les opérations, effectuées via ce portail numérique. Malgré les aides de l'Etat au sport, ainsi que des activités génératrices de revenus, inventées par les clubs, le football a besoin de financements innovants, afin de s'inscrire dans des stratégies durables. A ce stade, tous les regards sont tournés vers les grands clubs professionnels européens, accusés d'avoir perverti ce sport populaire. Ces dirigeants qui ont poussé le système à l'extrême, en payant et en achetant des joueurs à des prix hors normes. En France, le dernier rapport annuel de la direction nationale du contrôle de gestion indique que « la masse salariale des joueurs des 20 clubs de la Ligue 1 française représentait 1,58 milliard d'euros pour des recettes s'élevant à 2,1 milliards d'euros, hors transfert pour la saison 2018-2019 ». La première solution pour sauver le football, selon les observateurs sportifs, c'est d'imposer une limitation structurelle des salaires via un « plafond salarial » pour limiter la part de la masse salariale dans le budget des clubs. D'ailleurs, la Fédération allemande de football a appelé, en mai 2020, l'Union des associations européennes de football (UEFA) à se saisir de cette question. Autre piste à explorer : la baisse du nombre de joueurs par équipe. Sans parler des grands clubs européens,« plusieurs équipes françaises - dont l'Olympique de Marseille et le Paris Saint-Germain – disposent de plus de 30 joueurs professionnels sous contrat, sans compter les joueurs prêtés à d'autres équipes ». Parmi les solutions expérimentées, le « scouting », cet anglicisme qui signifie la quête de jeunes talents. Dans ce sens, l'équipe de Feyenoord de Rotterdam a déjà recruté six agents, qui sillonnent le monde entier toute l'année. L'équipe portugaise du Benfica, elle, a deux personnes qui arpentent l'Amérique latine. Depuis plus d'un an, les matchs de football se déroulent sans spectateurs. Ces derniers vont-ils tous revenir aux stades comme avant le début de la pandémie ? La réponse occupe les esprits. Mais ce qui est sûr, c'est que le renouveau du football ne se fera pas sans les supporters. Dans l'avenir, le public devra être au cœur de la nouvelle gouvernance des clubs. Déjà, ces expériences associant les supporteurs à la gestion des clubs, sont devenues réalité en Allemagne et en Espagne. A ce niveau, la règle « 50 +1 » qui permet que la majorité d'un club appartienne à une association à but non lucratif, tandis que les 49% des parts sont entre les mains d'investisseurs. Ce qui est déjà appliqué en Suède. Enfin, le débat relatif à l'impact du Covid-19 sur l'avenir du sport devrait inclure le sport féminin et amateur. « Les prises politiques et médiatiques sur l'avenir du sport se sont concentrées sur le sport masculin professionnel, en particulier sur ses disciplines les plus médiatisées », ont dénoncé deux experts dans une tribune, publiée dans « Le Monde », ce début mars. Et d'ajouter : « Rares, pour ne pas dire inexistants, sont les colloques ou articles pour penser le sport d'après, qui portent ne serait-ce qu'en partie sur le sport féminin ». « Pour diversifier ses revenus, notre équipe mise sur le projet Raja-Connect » Les effets de la crise sanitaire sur la gestions des équipes de football sont conséquents. Nous avons rencontré Saïd Wahbi, porte-parole du Raja, pour nous expliquer les solutions mises en œuvre pour assurer le quotidien du club. - Quelles ont été les principales répercussions de la crise sanitaire, provoquée par le Covid-19, sur la gestion du club du Raja ? L'impact de la pandémie du Covid-19 sur l'économie mondiale s'est répercuté aussi sur le football. Le premier capital du Raja, c'est son large public aussi bien au Maroc qu'à l'étranger. Nous jouons sans spectateurs depuis le 14 mars 2020 soit plus d'une année. Il y'a un manque à gagner de 25 à 30 millions de dirhams environ. Pour la saison 2020-2021, nous jouerons aussi sans public, sauf si les autorités décident d'un retour progressif des spectateurs vers les stades. Cela étant, nous nous acheminons aussi vers une perte sèche de 25 à 30 millions de dirhams. Le manque à gagner est au minimum pour les deux années sportives 2019-2020 et 2020-2021, d'environ 50 millions de dirhams. -Pour affronter la pandémie du Covid-19, quelles ont été les principales solutions adoptées par le Raja ? Notre grand capital, c'est notre public. Il a participé avec nous à la campagne numérique de ventre de tickets virtuels. Le parlement du Raja, institution représentants les adhérents, qui a répondu favorablement à la campagne d'adhésion de la saison 2020-2021 permettant aux nouveaux adhérents de verser au club 3,4 millions de DH. Aujourd'hui, les salaires et les primes de matchs sont payés. Mais il reste les tranches de primes de signature qui n'ont pas été versées. Mais elles seront certainement honorées. Nos joueurs arrivés en tête du championnat de Botola Pro D1, l'année dernière, demi-finalistes de la CAF et finalistes de la Coupe arabe méritent notre respect. Le Raja est aussi riche de ses sponsors. Avec eux, un plan de recouvrement a été établi. Notre club enregistre un bilan de 20 millions de DH grâce aux sponsors. Nous recevons aussi l'aide de la Région Casablanca-Settat et de la ville de Casablanca que nous remercions. -Pour diversifier vos revenus, vous citez le projet Raja-Connect. Pouvez nous en expliquer davantage ? Pour consolider notre situation financière, le Raja mise sur la diversification de ses revenus via le projet Raja-Connect qui verra bientôt le jour. C'est une plateforme de paiement par internet qui permettra aux « Rajaouis » grâce à une carte bancaire de payer les factures d'eau et d'électricité, les recharges télephoniques, les impôts, les achats, etc. Cette plateforme appartient à un conglomérat, composé d'une société de services et le Raja. Notre équipe prélèvera des commissions sur ces opérations qui lui permettront d'avoir des revenus réguliers. Enfin le Raja est en pourpalers avec plusieurs sponsors pour leur publicité sur le maillot.