Le dernier bilan de l'épidémie de choléra s'élève à 2.120 morts dans ce pays encore en reconstruction suite au séisme de janvier dernier. Avec l'annonce des résultats du premier tour de la présidentielle, la situation s'envenime et de nombreux manifestants partent à l'assaut des rues pour exprimer leur colère. Le choléra, maladie très contagieuse, continue de se répandre rapidement à Haïti. Selon les derniers chiffres disponibles, l'épidémie a touché 93.222 personnes et fait 2.120 morts. Un bilan très lourd pour ce pays déjà dévasté par le tremblement de terre du 12 janvier dernier, qui avait laissé 1,3 million de sinistrés et causé la mort de plus de 250.000 personnes. Les pronostics de l'Organisation panaméricaine de la santé (OPS), branche de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), ne sont guère optimistes : selon eux, il pourrait y avoir jusqu'à 400.000 cas de choléra au cours des douze prochains mois, dont la moitié durant le seul trimestre prochain. Sur place, plusieurs organisations humanitaires, dont Médecins Sans Frontières (MSF), tentent de répondre à cette épidémie. Entre le 22 octobre et le 5 décembre, MSF a ainsi soigné plus de 51.000 personnes présentant des symptômes du choléra en Haïti et a importé 770 tonnes de fournitures médicales et logistiques dans le pays (voir interview en encadré). Face à l'apparition du choléra, des rumeurs ont circulé sur l'île, accusant les casques bleus népalais de la Mission de l'ONU en Haïti (Minustah) d'être à l'origine de la propagation de ce fléau. Une étude publiée jeudi par une équipe de scientifiques américains et haïtiens, dans les colonnes du New England Journal of Medicine, appuie la thèse que l'épidémie a été importée par une source humaine extérieure à la région. Le rapport ne pointe toutefois pas directement du doigt les casques bleus népalais. Les conclusions des chercheurs divisent. Sur place, la Mission de l'ONU accueille ce rapport avec beaucoup de prudence, jugeant qu'il n'existait aucune « preuve concluante », et l'armée népalaise le condamne. Les chercheurs indiquent toutefois que des analyses complémentaires sont nécessaires pour identifier la source précise de la maladie, prenant acte des violences meurtrières déclenchées par les rumeurs impliquant le contingent népalais d'environ 1.000 hommes, placé depuis sous protection. En parallèle de cette situation sanitaire alarmante, le climat politique est très tendu à Haïti après l'annonce des résultats du premier tour de la présidentielle du 28 novembre dernier. Les partisans des candidats se mobilisent et descendent dans les rues pour exprimer leur colère. Les militants du candidat Michel Martelly, arrivé troisième au premier tour, ragent toujours de ne pas voir leur favori au second tour et dénoncent des fraudes lors du scrutin. Jeudi, les partisans du candidat du pouvoir Jude Célestin, qualifié pour le second tour, ont également défilé par centaines. Ce climat chaotique nuit aux activités des organisations humanitaires, qui poursuivent tant bien que mal leurs activités en réponse à l'épidémie de choléra. « Les véhicules MSF sont parmi les seuls à circuler en ville. La plupart du temps, les manifestants ouvrent les barricades pour laisser passer nos ambulances», rapporte dans un communiqué Francisco Otero, chef de mission de MSF. «Cela est primordial pour pouvoir assurer le transfert des patients graves et le maintien de nos activités médicales».